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 BOUTEF VERS UN CINQUIEME MANDAT


Le Papy et la boulimie du pouvoir

A un an de la présidentielle, ça bouge déjà dans le landerneau politique en Algérie. Pas qu’un de ces hommes politiques du sérail ou de l’opposition soit sorti du bois pour se porter officiellement candidat à la succession du président Bouteflika, cloué par l’âge et la maladie dans un fauteuil roulant, mais bien parce qu’il y a comme une frénésie qui s’est emparée depuis quelques jours, de ses proches quant à une éventuelle candidature du « Papy» à sa propre succession. Et les appels du pied de certains proches collaborateurs et pas des moindres de l’homme fort d’Alger, sont autant de signes qui ne trompent pas sur la probabilité que ce dernier briguera un…cinquième mandat. En effet, pas plus tard que le week-end dernier, le Premier ministre, Ahmed Ouyahia, déclarait à la presse : « Je serai content si le président se représente en 2019 ».

Même diminué physiquement par l’âge et affaibli par la maladie,   Bouteflika reste le maître du jeu en Algérie

Quelques semaines plus tôt, ce sont les comités de soutiens au maître d’Alger, qui dépoussiéraient  leurs tambours pour les faire retentir au son de la demande d’un cinquième mandat pour le chef de l’Etat.  Preuve, si besoin en était encore, que même diminué physiquement par l’âge et affaibli par la maladie, Abdel Aziz Bouteflika reste le maître du jeu en Algérie. Et tout porte à croire qu’ils ne sont pas nombreux, les candidats à croire en leurs chances dans une opposition à lui, dans les urnes. Surtout pas dans son propre camp où la question de sa succession semble quelque peu taboue. Autrement, comment comprendre qu’à 81 ans, on lui demande de rester encore et encore au pouvoir, alors même qu’il peine véritablement à tenir debout ? C’est à se demander si ceux qui rêvent de voir  Bouteflika continuer à diriger le pays dans les circonstances actuelles, l’aiment vraiment. Car, on aurait compris qu’eu égard à sa santé fragile et chancelante, on lui demandât poliment de faire valoir ses droits à la retraite pour un repos mérité, afin qu’il pense enfin à bien se soigner. Mais là, on lui demande de continuer le combat en fauteuil roulant. A moins que ce ne soit le chef de l’Etat qui ait parlé par la bouche de son Premier ministre, comme l’on a coutume de le voir sous nos tropiques. En tout cas, même si l’intéressé lui-même n’a pipé mot sur la question, l’on est suffisamment coutumier du fait dans les pays du Gondwana, pour ne pas succomber à la tentation de croire que les paroles du Premier ministre trahissent la pensée du président de la République. C’est pourquoi  l’on est porté à croire qu’il ne déplairait pas à « Papy » Boutef himself, de continuer à diriger l’Algérie. De là à penser que c’est lui-même qui ne veut pas lâcher « la chose », il y a un pas que certains ont vite franchi. Autrement, il aurait pu briser le silence et fixer ses compatriotes sur la question, au lieu de laisser libre cours aux conjectures et autres supputations, comme aiment à le faire les satrapes du continent qui ne rêvent que de pouvoir à vie, en attendant le moment opportun pour tomber le masque. Bouteflika est-il dans la même logique ? L’on attend de voir.

Loin de nous l’idée de jeter l’anathème sur le président algérien. Au contraire, pour le rôle qui fut le sien au sein du FLN (Front de libération nationale), l’on peut se laisser convaincre que ses partisans ne veulent certainement pas bousculer le symbole vivant qu’il est, de la lutte de libération nationale, en le poussant sans ménagement vers la sortie.

Dans le contexte mondial actuel où la tendance est à la promotion de l’alternance, cela fait mauvais genre

Surtout la vieille génération qui a un attachement affectif au FLN dont Bouteflika peut paraître aujourd’hui, à bien des égards, l’incarnation. Du reste, le voudraient-ils qu’ils ne le pourraient pas assez facilement ! Mais dans le contexte mondial actuel où la tendance est à la promotion de l’alternance, cela fait mauvais genre. Car, c’est un encouragement à la dictature. Or, comme on le dit, nul n’est indispensable, tant les cimetières sont pleins d’hommes qui se présentaient comme tels. En tout cas, si l’on peut reprocher à un Joseph Kabila, un Paul Biya, un Denis Sassou Nguesso ou un Faure Gnassingbé de fausser le jeu démocratique par leur longévité au pouvoir, pourquoi en serait-il autrement pour Abdel Aziz Bouteflika ? A moins que son maintien à la tête de l’Etat, malgré la maladie et la vieillesse, ne réponde à d’autres impératifs. Comme, par exemple, la cohésion au sein du parti au pouvoir qui risque de prendre un sérieux coup, faute d’un dauphin qui fait consensus. D’aucuns vont même jusqu’à avancer qu’aujourd’hui, le pays est gouverné par un cercle de proches à qui profiterait le maintien du valétudinaire président au pouvoir.

Quoi qu’il en soit, si l’avenir du pays doit continuer à s’écrire avec  l’octogénaire président, c’est qu’il y a problème. Et quand on sait que l’homme est craint au-delà des cercles même du pouvoir, l’on comprend que les adversaires ne se bousculent pas au portillon pour le défier, même dans les urnes. Et dans le cas d’espèce, il ne faudrait pas compter sur l’Occident, en particulier la France pour les questions mémorielles que l’on sait. Car l’Algérie, ce n’est pas n’importe quel pays. En tout état de cause, si la question du cinquième mandat se confirmait, ce serait le mandat de trop pour Boutef.

« Le Pays »


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