ATTAQUE DU SIEGE DU PNDS A NIAMEY : Qui en veut au pouvoir nigérien ?
A quelque deux mois des élections couplées présidentielle et législatives au Niger, l’atmosphère sociopolitique sent le souffre. Outre le Modem Lumana dont le leader est derrière les barreaux pour une sombre histoire de trafic de bébés, le Parti nigérien pour la démocratie et le socialisme (PNDS) au pouvoir à Niamey, a maille à partir avec un autre parti de l’opposition, la Convention démocratique et sociale (CDS) de l’ancien président Mahamane Ousmane. Ce dernier soupçonne le PNDS de chercher à l’écarter de la course au fauteuil présidentiel. En tout état de cause, c’est dans ce climat que des individus n’ont rien trouvé de mieux que d’ouvrir le feu sur le chantier de construction de son nouveau siège, à l’aide de fusils d’assaut, blessant au passage un policier. Un acte qui pourrait bien s’inscrire dans le cadre d’un théâtre d’ombres qui se joue actuellement sur les bords du Niger dans la perspective des toutes prochaines échéances. Au-delà de la curiosité de l’acte en lui-même, attaquer au fusil d’assaut un chantier de construction à une heure tardive de la nuit (1h du matin), l’on pourrait se poser la question suivante : qui en veut au pouvoir nigérien ? En dehors de toute revendication de l’acte, l’on ne peut que se perdre en conjectures, dans l’espoir que les fins limiers nigériens feront la lumière sur cette affaire. Et ce ne sont pas les questions qui manquent. Comment dissocier un tel acte de l’ambiance délétère que connaissent en ce moment le Niger et ses voisins en proie à la lutte contre la pieuvre islamiste ? Faut-il y voir un mauvais présage pour les élections à venir ? Faut-il au contraire interpréter cette attaque comme un acte isolé adressé au pouvoir de Niamey? Autant de questions qui peuvent appeler des réponses tout aussi variées.
Le président Mahamadou Issoufou doit se convaincre que les élections à venir ne seront pas une sinécure
Quand on prend l’affaire Hama Amadou, par exemple, derrière laquelle les partisans de l’ex-président de l’Assemblée nationale voient une cabale pour écarter leur champion de la course au fauteuil présidentiel, il est clair que cela peut créer des ressentiments chez beaucoup d’entre eux. Tout comme les déboires judiciaires de la CDS de Mahamane Ousmane, qui peuvent aussi être perçus comme une manœuvre pour écarter leur mentor de cette même compétition électorale et dégager un boulevard à Mahamadou Issoufou. De là à poser de tels actes, il y a un pas que certains ne franchiraient jamais, mais que d’autres ne rechigneraient pas à faire. Surtout si ces derniers pensent qu’en faisant planer le spectre du chaos, ils pourraient obtenir du parti au pouvoir une reconsidération de sa position pour des élections plus inclusives. Quoi qu’il en soit, à quelques encablures de ces consultations cruciales, il est inquiétant de voir des individus aussi puissamment armés, circuler allègrement et poser de tels actes en plein cœur de la capitale nigérienne, dans une atmosphère ambivalente de rivalité pré-électorale et de lutte contre le terrorisme à l’échelle internationale, notamment contre la redoutable secte islamiste Boko Haram dont le chef, Abubakar Shekau, ne désespère pas d’avoir le scalp du chef de l’Exécutif nigérien. Aussi le président Mahamadou Issoufou doit-il se convaincre que les élections à venir ne seront pas une sinécure. Car, ce sont autant d’incidents qui peuvent contribuer à la montée de la fièvre à la veille des consultations électorales et qui, si l’on n’y prend garde, peuvent contribuer à mettre à mal la quiétude du processus électoral. Au-delà, cela pose le problème de la circulation des armes dans la sous-région. Il est grand temps que les différents pouvoirs en place y trouvent une solution définitive. Tant que cette équation ne sera pas résolue, il serait illusoire de pouvoir lutter efficacement contre le grand banditisme à l’échelle nationale a fortiori contre le terrorisme qui s’annonce aujourd’hui comme le plus grand défi des nations modernes. Il y va de la sécurité de tous.
Outélé KEITA