HomeA la uneAPPOLINAIRE COMPAORE, candidat à la présidence de la CCI-BF : « Je n’appartiens à aucun clan, ce qui me permettra d’agir dans l’intérêt général»

APPOLINAIRE COMPAORE, candidat à la présidence de la CCI-BF : « Je n’appartiens à aucun clan, ce qui me permettra d’agir dans l’intérêt général»


L’élection à la présidence de la Chambre de commerce et d’industrie du Burkina (CCI-BF) s’annonce des plus indécises dans l’histoire de cette institution. Pour une des rares fois, des candidats, au nombre de trois, sont officiellement sur la ligne de départ et s’affronteront sur le terrain de la démocratie. L’un des candidats, et non des moindres dans le monde des affaires au Burkina,  n’est autre que Apollinaire Compaoré qui est en lice. A quelques encablures de cette échéance importante, les Editions « Le Pays » a échangé avec le candidat. C’est ainsi que Appolinaire Compaoré, par ailleurs président du Conseil d’administration de Telecel et président du Groupe Planor Afrique, dévoile ses ambitions pour le secteur privé burkinabè.

« Le Pays » : Quel bilan faites-vous du déroulement de la campagne qui s’achève ?

 

Appolinaire Compaoré : Le bilan est très positif. Je suis membre de la Chambre de commerce et d’industrie depuis des années mais, c’est la première fois que les élections consulaires suscitent autant d’engouement. Avant, c’était un arrangement plus ou moins imposé autour d’une personne qui était élue par acclamation. Mais vous savez qu’il y a eu l’insurrection populaire des 30 et 31 octobre 2014 et comme on dit, « plus rien ne devrait être comme avant ». Je me réjouis donc de voir que les élections consulaires intéressent beaucoup de monde. J’ai fait la campagne avec mon équipe en parcourant tous les coins du pays pour rencontrer les opérateurs économiques de toutes les catégories professionnelles. J’ai écouté leurs doléances que je connaissais d’ailleurs globalement, les solutions qu’ils proposent, leurs attentes quant au contenu du changement qui sera apporté dans le fonctionnement de la Chambre de commerce. Il faut le savoir, tout changement n’est pas positif. Je prends l’engagement solennel, devant le monde des affaires et devant le peuple burkinabè, que si mes collègues et compatriotes me font confiance, je réconcilierai tous les acteurs économiques et des affaires avec la Chambre de commerce qui est leur maison. Je sais que beaucoup de commerçants, professionnels opérant dans les services, le BTP et l’industrie ne s’intéressent pas aux activités de la Chambre parce qu’ils ne font pas confiance à ceux qui la dirigent. Ils ont le sentiment que la Chambre de commerce est monopolisée par un clan et qu’on ne s’occupe pas d’eux. Tout cela doit changer et je veux porter ce changement. Ils peuvent compter sur moi pour leur rendre leur maison. Le premier tour du scrutin qui a eu lieu le 13 novembre dernier s’est bien déroulé et malgré quelques imperfections, on peut dire que l’élection était démocratique. J’ai été élu dans la catégorie Télécommunications et je remercie tous ceux qui ont voté pour moi. Je leur demande de se mobiliser davantage pour terminer le travail  le 30 novembre, date de la mise en place du bureau national. Je félicite ceux qui ont été élus dans leurs secteurs respectifs et j’apporte mes encouragements aux perdants.

Êtes-vous confiant face à vos adversaires qui ne sont pas des faire-valoir dans le monde des affaires au Burkina ?

 

Bien sûr que je suis confiant, sinon, je ne serais pas candidat à ce poste hautement stratégique dans le monde des affaires au Burkina. Je connais bien mes adversaires et je respecte ce qu’ils font comme activités économiques. Quel que soit le vainqueur de cette élection, nous allons nous retrouver ensemble pour travailler au rayonnement de la Chambre de commerce et au développement de notre pays.

Si vous êtes élu, que comptez-vous mener comme actions majeures au bénéfice des opérateurs économiques burkinabè ?

 

Comme je l’ai clairement indiqué dans mon programme, je commencerai par organiser les états généraux des affaires. Il y a beaucoup d’opérateurs économiques qui souffrent dans notre pays et ne s’en sortent pas en dépit des efforts qu’ils fournissent. Il faudra donc s’asseoir, discuter et trouver des solutions qui profitent équitablement à tout le monde. Pour la cohésion sociale, le dynamisme économique, la lutte contre le chômage et la pauvreté dans notre pays, il y a urgence à trouver des pistes nouvelles qui soient inclusives. On ne peut plus accepter de voir une minorité d’hommes d’affaires ou de commerçants   gagner très bien leur vie -ce qui est normal- pendant que la majorité tire le diable par la queue. L’accès au crédit pour les entreprises et les jeunes porteurs de projets de création d’entreprises, la fiscalité compétitive, la formation, l’information sur les évolutions qui s’opèrent dans le monde des affaires, etc., tous ces points et bien d’autres devront trouver rapidement des solutions. Pour les entreprises qui sont dans une situation difficile -et il y en a hélas, qui sont surendettées- il faut des solutions d’urgence pour les sauver et je compte m’y atteler si je suis élu. Je plaide pour la création d’une banque d’investissement comme il en existe dans d’autres pays de la sous-région ouest-africaine. Sa mission sera d’accompagner le développement des entreprises existantes, des femmes et des jeunes qui veulent prendre le risque de créer. C’est le secteur privé qui peut faire baisser le chômage dans notre pays et non les emplois publics.

 

Qu’est-ce que vous comptez faire si vous êtes élu pour rendre la CCI-BF plus performante ?

 

D’abord, rendre son fonctionnement démocratique et garantir la transparence afin de gagner la confiance de ceux qui la font vivre. Ensuite, je vais procéder à une relecture de l’organigramme afin d’assurer une certaine efficacité dans l’accomplissement de la mission confiée à la CCI-BF. Je compte également former les élus consulaires afin qu’ils s’approprient les textes qui régissent leur maison et cela se fera aussi bien en français que dans les langues nationales. Une CCI-BF plus performante passe aussi par la clarification du statut du personnel qui la gère, une déconcentration de services pour être plus proches des acteurs économiques. Je prends l’engagement de doter la CCI-BF d’un siège plus moderne avec des équipements modernes, offrant plus de confort et de sécurité aux usagers. Une nos tares en Afrique, c’est cette tendance à ne pas conserver nos archives. Je vais améliorer le système d’archivage qui existe déjà et mettre à la disposition du public, une documentation et une bibliothèque dans laquelle il pourra s’informer.


Qu’est-ce que vous auriez aimé dire que nous n’avons pas pu aborder ?

 

La campagne s’est déroulée dans le calme et je salue le sens civique de tous ceux qui y ont contribué d’une manière ou d’une autre. Un vent nouveau souffle sur la Chambre de commerce. J’invite les élus consulaires à s’inscrire dans cette dynamique autour de ma candidature. Je n’appartiens à aucun clan, ce qui me permettra d’agir dans l’intérêt général et non au profit de quelques-uns. Je brigue la présidence de la CCI-BF, non pas pour me relancer mais pour lui donner un nouveau dynamisme dans un contexte où la compétition est de plus en plus rude. Je gère une douzaine d’entreprises au Burkina, qui emploient près de 1 000 personnes, et Dieu merci, elles fonctionnent bien. Cette année, le chiffre d’affaires du groupe Planor a atteint 97 milliards de F CFA et j’ai payé 29 milliards de F CFA sous forme d’impôts, taxes, et salaires. Un homme d’affaires est d’abord un bon citoyen qui paie ses impôts. Je suis présent dans MTN Côte d’Ivoire et propriétaire d’une licence de téléphonie mobile au Mali dont les activités vont démarrer début 2017. C’est cet esprit de bonne gouvernance et de conquête que je veux mettre au service des jeunes, des femmes et de tous ceux qui croient à l’initiative privée.

 

Propos recueillis par Antoine

BATTIONO

 

Tout savoir sur Appolinaire Compaoré

 

Télécoms, assurances, hôtellerie, distribution, banque, transports, etc. Parti de rien, Apollinaire Compaoré est aujourd’hui un chef d’entreprise multicarte et une figure de proue dans le monde des affaires au Burkina. Cette année, il a versé à lui seul près de 29 milliards de F CFA sous forme d’impôts, taxes et salaires. Portait de celui qui pourrait devenir président de la Chambre de Commerce et d’Industrie du Burkina Faso.

 

30 septembre 2016. La salle de conférence de l’hôtel Bravia à Ouagadougou n’a pu recevoir tous ceux qui avaient fait le déplacement pour assister à la conférence publique sur le thème de l’entrepreneuriat féminin et des jeunes. Organisée par le Groupement International des Femmes Actives, pour le Développement Economique (GIFA LEPFIDA), une organisation féminine qui œuvre à l’émancipation de la femme par l’entrepreneuriat, la rencontre était animée par le premier ministre Paul Kaba Thièba et parrainée par Appolinaire Compaoré, PCA de Telecel  et PDG du Groupe Planor Afrique. Des délégations de femmes étaient venues de la Côte d’Ivoire, de la RDC, du Mali et de la France. Une occasion saisie par celui qui brigue maintenant la présidence de la Chambre de Commerce pour transmettre aux femmes et aux jeunes, les valeurs sur lesquelles il a bâti son parcours professionnel : persévérance, audace, respect du partenaire et rage de réussir.

27 mai 2016. Les couloirs d’ «Espace Cent quatre Paris sud les Esselières», à Villejuif, dans la banlieue parisienne, sont tapissés de posters de l’homme d’affaires Burkinabè Appolinaire Compaoré, venu parrainer, pour la deuxième fois consécutive, la cinquième édition de la Foire africaine de Paris, organisée par la Chambre de Commerce Africaine. A ce rendez-vous d’affaires, ont participé cinq exposants burkinabè, entièrement pris en charge par Apollinaire Compaoré. « Il avait voulu faire venir 15 personnes, mais seulement cinq ont obtenu le visa à l’ambassade de France », explique Siaka Koné, directeur commercial et marketing de Telecel. Quelques jours plus tard, on le retrouve à la deuxième édition de la nuit du Faso dan Fani (FDF) à Paris, destinée à la promotion du tissu typiquement burkinabè.

A ces occasions comme à tant d’autres, l’un des hommes les plus entreprenants du Burkina a brillé par sa simplicité et sa courtoisie. C’est sa marque de fabrique. La réussite dans les affaires ne lui est pas montée à la tête. D’un tempérament pondéré, il laisse les autres parler de lui, de ses mérites et vanter son sens des affaires. « Tout ce que j’ai pu faire, c’est grâce à Dieu et s’il veut que mes affaires se développent, personne n’y pourra rien. S’il ne veut pas aussi, c’est pareil », explique-t-il.

Début juin, un magazine panafricain a publié une information selon laquelle la Commission bancaire de l’Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA) avait rejeté la demande d’agrément qu’il a déposée en vue de la création de Wari Banque Internationale. Une information fermement démentie par l’intéressé : « C’est faux. La Commission bancaire a juste demandé qu’on change de nom parce que Wari est déjà utilisé par plusieurs entreprises et institutions bancaires et cela pourrait prêter à confusion. J’ai déposé un nouveau nom qui a été accepté ». La nouvelle banque, dont le siège est déjà localisé à Ouagadougou, devrait voir le jour en 2017, au grand bonheur des consommateurs, en particulier les commerçants, les femmes et les jeunes porteurs de projets de création d’entreprises.

Fervent croyant, Appolinaire Compaoré croit bénéficier de la grâce divine dans tout ce qu’il entreprend. Il faut dire que la réussite de cet homme de 63 ans, originaire de Koassa, petit village de la province du Bazéga situé à une cinquantaine de kilomètres de Ouagadougou, est tout sauf ordinaire, même si, des fortunés ayant le même profil que lui, on en trouve dans les pays africains. De parents paysans, comme l’est 80% de la population burkinabè, il est le quatrième d’une fratrie de cinq  enfants, formés dès le jeune âge aux durs travaux champêtres et à la garde du bétail familial. C’est, pour ainsi dire, son destin. Suivant la théorie de la reproduction sociale chère au défunt sociologue français Pierre Bourdieu, selon laquelle la position sociale de l’individu s’acquiert grâce au patrimoine transmis par les générations antérieures, Apollinaire Compaoré avait toutes les chances de mener une vie de paysan burkinabè. A moins de refuser un destin écrit à l’avance et d’être animé d’une farouche envie créatrice. Ce fut son cas. A 13 ans, ne sachant ni lire ni écrire, (son village manquant d’école), il décide d’aller à Ouagadougou, un saut dans l’inconnu. Dans cette ville où se côtoient des milliers d’anonymes, il survit en faisant de petits boulots, un travail précaire qui lui permet à peine de manger à sa faim. C’est la vraie galère, mais il tient bon. La dureté de la vie, il ne la découvre pas en ville. Le quotidien à Koassa lui avait déjà forgé un caractère, et il n’est pas venu en ville pour repartir au village bredouille. Il tient donc bon jusqu’à ce que la situation s’améliore au début de l’année 1970, quand il commence à vendre des billets de loterie, une activité qui lui servira de tremplin pour entrer plus tard  dans le commerce des deux roues. En 1978, il crée « Volta Moto», devenue « Burkina Moto » après le changement de nom du pays en août 1984, une société spécialisée dans la distribution et la commercialisation de vélos et motos, moyens de transport par excellence au Burkina. « C’est dans cette activité qu’il a commencé à faire fortune », confie un de ses collaborateurs. Les affaires marchent et le voici piqué par le virus de la création d’entreprises. Il fonde la Société Burkina Transport en 1986, dédiée à l’approvisionnent en carburant des dépôts de la Société Nationale Burkinabè d’Hydrocarbures (Sonabhy), puis s’intéresse aux assurances, (Union des Assurances du Burkina), la grande distribution, (Société de distribution de produits de grande consommation), le crédit à la consommation avec la Société Burkinabè d’Equipements (SBE), auprès de laquelle des milliers de fonctionnaires et de salariés s’endettent pour, soit acheter une moto, soit acquérir un terrain d’habitation.

Au tournant de l’an 2000, la téléphonie mobile n’est qu’à ses débuts dans de nombreux pays africains dont le Burkina. C’est une affaire hautement rentable, mais les coûts d’investissements sont énormes. Appolinaire Compaoré crée le Groupe Planor en 2002 et s’associe avec des partenaires (Atlantic Télécom) pour acquérir Telecel Faso. Mais le mariage tourne au vinaigre et de procès en procès, la justice finit par lui donner raison en 2008. Entre-temps, il a acquis 26% des parts dans MTN Côte d’Ivoire, le premier groupe africain de télécommunication dont le siège est en Afrique du Sud.

En 2011, le gouvernement malien lance un appel d’offre international pour l’attribution d’une licence de téléphonie globale. Le processus de cession qui a été long et mouvementé a débouché sur un accord définitif avec l’Etat malien avec sa société, créée pour exploiter la licence. Le  21 janvier 2013, le gouvernement a décidé en conseil des ministres d’attribuer la 3e licence de téléphonie globale (téléphone fixe, mobile, internet) à Alpha Télécommunication (ATEL-SA), dont il détient la totalité du capital, pour une durée de 15 ans.  Coût d’acquisition de la licence : 55 milliards de F CFA alors que le gouvernement  espérait engranger seulement 30 milliards. Les équipements sont en cours d’installation, et en dépit d’une vaste campagne médiatique de déstabilisation qui est menée contre lui, le compte à rebours est bel et bien lancé pour la mise en service du réseau d’ATEL-SA. « Je ne fais pas attention à ceux qui me dénigrent dans cette affaire. La meilleure réponse à leur apporter, c’est allo ! », Commente-t-il. Les activités d’ATEL-SA devraient également être lancées en 2017.

Membre de la Chambre consulaire depuis 1986, Appolinaire Compaoré croit que le moment est venu pour lui de briguer la présidence de la Chambre de commerce et d’industrie du Burkina (CCI-BF), après avoir retiré sa candidature en 2012 sous la pression. « J’ai de l’expérience dans le commerce et mon avenir est derrière moi. Dieu merci, je ne me plains pas, mais je ne veux pas que les jeunes connaissent les mêmes problèmes que j’ai rencontrés dans mon parcours. Il nous faut donc organiser les états généraux des affaires, car beaucoup de gens souffrent », ne cesse-t-il de marteler. S’il est élu à la présidence de la Chambre de commerce, il mettra en place  des dispositifs de financement au profit des jeunes, des formations qui correspondent aux besoins des entreprises et nouera des partenariats avec des écoles et universités étrangères pour former une nouvelle génération d’hommes d’affaires Burkinabè et Africains capables d’affronter la concurrence mondiale.

Il a ainsi accepté d’être le parrain de la promotion 2015-2016 des étudiants en Master2 Cadre supérieur d’administration des services publics et du secteur privé en Afrique délivré par la Faculté de droit et de Sciences politiques de l’université de Reims Champagne-Ardenne, en France.

«Il a les atouts pour briguer la présidence et il faut s’attendre aux coups tordus que ses éventuels adversaires ne manqueront pas de lui donner pendant la campagne », analyse un cadre de la CCI-BF. Ce self made man en a conscience, mais comme il le répète inlassablement, «c’est Dieu qui décide, mais j’ai confiance parce que je remplis les conditions. Contrairement à certains, j’ai des entreprises qui marchent et qui emploient près de 1000 salariés permanents», rappelle celui que ses collaborateurs appellent affectueusement « PCA ». 

 


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