ATTENTAT TERRORISTE EN LIBYE : Au secours, l’EI arrive !
L’EI (Etat islamiste), sous l’effet des bombes américaines, est très mal en point en Syrie et en Irak. L’instinct de survie commande donc qu’il se trouve d’autres terrains pour se donner du répit. Et c’est sur la Libye, pour bien des raisons, qu’il a porté son choix. C’est pourquoi l’on ne doit pas s’étonner outre mesure, que cette organisation terroriste, la plus redoutable du moment puisqu’elle semble avoir damé le pion à Al Qaïda, se soit signalée officiellement à Tripoli, le samedi 27 décembre dernier, par un attentat à la voiture piégée devant un organisme chargé de la sécurité des missions diplomatiques. Le choix de la Libye est un symbole et la cible visée, un signal fort envoyé aux partenaires étrangers du pays, notamment à l’Occident dont l’engagement contre l’EI en Syrie et en Irak est à la hauteur de la capacité de nuisance de ce groupe terroriste.
L’idée d’une intervention armée en Libye est une bonne initiative
Avant l’attentat de Tripoli, l’on savait que des organisations terroristes africaines comme Boko Haram au Nigeria et les soldats du Califat en Algérie, qui avaient enlevé puis exécuté l’alpiniste français Hervé Gourdel, avaient fait allégeance à l’EI. Mais c’est la première fois qu’un acte terroriste a été revendiqué de façon immédiate et officielle par l’EI sur le sol africain. L’on peut donc considérer désormais la Libye comme la porte d’entrée de cette organisation djihadiste en Afrique. Et les risques sont grands de voir l’EI, à partir du capharnaüm libyen, étendre ses tentacules partout en Afrique. En effet, depuis la chute de Kadhafi, la Libye s’est engagée dans un processus de « Somalisation » et ce, peut-on dire, à la grande indifférence de tous ceux qui avaient pris la responsabilité de débarrasser le pays de la dictature de « l’enfant terrible de Syrte ». Pour n’avoir pas assuré le service après-vente, les Occidentaux ont ouvert dans le pays la boîte de pandore. Et des djihadistes de toutes obédiences en sont sortis pour se rendre maîtres des lieux, au point qu’aujourd’hui, dire que la Libye n’est pas gouvernée, relève de l’euphémisme. La réalité est que ce pays est en passe de réunir tous les attributs d’un véritable Etat digne de celui qui avait été théorisé dans le « Leviathan » par Thomas Hobbes. Comme le microbe se développe en terrain favorable, tous les pays de l’espace sahélo-saharien, peuvent se le tenir pour dit ; L’EI frappe à leurs portes. Cet espace est d’autant plus favorable à l’EI que les populations qui y vivent sont, dans leur majorité, en proie à l’ignorance et à la pauvreté. De ce fait, elles pourraient n’avoir rien à perdre, en offrant leurs services aux gourous de l’EI pour les aider à mettre toute la sous-région sous leur coupe. C’est pourquoi l’idée d’une intervention armée en Libye parrainée par l’ONU, développée actuellement par certains pays africains, est une bonne initiative qui doit être traduite en actes dans l’urgence.
l’EI a envoyé un signal qui ne souffre d’aucune ambiguïté
Certes, le projet des 5 pays de l’espace sahélo-saharien que sont le Tchad, la Mauritanie, le Niger, le Mali et le Burkina, de mutualiser leurs énergies pour aider à la normalisation de la situation sécuritaire en Libye, peut déjà être salué. Mais cela pourrait se révéler insuffisant pour soigner le mal libyen. Au groupe des 5 devraient s’ajouter d’autres pays africains comme l’Algérie qui, en matière de lutte contre le terrorisme, a une expertise certaine, si tant est que l’on ait le souci de bouter l’EI hors de la Libye et de mettre l’Afrique à l’abri de cette organisation terroriste. La visite que le président tchadien est en train d’effectuer en Algérie peut se lire comme une démarche tendant à impliquer le grand et puissant voisin de la Libye dans la tentative de riposte du groupe des 5 à la menace de l’EI. Une chose est sûre. Si rien n’est fait, l’EI, comme Ebola, infectera et affectera tous les pays africains en général et les pays du Sahel en particulier. Et la riposte, si elle veut être efficace, devrait se faire à l’échelle du monde. Mais encore faut-il qu’elle soit multidimensionnelle. En effet, celle-ci doit non seulement se décliner en termes militaires, mais aussi en termes de lutte contre l’ignorance et le sous-développement dans l’ensemble des pays africains sur lesquels planent les menaces de toute la galaxie djihadiste, et au sujet desquels l’on peut avoir envie de pousser dès à présent ce cri de détresse : au secours, l’EI arrive ! De toute façon, la communauté internationale n’a pas d’autres choix que d’y répondre favorablement. Car, l’EI, en s’attaquant à Tripoli à un organisme chargé de la protection des missions diplomates, lui a envoyé un signal qui ne souffre d’aucune ambiguïté. Et ce message doit être décrypté par l’Occident en particulier, en s’inspirant de l’enseignement de Bernard Poulet selon lequel : « Tous les mouvements fanatiques se dressent face à ce qui est pour eux la plus inquiétante des évolutions : l’essor de la démocratie. Car la démocratie, c’est non seulement la tolérance, mais, par essence, la fin des certitudes, des vérités révélées et éternelles. »
« Le Pays »