COUP D’ETAT DEJOUE AU NIGER : La vérité est-elle en train de rattraper le mensonge ?
Quelle ne fut la surprise des Nigériens quand le président Mahamadou Issoufou annonçait, le 17 décembre 2015, la mise en échec d’une tentative de coup d’Etat au Niger. En effet, à quelques mois du scrutin présidentiel, on se demandait quelle mouche aurait bien pu piquer des officiers de l’armée nigérienne, pour oser pareil coup. Evidemment, pour le pouvoir nigérien, il n’y a pas de fumée sans feu. En tout cas, selon le ministère de la Défense de ce pays, plusieurs des suspects seraient passés aux aveux et auraient même sollicité la clémence du président de la République. A l’étape actuelle de la procédure judiciaire, les autorités nigériennes indiquent avoir pu établir la responsabilité de 13 personnes dans la préparation du coup et qu’elles doivent répondre de leurs actes devant un tribunal militaire. Questions : ces inculpations pourraient-elles convaincre les plus sceptiques que Mahamadou Issoufou qui, déjà en 2011, indiquait avoir déjoué un coup d’Etat contre son régime, ne fait pas dans la paranoïa ? Autrement dit, peut-on dire que la vérité est en train de rattraper le mensonge ? Les aveux dans ce genre de circonstances pouvant être « dictés » par celui qui pointe le fusil sur la trempe, la prudence devrait, a priori, être de mise. Mais, sur la base des éléments fournis par les autorités nigériennes dans ce dossier et en attendant que le tribunal militaire puisse définitivement situer les responsabilités, on a envie de dire que ce coup d’Etat n’était pas une œuvre machiavélique sortie tout droit du cerveau d’un président qui voudrait s’attirer la sympathie de son peuple en vue de la prochaine élection présidentielle.
Ce coup d’Etat reste un avertissement pour les autorités nigériennes
Vu la sérénité avec laquelle le pouvoir traite ce dossier, on peut croire que le pouvoir nigérien en sait bien plus… Si ce projet de coup d’Etat est définitivement prouvé, il faut vraiment s’en lamenter. Car, ç’aurait été un pronunciamiento insensé, qui aurait une fois de plus pu interrompre le processus démocratique d’assez bonne tenue au Niger. Cela aurait marqué le triomphe de ceux qui auraient empêché les fleurs de la démocratie au Niger de porter encore plus fruits. Et il n’y a pas que cela. On le sait bien, ce pays est sous la menace des djihadistes du Nord-Mali et les islamistes de Boko Haram. L’interruption violente de la marche des institutions au Niger, aurait été un facteur qui encouragerait les fous d’Allah à envahir à grande échelle le pays. En tout cas, sans risque de se tromper, le régime de Issoufou l’a échappé bel ; les Nigériens aussi. Cela dit, ce coup d’Etat reste un avertissement pour les autorités et l’ensemble des forces vives nigériennes. Faut-il le rappeler, le contexte sociopolitique nigérien, ajouté à l’affaire Hama Amadou, pourrait être exploité à des fins politiciennes par des soldats politiquement très ambitieux. Plus que jamais, Mahamadou Issoufou doit savoir qu’il a un problème avec l’armée nigérienne et qu’une solution doit être trouvée le plus vite possible. Une armée politisée n’est jamais républicaine ; elle est plutôt prompte à reprendre à son compte les bagarres de ses parrains politiques dont l’égoïsme fait le lit des crises en Afrique.
Michel NANA