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COVID-19 ET FOOT AU BURKINA


Le quotidien des pays du monde se conjugue désormais au Covid-19. Une pandémie qui a pratiquement tout mis à l’arrêt et le football n’est pas épargné. Le Burkina Faso n’étant pas en reste, c’est l’interrogation totale au niveau des clubs de première division sur l’issue de cette saison 2019-2020 alors que 24 journées sur 30 ont déjà été jouées. L’enjeu sur le vide qui existe présentement pour les dirigeants de clubs, c’est surtout l’aspect financier. Nous avons voulu savoir comment les clubs vivent cette situation.

Matchs annulés, à huis clos ou encore suspension de championnats. Même si tout peut évoluer à tout moment, c’est le football qui est à l’arrêt dans le monde face à la crise du Covid-19 dont la propagation n’épargne aucun pays. Ainsi, on constate le report de grands évènements sportifs dont les Jeux Olympiques Tokyo 2020, l’Euro 2020 ou encore les troisième et quatrième journées des éliminatoires de la CAN 2021 et la 6e édition du Championnat d’Afrique des nations (CHAN) qui, en principe, devrait être en train de se jouer au Cameroun (NDLR : une compétition qui était prévue du 4 au 25 avril 2020) et à laquelle, le Burkina Faso est qualifié. Et pour raison de CHAN, le championnat national de football était suspendu à l’issue des matchs de la 24e journée joués les 6, 7, 8 et 9 mars 2020 afin de permettre aux Etalons de se préparer et participer à ce tournoi. C’était sans compter avec le coronavirus qui, depuis décembre 2019 en Chine, avait commencé à bien tisser sa toile sur le continent asiatique puis l’Europe avant de se propager un peu partout sur les différents continents. Le football burkinabè, qui était suspendu pour raison de CHAN, se trouve encore dans le temps puisque c’est un tournoi dont la fin est prévue pour le 25 avril prochain. Face à cette situation inédite dans l’histoire du football et dans l’attente de jours meilleurs, il faut bien gérer ce qui n’était nullement envisageable il y a à peine quelques mois. Le plus difficile pour les clubs de première division est la gestion de leurs joueurs, particulièrement sur l’aspect financier.

Les salaires constituent l’équation à résoudre

Le constat est réel avec des terrains d’entraînement déserts en dehors de quelques rares sportifs qui s’adonnent au sport de maintien puisqu’ils n’ont plus droit à des regroupements pour des séances d’entraînement. Et Kassoum Ouédraogo dit Zico, président de KOZAF, de confier : « un monde sans sport est aussi difficile à vivre ». Tout en reconnaissant que la réalité est là, implacable, préoccupante. On s’interroge. Pour Boureima Maïga, directeur sportif de SALITAS FC, « nous ne savons pas quoi faire présentement. Libérer les joueurs ou attendre en espérant qu’on va rejouer ». C’est l’incertitude puisque la situation ne s’améliore pas au Burkina Faso, relève celui-ci. Il espère tout de même que la tendance va s’inverser avec les efforts des autorités. Mais déjà, faire face aux salaires reste l’équation à résoudre pour les dirigeants de clubs. En attendant, presque tous ont honoré leurs engagements du mois de mars. Ce que confirme Moussa Dahani, président du comité exécutif de l’AS SONABEL, en faisant savoir que les salaires des joueurs et de l’encadrement technique du mois de mars ont été payés depuis le 28 mars. Avant de souligner que, « nous avons attiré l’attention des joueurs qu’ils doivent bien gérer leurs salaires parce que si la situation ne s’améliore pas d’ici fin avril, ils vont percevoir des demi-salaires ». Que ce soit à KOZAF, SALITAS FC, Majestic SC ou l’AS Douanes, les salaires de mars sont également payés. Par contre, au RCK et selon les contrats, les salaires sont payés autour du 10 du mois suivant, a expliqué le président Ibrahim Yanogo. C’est ainsi que les salaires de février ont été payés autour des 10 et 11 mars. Pour ce qui est de mars, il reste encore quelques jours (entre des 10 et le 11 avril) pour régler les salaires mais à ce niveau, Ibrahim Yanogo indique qu’il est prévu un dialogue entre l’exécutif du club, les joueurs et encadreurs pour voir ce qui est faisable. Dans tous les cas, souligne le président du RCK, un effort va être fait pour soulager les uns et les autres tout en relevant que les joueurs ont aussi des charges familiales.

« Ça devient compliqué de payer des joueurs qui ne s’entraînent pas »

Maintenant, sur toutes les lèvres, il s’agit de voir comment gérer les salaires du mois d’avril et on entend pratiquement le même son de cloche. Si à l’AS SONABEL, on n’est pas loin d’aller vers des demi-salaires, ce n’est pas évident pour d’autres où l’argument de payer des gens qui ne travaillent pas, fait surface. Pour Ali Guissou, président de l’AS Douanes, « nous ne pourrons pas supporter les salaires et à ce sujet, nous allons discuter avec les joueurs et voir ce qui est faisable ». Son homologue de KOZAF, Kassoum Ouédraogo, fait savoir que, « nous gérons nos clubs comme des entreprises et si nous devons payer des joueurs qui ne s’entraînent pas, ça devient compliqué ». Boureima Maïga de SALITAS FC abonde dans le même sens tout comme le président du comité exécutif de Majestic SC, Adama Ouédraogo qui fait savoir que si les salaires de mars sont payés, ils ont entamé des discussions avec les joueurs et encadreurs afin d’aboutir à une entente pour la suite. De façon générale, les présidents de clubs interpellent la faîtière qu’est la Fédération burkinabè de football (FBF) à vite trouver une solution. Tous sont unanimes que la FBF a son mot à dire. Pour aller un peu plus loin, Kassoum Ouédraogo et Boureima Maïga évoquent l’intervention de la maison d’assurances avec laquelle la fédération aurait signé un contrat. Que dit le contenu de ce contrat et est-ce que les salaires en font partie, s’interroge le directeur sportif de SALITAS FC qui dit que les joueurs sont des travailleurs et les clubs doivent leur payer dix mois de salaires, selon le règlement. Mais en plus, on se pose aussi la question sur l’issue de cette saison 2019-2020 qui doit prendre fin, en principe, au mois de mai. Faut-il l’annuler et s’en tenir aux résultats actuels ou la poursuivre lorsque la situation va s’améliorer ?

« On regrette que le chef de l’Etat n’ait pas fait un clin d’œil au sport »

L’idéal serait de terminer la saison, confient les présidents avec lesquels nous avons échangé. « Il reste 6 journées et 18 points à prendre. Tout est donc jouable pour nous concernant le maintien », relève le président du RCK, Ibrahim Yanogo. Boureima Maïga fait, quant à lui, des propositions. Dans un premier temps, dit-il, qu’on garde les résultats actuels et que les deux premiers au classement général représentent le Burkina Faso en campagne africaine. Ajoutant que les deux clubs de la deuxième division, qui ont obtenu le sésame de la montée, viennent grossir les clubs de la première division à 18 pour la saison prochaine qui serait une transition, le temps de trouver une solution pour la suite. Au cas où le championnat national devait être arrêté, une autre question s’invite ; à savoir, selon Boureima Maïga, qui va rembourser toutes les dépenses faites par les clubs jusque-là, ce que l’Etat et les sponsors ont donné. Avant de souligner que si cela doit être considéré comme perdu, ce serait une autre catastrophe et qu’il ne serait pas question de faire marche-arrière après avoir joué 80% du championnat national. Une fois de plus, Moussa Dahani, Ibrahim Yanogo, Ali Guissou, Kassoum Ouédraogo, Boureima Maïga disent que leurs regards sont tournés vers la FBF pour qu’ensemble, ils puissent échanger afin de prendre les devants sur l’incertitude qui plane sur cette saison. Ce qui semble intéressant, nous confie Moussa Dahani, c’est que cette crise sanitaire vient rappeler aux uns et aux autres la nécessité de changer de comportement et de mieux s’organiser pour faire face, à l’avenir, à de telles situations. Kassoum Ouédraogo dit Zico regrette tout simplement que le chef de l’Etat, lors de son message à la Nation, n’ait pas fait un clin d’œil au sport qui, affirme-t-il, est aussi une source de revenus pour de nombreuses personnes. Mais, n’oublions pas que pour l’instant, l’ensemble des acteurs évoluent dans le cadre de la saison qui prend fin au mois de mai. En attendant d’avoir des entretiens avec les premiers responsables, nous apprenons que l’instance du football burkinabè promet communiquer en temps opportun sur la situation. Et selon nos informations, elle vient d’adresser une correspondance aux clubs et ligues en vue d’engager des discussions avec les joueurs dans le cadre des contrats qu’ils ont et dans le respect des textes en vigueur.

Antoine BATTIONO


Comments
  • « Je veux que chaque Americain soit pret pour les jours difficiles qui nous attendent », a prevenu le president americain dont les projections font etat de 100 000 a 200 000 morts dans son pays ou le bilan ne fait que s’alourdir, avant de « commencer a voir une vraie lumiere au bout du tunnel ». C’est dire si a la lumiere des ravages de ce petit virus, le monde decouvre aujourd’hui toute sa fragilite, y compris celle des grandes puissances qui se montrent tout aussi depassees par l’ampleur de la maladie. Et si le geant americain qui ne revendique rien moins que la place de premiere puissance au monde, a du ravaler son orgueil pour accepter de l’aide humanitaire et medicale de la Russie et de la Chine, c’est qu’au-dela de l’urgence sanitaire mondiale, la pandemie du Covid-19 se revele, a bien des egards, pleine d’enseignements. D’abord, cette image de l’Amerique assistee, illustre deja a la perfection l’adage selon lequel, « on a toujours besoin d’un plus petit que soi». Ensuite, cette crise sanitaire est la preuve que face a cette maladie, aucune rivalite ne saurait tenir et que la solidarite reste la meilleure arme face a ce monde en detresse. Un monde ou les plus puissants decouvrent, du jour au lendemain, leur vulnerabilite face a une nature qu’ils croyaient peut-etre naivement avoir totalement domptee, eu egard aux progres scientifiques et technologiques qui repoussent chaque jour un peu plus, les limites de l’inventivite et de la prouesse humaine. C’est dire si cette pandemie du Covid-19 peut etre percue comme un appel a l’humilite, surtout des puissants de la planete, et a plus d’humanisme envers les plus faibles et les plus demunis. Bien sur que l’homme, par la medecine, finira par triompher de la maladie. Mais en attendant, le Covid-19 est venu montrer la fragilite de la planete et toute la precarite de la situation de l’etre humain.

    12 avril 2020

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