ARRIVEE SOUDAINE ET MASSIVE DE MIGRANTS A CEUTA
Un afflux de migrants sans précédent, que d’aucuns ont vite qualifié « d’invasion » ! C’est la triste et pathétique scène qui se déroulait sur la plage bruyante et les eaux agitées de Tarajal dans l’enclave espagnole de Ceuta, ville autonome espagnole située sur la côte nord de l’Afrique ayant une frontière directe avec le Maroc. Le 18 mai dernier, en effet, cette petite bande de terre de quelque 18,5 km2 relevant du ressort territorial de l’Espagne, a été prise d’assaut par une horde de migrants clandestins (quelque 8 mille personnes) dont la moitié a été reconduite de force à la frontière marocaine. Parmi ces 8 mille desperados et autres crève-la-faim, figuraient quelque deux mille enfants non accompagnés qui, à ce qu’on dit, seraient toujours sur place. On comprend dès lors toute la peine du monde éprouvée par les forces de l’ordre espagnoles, à faire face à ce déferlement humain massif jamais vu auparavant. Débordées comme elles ne l’ont jamais autant été, ces forces de l’ordre ont dû faire appel à de nouveaux renforts. Cela dit, cette « invasion » intervient, comme on le sait, sur fond de crise diplomatique entre le Maroc et l’Espagne ; Rabat n’ayant guère apprécié l’accueil, par Madrid, du chef des indépendantistes saharaouis du Front Polisario, Brahim Ghali, pour raisons sanitaires liées au Covid-19. Connaissant l’extrême sensibilité de la question du Sahara occidental pour la diplomatie chérifienne, on peut aisément imaginer le mécontentement de Rabat suite à cet accueil. Quand bien même les autorités chérifiennes rassurent celles de Madrid que cet afflux de migrants n’est pas dû à leur désaccord et l’Espagne réfute l’idée d’une manipulation, peut-on croire que Rabat ait voulu faire payer insidieusement au pays des Iglesias, sa solidarité envers le chef saharaoui ? Une chose est, en tout cas, certaine : le pacte qui faisait de Rabat, un allié sûr de l’Espagne dans la lutte contre l’immigration clandestine, semble, à présent, rompu ou du moins, grandement fragilisé.
Partir loin de sa famille, tout laisser derrière soi, n’a jamais été une décision qu’on prend de gaîté de cœur
D’autant que Rabat reproche à son partenaire, de ne pas faire assez en termes de mobilisation de ressources en sa faveur, pour faire face au fléau migratoire. Madrid, pour sa part, face à cet afflux record, ne décolère pas. Ceci étant, la position du gouvernement espagnol sur le dossier du Sahara occidental, ne saurait être la seule explication à cette nouvelle vague déferlante. La décision, il y a une année et demie, de mettre fin à la contrebande juteuse qui faisait vivre toute la zone concernée (Maroc-Espagne), pourrait y être aussi pour quelque chose. Si tel est le cas, quelle alternative a-t-on proposé à ces populations (parfois de pauvres-hères) qui se sont retrouvées, du jour au lendemain, dépourvues de leur poule aux œufs d’or ? En mettant fin à la contrebande, il y avait urgence à trouver une solution de rechange. Ce qui ne semble pas avoir été le cas. En tout état de cause, qu’ils soient Marocains ou autres, tous ces aventuriers qui n’avaient plus rien à perdre en montant à l’assaut de Ceuta, partagent une commune et impitoyable réalité : celle de se sentir socialement exclus et oubliés. Fatigués de promesses toujours sans lendemains, de leurs dirigeants quant à un avenir meilleur, ils ont vu leur quotidien se dégrader davantage avec la crise sanitaire venue assombrir encore plus leur horizon et accentuer leur désir de partir coûte que coûte, advienne que pourra ! C’est dire si plutôt que de rejeter la faute à l’Europe, les dirigeants des pays d’où partent ces migrants, doivent se sentir surtout et avant tout interpellés. Car, il est clair et certain que tous ces candidats à l’aventure ne s’exposeraient pas à tous les risques inhérents à de tels départs, si leurs pays respectifs leur offraient toutes les garanties de réussite et d’épanouissement social à travers des ambitieux programmes de promotion de l’emploi les incitant à rester au bercail. Partir loin de sa famille, tout laisser derrière soi, n’a jamais été une décision qu’on prend de gaîté de cœur. Cela relève plutôt quasiment du mélodrame ! Une tragédie qui, hélas, ne semble pas vraiment troubler le sommeil de bien des dirigeants du continent en panne de remède face à la constante problématique d’une jeunesse désœuvrée et sans emploi ! Mais, encore faut-il que ce problème constitue une source de préoccupation permanente pour eux. De cela, on peut douter.
Par CBS