HomeA la uneCOMPARUTION DE KARIM WADE :Un procès à valeur pédagogique pour l’Afrique

COMPARUTION DE KARIM WADE :Un procès à valeur pédagogique pour l’Afrique


Le procès de Karim Wade a débuté le jeudi 31 juillet 2014. Le moins que l’on puisse dire est que tout le Sénégal, voire toute l’Afrique, le suit avec intérêt de bout en bout, au regard non seulement de l’importance du montant de la somme censée avoir été détournée, mais aussi de la filiation du principal mis en cause.

 

La problématique de la gestion des ressources publiques demeure d’actualité en Afrique

 

Par rapport au montant, l’Afrique des gueux et des sans-culottes pourrait tomber des nues et s’indigner si d’aventure les charges retenues par la Justice sénégalaise contre l’ancien ministre «du ciel et de la terre » étaient réelles. En effet, Karim Wade doit justifier devant la Justice sénégalaise, une fortune estimée à 178 millions d’euros. Le montant donne simplement le tournis, surtout dans le contexte du Sénégal et de l’Afrique où la chose la mieux partagée est la pauvreté. De ce point de vue et dans l’hypothèse où Karim Wade serait responsable de ce crime économique, tous les Africains pourraient avoir un sentiment de honte et de révolte de constater que les maigres ressources financières sous nos tropiques finissent quelquefois dans les poches des princes qui nous gouvernent. Cela est d’autant plus révoltant que les ressources financières proviennent en partie des sacrifices de contribuables qui ont du mal à s’assurer un repas par jour. Ces derniers, de manière légitime, pourraient s’interroger et éprouver des sentiments de révolte à propos de la légèreté avec laquelle, sous nos cieux, les deniers publics sont gérés. Même dans l’hypothèse où Karim Wade sortirait de ce procès complètement blanchi, ce qui ne serait pas une mince affaire, la problématique de la gestion vicieuse des ressources publiques par certaines personnalités politiques et autres fonctionnaires véreux, demeure d’actualité dans bien des pays africains. Ce procès sera donc, de manière indirecte, leur procès.

L’autre centre d’intérêt du procès est lié à la filiation du principal mis en cause. En effet, il est difficile de ne pas voir derrière le fils, le père.

 

Macky Sall a une patate chaude entre les mains

 

C’est ce dernier qui, aux temps forts de sa mégalomanie et de sa vision patrimoniale du pouvoir, a exposé Karim Wade à la tentation, en taillant à sa mesure un méga-ministère qui brassait d’énormes quantités de sous. Ceux qui dénoncent déjà le procès en présentant Karim Wade comme « un détenu politique », vont peut-être vite en besogne, car ils pourraient être démentis et confondus par des révélations qui leur permettraient de découvrir le visage caché et hideux de la gouvernance des Wade. C’est pourquoi la Justice sénégalaise doit saisir l’opportunité de ce procès pour démontrer à la face des Sénégalais et de l’Afrique qu’elle n’est pas une Justice aux ordres. Elle doit par ailleurs se convaincre que ce procès a une valeur pédagogique non seulement pour le Sénégal, mais aussi pour toute l’Afrique. En effet, quelle que soit l’issue du procès de Karim Wade, de grandes leçons pourront en être tirées.

La première leçon est liée à la nécessité pour nos gouvernants de rendre compte aux populations de leur gestion des deniers publics. Dans cette perspective, des audits crédibles pourraient être régulièrement et systématiquement menés pour permettre aux citoyens d’avoir une meilleure lisibilité et une plus grande traçabilité des ressources publiques. La deuxième leçon est relative à l’implication de la fratrie des princes qui nous gouvernent dans la gestion du pouvoir. Le cas de Karim Wade n’est pas unique en Afrique. En réalité, c’est une pratique qui a tendance à se généraliser. Les exemples en effet, sont multiples, qui illustrent le phénomène. Des hommes politiques comme Julius Nyéréré, Léopold Sédar Senghor et Houphouët Boigny s’étaient démarqués de cette pratique en tenant à l’écart du pouvoir leur fratrie et leur progéniture. C’était le bon exemple qui, malheureusement, n’a pas fait école, au regard de ce que l’on constate aujourd’hui sous nos tropiques.

Cela dit, il est important de noter que Macky Sall a une patate chaude entre les mains. Si d’aventure il donne l’impression que derrière ce procès se cache son intention de régler ses comptes avec Abdoulaye Wade via son fils, il court le risque d’en faire un héros aux yeux des Sénégalais.

 

Pousdem PICKOU


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