AUDIENCE DE CONFIRMATION DES CHARGES CONTRE BLE GOUDE PAR LA CPI :Le fils putatif comme le père spirituel
A la suite de son mentor Laurent Gbagbo, Charles Blé Goudé devra prochainement être situé sur son sort à la Cour Pénale internationale (CPI). L’audience qui a commencé, devra être l’occasion pour cette juridiction internationale de dire si le « Général de la rue » sera jugé ou non. Les juges devront trancher, au regard des éléments du dossier d’accusation présenté par le bureau du Procureur à la suite des enquêtes menées.
Il serait étonnant que Blé Goudé échappe aux juges
En théorie, rien n’est plié d’avance. En d’autres termes, la CPI peut confirmer les charges qui pèsent contre Blé Goudé en estimant qu’elles sont suffisantes pour justifier l’ouverture d’un procès, ou les infirmer, ce qui équivaudrait à un non-lieu.
Mais, il faut bien reconnaître que les possibilités d’aboutir à un non-lieu dans ce dossier sont minces, pour ne pas dire inexistantes. Il serait étonnant que Blé Goudé échappe aux juges, surtout après la confirmation du procès à venir de l’ex-chef de l’Etat, son mentor. On sait en effet que Laurent Gbagbo devra répondre des chefs d’accusation qui pèsent contre lui. Pourtant et toutes proportions gardées, on sait qu’il n’était pas en première ligne dans les violences, sa responsabilité étant beaucoup plus morale. Ce qui n’est pas le cas de Blé Goudé. En effet, le procureur devrait visiblement avoir plus de facilité à prouver la participation active de Blé Goudé dans les violences. On se souvient que ce tribun hors pair, doté d’une capacité exceptionnelle à haranguer les foules, a été en première ligne dans les évènements de la crise post-électorale et même bien avant. Les éléments de sa galaxie de patriotes, gonflés à bloc, ont été aux avant-postes des violences post-électorales.
L’ancien ministre de la Jeunesse de Gbagbo est connu comme l’un des leaders qui a le plus suscité la haine de l’étranger et ourdi des violences contre le camp adverse en Côte d’Ivoire. Déjà, au campus, son passage à la tête du mouvement estudiantin a fait tache d’huile. Depuis l’éclatement de la rébellion en 2002, il aura été l’un des acteurs majeurs de la crise en Eburnie. Agent de propagande, capable de mobiliser des foules immenses, il aura entre autres, été d’un grand soutien à Laurent Gbagbo alors en grande difficulté face à la rébellion. Il aura également réussi à faire libérer des prisonniers de la Maison d’Arrêt et de Correction d’Abidjan (MACA). Aussi, Blé Goudé, comme on le sait, avait eu l’audace de s’en prendre à la France et à l’Organisation des Nations unies. C’est dire qu’avant même que la CPI ne s’intéresse à son cas, il était déjà dans le collimateur de la communauté internationale qui l’accuse d’avoir attisé la haine et orchestré les violences. On imagine sans peine que la France, pour ne parler que de son cas, ne ménagera aucun effort pour lui faire rendre gorge. En tout cas, tout porte à croire qu’il y aura bel et bien un procès contre Blé Goudé à la CPI. Tout comme il y aura un procès contre Gbagbo. Ainsi, on peut dire que le fils putatif suit les traces de son père spirituel.
Blé Goudé aura offert ses services pour les basses besognes du pouvoir
En tout état de cause, Blé Goudé qui avait déclaré ne pas avoir peur de répondre devant la CPI, a maintenant une occasion en or pour s’exprimer. Il peut déjà se réjouir d’être dans une cellule dorée, quand on compare les conditions de détention à la CPI à celles des prisons de son pays en particulier et sous nos cieux en général. Il a peut-être beaucoup à dire pour sa défense et contre les ténors du camp adverse. S’il n’a pas perdu de son punch, on devra s’attendre à des révélations fracassantes devant la Cour. Mais le tout n’est pas d’avoir des choses à dire. Au-delà de la fanfaronnade, il faudra avoir des arguments qui tiennent la route. Ce qui sera dit devra être assorti de preuves solides ou d’indices. Certes, ce procès, comme celui de Gbagbo, pourrait révéler des éléments contre le nouveau régime en Côte d’Ivoire, de nature à le gêner aux entournures. Mais qu’importe. Il est essentiel que la lumière et toute la lumière soit faite sur ces violences. Si des éléments de preuves peuvent être apportés lors de ces procès et éclairer la lanterne du procureur dans ses investigations actuelles ou à venir sur la crise ivoirienne, dans un sens ou dans un autre, c’est tant mieux. L’essentiel est que justice soit rendue, dans les règles de l’art. Cela étant un passage nécessaire pour le renouveau du pays qui a plus que besoin de catharsis.
En ce qui le concerne, Blé Goudé ne devra s’en prendre qu’à lui-même. Ce qui lui arrive est la rançon sa bêtise et de sa bestialité. Alors que sa grande capacité à manier le verbe le prédisposait à un bel avenir politique, il s’est embourbé dans un soutien aveugle à une cause malsaine. Il est malheureusement à l’image de bien des jeunes hommes sur le continent africain, qui se laissent instrumentaliser par des hommes politiques aux desseins et aux méthodes pas du tout catholiques. Il aura succombé aux sirènes de l’argent et des privilèges du pouvoir Gbagbo. Il aura offert ses services pour les basses besognes du pouvoir. Il aura été mal inspiré, lui comme tous ces autres fils du continent qui vendent leur âme au diable, croyant que c’est la seule voie possible pour sortir de la misère et de la pauvreté ambiante.
En adoptant cette posture qui consiste à défendre contre vents et marées et de façon déraisonnable un individu ou un clan au pouvoir, ces personnes acquièrent d’énormes richesses en un temps record. Mais, elles sont toujours rattrapées tôt ou tard par leurs actes, comme si le sort tenait à confirmer que « biens mal acquis ne profitent guère». Ces Blé Goudé en herbe qu’on voit dans bien des pays africains, s’agitant aujourd’hui autour de timoniers en devenir et pour des causes abjectes, seraient bien inspirés de se raviser. La violence de leurs propos et la dangerosité de leurs faits et gestes les prédisposent à devoir répondre un jour, comme Blé Goudé, devant les juridictions internationales. Ils auraient tort de continuer à penser que ça n’arrive qu’aux autres.
« Le Pays»