HomeA la uneATTAQUE D’UN POSTE DE GENDARMERIE A OURSI : Le fantôme est-il déjà dans la maison ?

ATTAQUE D’UN POSTE DE GENDARMERIE A OURSI : Le fantôme est-il déjà dans la maison ?


 

L’attaque, dans la nuit du 23 août dernier, d’un poste de gendarmerie, qui a occasionné un mort et un blessé à Oursi, dans le sahel burkinabè, a de quoi inquiéter. Et pour cause. En ces moments où le péril djihadiste plane sur la sous-région comme une épée de Damoclès, comment ne pas voir dans ce genre d’opérations, les prémices d’une menace islamiste   ? En tout cas, par le mode opératoire et la cible, les Burkinabè ont de bonnes raisons de croire qu’ils sont dans le collimateur des djihadistes, car de toute évidence, le fantôme est  déjà entré dans la maison. Ce d’autant plus qu’il y a de cela un peu  plus de quatre mois, le 4 avril dernier, dans cette même zone du pays aux confins du Mali et du Niger, le Burkina connaissait son premier enlèvement d’un étranger, en l’occurrence un expatrié Roumain, sur son sol.

L’heure est aux questionnements

Et le silence des autorités, depuis cet enlèvement, n’est pas non plus pour rassurer les Burkinabè quant à la capacité de réaction des Forces de défense et de sécurité (FDS) face à un tel ennemi. En tout cas, le mutisme observé face à ce rapt, qui ne permet d’avoir aucune lisibilité sur l’état d’avancement des recherches, contribue à renforcer nombre de Burkinabè dans leur conviction que les autorités burkinabè, sur l’effet de surprise, ont accusé le coup de cette action sans véritablement avoir les moyens d’y apporter des solutions. Et si l’attaque contre les pandores de Oursi devait constituer un bis repetita après l’enlèvement de Tambao, il y aurait de quoi s’alarmer.

Pour l’instant, l’heure est aux questionnements. Faut-il privilégier la piste terroriste? Est-ce le fait de bandits de grands chemins ? Ou encore l’œuvre de politiciens à l’esprit machiavélique, qui voudraient semer la zizanie à l’approche de la fin de la Transition ? Aucune piste n’est à écarter.

Mais force est de reconnaître que pour agir comme les assaillants l’ont fait, il faut avoir du cran et de bonnes raisons pour s’attaquer à une base des forces de défense et de sécurité. En temps normal, les malfaiteurs cherchent à s’en éloigner le plus possible pour ne pas risquer de se faire prendre. Au Burkina, sauf erreur de notre part, ce genre d’agression est une première.

C’est pourquoi il ne faut pas négliger la piste islamiste, d’autant plus que selon certains témoignages, c’est ce que les assaillants eux-mêmes auraient laissé croire. En effet, dans le mode opératoire qui consiste à prendre carrément les FDS pour cible et à les attaquer frontalement, l’on peut facilement y voir la griffe des disciples d’Abubakar Shekau et autres lugubres djihadistes qui écument le Nord malien, et qui ont souvent fait preuve d’une telle témérité. En outre, la situation géographique de la localité la rend facilement accessible à ces illuminés. De fait, en raison de sa proximité avec les zones frontalières déjà infestées, le dispositif sécuritaire devrait présenter des failles aux frontières, si aucune mesure véritable n’a été prise. Sans compter les effectifs et la logistique qui ne sont pas toujours à la hauteur des défis qui attendent ces hommes.

Last but not least, avec la chute de Blaise Compaoré, les djihadistes ne devraient plus se sentir liés par un quelconque pacte tacite de non-agression qui les lierait au régime déchu. En raison de leurs accointances supposées ou réelles avec les dirigeants d’hier, ils pourraient bien ne pas s’embarrasser aujourd’hui de scrupules pour faire du Burkina une cible, dans leurs visées expansionnistes.

Les autorités de la Transition sont interpellées

Quoi qu’il en soit, il faut une bonne politique de prévention face à la menace des extrémistes musulmans. Ne dit-on pas du reste qu’« il vaut mieux pécher par excès de précautions que par excès de confiance » ?  En tout cas, l’expérience a montré que si on laisse le fantôme entrer   dans la maison, il est difficile après de l’en déloger. Les cas du Mali, du Nigeria, et du Cameroun l’attestent.

Aussi est-il impératif pour les autorités de prendre la mesure du péril et de poser des actes forts, comme le renforcement des mesures de sécurité et de contrôle, aussi bien à l’intérieur qu’aux frontières du pays. Mais pour que ces mesures soient efficaces, il faut aussi lutter parallèlement contre le racket dont se rendent coupables certaines forces de l’ordre, surtout aux frontières. Car, il ne coûte rien à un terroriste de payer une modique somme à la frontière et de passer sans être contrôlé. Or, selon toute vraisemblance, c’est à ce  jeu dangereux que s’adonnent certaines forces de l’ordre aux frontières, donnant le sentiment que leur souci premier, c’est de se remplir les poches et non de veiller à la sécurité des populations. Un tel esprit est mortifère dans ce climat de lutte contre le terrorisme. C’est pourquoi, pour la sécurité même des populations, le racket doit être combattu avec la dernière énergie, si l’on ne veut pas qu’il soit une des portes d’entrée des terroristes dans notre pays. Les autorités de la Transition sont donc interpellées. Elles doivent mettre un point d’honneur à relever ce défi, avec les forces de défense et de sécurité dans toutes leurs composantes. Autrement, si la menace terroriste devait se préciser, la fin tant attendue de la Transition comme espoir de renouer avec   l’activité économique rudement mise à mal, ne serait finalement que le début d’un autre cauchemar provoqué par les  fous d’Allah.

« Le Pays »


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