HomeA la uneCONTESTATION DE LA VICTOIRE DE SASSOU : Jusqu’où ira le général Mokoko?

CONTESTATION DE LA VICTOIRE DE SASSOU : Jusqu’où ira le général Mokoko?


 

Comme il fallait s’y attendre, le général Jean-Marie Michel Mokoko, classé troisième avec 7,5% des voix, conteste la victoire de Denis Sassou Nguesso à la présidentielle.  Il exige la mise en place d’une commission paritaire de recomptage des voix. Sera-t-il entendu? Rien n’est moins sûr.  Mais dores et déjà, l’on peut dire que la réaction du général est compréhensible. En effet, la Commission électorale technique mise parallèlement en place par l’opposition congolaise, le classe en tête, suivi de Guy-Brice Parfait Kolélas.   Mais l’on se demande jusqu’où ira le général dans sa volonté de contester les résultats livrés mardi dernier par la CNEI.  Sa réaction risque fort d’être comme de l’eau sur les plumes d’un canard.  Il est fort à parier que Sassou qui vient de réaliser le coup K.-O. qu’il avait promis, ne pliera jamais l’échine face au général.  Ceux qui pensaient que l’homme  fort de Brazzaville raterait son pénalty, doivent donc cesser de rêver. En effet, il est de notoriété publique qu’on ne peut battre un dictateur dans les urnes. Plus d’une personne savait que les conditions d’un scrutin transparent et équitable étaient loin d’être réunies au Congo Brazzaville. Si au Bénin, les choses sont allées très vite et bien, c’est que les conditions d’une élection transparente étaient réunies pour éviter toute contestation. Ce qui a permis aux différents candidats d’avoir une idée assez précise de leurs scores, au fur et à mesure de la compilation des résultats. C’est la raison pour laquelle avant même que la Commission électorale n’ait annoncé le moindre chiffre, le candidat du parti au pouvoir, Lionel Zinsou, a pu prendre les devants, presqu’à la surprise générale, pour appeler son rival Patrice Talon et le féliciter pour sa nette victoire. Cela dénote non seulement de la transparence de ce scrutin, mais aussi de la confiance que les candidats avaient dans l’institution chargée de l’organisation de ces élections. Tout le contraire du « Sassouland » où aucune communication téléphonique ni internet ne fonctionnait, par la seule volonté du prince régnant qui en a décidé ainsi pour couper l’herbe sous les pieds de ses adversaires qui se préparaient, par leurs propres moyens, à avoir un œil sur la compilation des résultats.

A présent, c’est la Françafrique qui peut se frotter les mains

Mais comment pouvait-il en être autrement quand on voit comment le septuagénaire de président congolais a tordu le cou à la loi fondamentale de son pays pour se remettre dans la course à un pouvoir qu’il savore depuis plus de trois décennies ? En réalité, l’homme qui a battu campagne entouré de  chars de combat, n’avait qu’une seule idée en tête : se succéder à lui-même, par tous les moyens, y compris, fait inédit, par le rejet des moyens modernes de communication qui ont pourtant fait la preuve de leur contribution à la transparence lors de scrutins sous d’autres cieux. Il est donc clair que la victoire de Sassou ne faisait pas l’ombre d’un doute. C’était  juste une question de score. C’est pourquoi  l’on ne peut s’empêcher de penser que tout le silence qui  a entouré le déroulement du scrutin ne visait qu’à fabriquer des résultats à la hauteur du grand timonier de Brazzaville.  Ceux qui rêvaient d’un éventuel deuxième tour au Congo, peuvent préparer leurs mouchoirs pour pleurer et faire le deuil de l’alternance car, au grand jamais, Sassou n’acceptera l’insulte d’un quelconque ballotage à un scrutin d’une telle envergure encore moins une défaite. Depuis le début, il était dans une logique de confiscation du pouvoir qui lui commandait de mettre toutes les chances de son côté pour s’assurer une victoire sans bavure au premier tour. En tout cas, l’alternance au Congo semble aujourd’hui tenir plus de la nature que des urnes. D’autant plus que l’insistance de Sassou Nguesso est à la hauteur de l’étendue des casseroles qu’il traîne et des cadavres qui remplissent ses placards.  Il est donc clair que ce ne sont pas les raisons d’avoir peur de l’après-pouvoir qui manquent : des disparus du Beach à la question « des biens mal acquis » en passant par les explosions de M’pila, il y a suffisamment de quoi justifier le forcing et la fébrilité que cachent mal les récentes décisions  du maître de Brazzaville.

En vérité, ce scrutin était   sans véritable enjeu ; le vainqueur étant connu d’avance. Car, après le pénalty qu’il s’est octroyé avant même le coup d’envoi, tout était indiqué que Denis Sassou Nguesso a posé le ballon sur la ligne de but pour tirer dans un goal sans gardien de but, afin d’être sûr de son coup.  Et l’arbitre de la rencontre qu’est la CNEI, n’avait pas d’autre choix que de valider le but  de la victoire de Sassou par ce coup K.-O. L’opposition qui envisageait de s’ériger en arbitre de touche pour signaler un hors-jeu, est désormais définitivement mise sur la touche et elle n’aura que ses yeux pour pleurer. A présent, c’est la Françafrique qui peut se frotter les mains, surtout après le cas béninois qui est perçu par beaucoup comme un retentissant camouflet pour l’Hexagone, avec la déconfiture de celui qui était perçu comme son candidat ou prétendu tel, à l’issue d’un scrutin qui s’est tenu le même jour. Est-ce un signe des temps ? L’histoire le dira. Mais en attendant, Sassou est  réelu dans les conditions que l’on sait et on a envie de se demander,  de quelle légitimité peut-il se prévaloir ? Question à mille inconnues. Mais de légitimité, en a-t-il seulement besoin ? Rien n’est moins sûr.

Outélé KEITA


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