APPEL DE SOUTIEN A LA CANDIDATURE DE ADO :Bédié sera-t-il entendu ?
Les dés semblent jetés. Sauf tremblement de terre, le chef de l’Etat ivoirien Alassane Dramane Ouattara (ADO) sera réélu président en 2015. C’est le moins que l’on puisse dire avec cet appel que le président du Parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI), Henri Konan Bédié, a lancé à ses militants, les invitant à soutenir la candidature du président Ouattara en 2015.
Le président ADO peut dormir tranquille
Par cet appel, faut-il le rappeler, Henri Konan Bédié vient de couper l’herbe sous les pieds de tous ceux-là qui, au sein du parti, avaient commencé à ronger leurs freins, criant à qui veut les entendre que pour sa survie politique, le PDCI a l’obligation de présenter un candidat en 2015. Que va-t-il donc se passer ? Que feront maintenant les frondeurs comme Kouadjo Konan Bertin et son mentor Alphonse Djéjé Madi ? Vont-ils se démarquer de cet appel en créant leur propre parti ? Rien n’est moins sûr. Toujours est-il que le président ADO peut dormir tranquille, rassuré qu’il sera réélu en 2015. Surtout que suite à la réélection de Youssouf Bakayoko à la tête de la Commission électorale indépendante (CEI), le Front populaire ivoirien (FPI) a décidé de se retirer de cette institution, pour remettre en cause ce choix jugé pas assez consensuel et remettre le débat au goût du jour. Mais ADO n’entend pas revenir sur cette question, car pour lui, il faut aller de l’avant. Et il l’a fait savoir, en des termes très clairs, au cours de sa récente tournée dans le fief de celui qu’il appelle respectueusement « son grand frère Henri Konan Bédié ». Il a invité du même coup le FPI à réintégrer cette institution qui organisera la présidentielle de 2015, au nom de la transparence et de la pluralité. Pour lui, la politique de la chaise vide n’est pas payante. Cela est d’autant plus vrai que malgré le boycott du FPI, les municipales et les législatives se sont bien déroulées en Côte d’Ivoire et, à ce jour, le Parlement fonctionne sans problème majeur. D’un autre côté, l’on peut dire que le consensus est certes important, mais il est plus un arrangement qu’une obligation légale. C’est dire si dans l’impossibilité de l’atteindre, c’est la loi de la majorité qui fait foi.
Il y aura l’alternance en 2020 entre les deux alliés de 2010
Ce serait donc un mauvais calcul pour l’opposition de penser que ce retrait pourrait remettre les choses en cause, même si cela pourrait impacter quelque part le processus. On le comprend, le FPI ne veut pas légitimer le pouvoir d’ADO qu’il a toujours contesté. Mais il lui faudra faire preuve de réalisme et se résoudre à accepter, une fois pour toutes, que le rapport de force du moment n’est pas en sa faveur, pour qu’il veuille mener les débats à sa guise. Il lui faudra penser une autre stratégie que le radicalisme, s’il veut se donner des chances de survivre pour reconquérir le pouvoir d’Etat. En cela, dans le débat qui se mène actuellement en son sein entre modérés et radicaux, l’on est enclin à penser que l’aile modérée conduite par le président du parti, Pascal Affi N’guessan, fait preuve d’un réalisme et d’une clairvoyance qui pourraient être salutaires au parti, si elle était suivie. Malheureusement, elle a été mise en minorité lors du vote pour le retrait du parti de la CEI. En tout état de cause, à cette allure, le FPI court à son implosion si le fossé continue
de se creuser entre ses leaders. En tous les cas, la perspective de la création d’un méga-parti, annoncée par Henri Konan Bédié et qui s’appellerait PDCI-RDR (un grand creuset rassemblant tous les Houphouëtistes), indique sans ambages que le FPI a intérêt à se ressouder. Faute de quoi, il mourra. Car, comme pour calmer les poulains de son écurie, HKB a annoncé qu’en 2020, il y aura l’alternance. Et cette alternance-là, a-t-il laissé entendre de façon sibylline, sera une passation du pouvoir entre les deux alliés du ticket gagnant de 2010.
Cela dit, pour revenir à la CEI, l’on comprend que l’expérience récente de cette institution est la raison fondamentale de toutes ces batailles pour la contrôler. La CEI est certes importante, mais ce n’est pas là que se jouent les élections. C’est d’abord sur le terrain. C’est pourquoi le FPI aurait tort de se mettre en marge de la marche politique de la Côte d’Ivoire. D’autant plus que la bataille semble perdue d’avance, étant donné qu’avec ou sans lui, le processus se poursuivra et la Côte d’Ivoire avancera. Du reste, le président Ouattara a évoqué la possibilité, pour lui, si la situation le recommande, de faire fi de la CEI et de recourir au ministère de l’Intérieur pour organiser les élections, comme cela relève de ses prérogatives. De plus, ce ne sont pas les moyens qui manqueraient à ADO pour légitimer voire ennoblir sa victoire en 2015, soit par l’appel à des observateurs internationaux, soit par la participation d’autres candidatures de taille à l’élection présidentielle. Le FPI a donc tout à perdre en laissant le champ libre à ADO pour qui cette absence pourrait être du pain bénit pour assurer et renforcer ses arrières. S’il n’y prend garde, le FPI risque de se faire hara-kiri.
Dans tous les cas, participer ou ne pas participer à une élection est un droit du citoyen. Mais cela n’empêchera pas la république de fonctionner. ADO a fait sa mise en garde et a lancé son appel.
La balle est maintenant dans le camp de l’opposition. L’on se demande quelle sera sa réaction et surtout si l’appel du président sera entendu.
Outélé KEITA