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CRISE POLITIQUE AU BENIN


A deux mois de la présidentielle béninoise, le représentant spécial du Secrétaire général de l’ONU en Afrique de l’Ouest et au Sahel, le Ghanéen Ibn Chambas, a conduit « une mission d’information » sur le processus électoral à Cotonou, qu’il a achevée le 10 février 2021.  Au cours de son séjour, le diplomate onusien a tour à tour rencontré les institutions intervenant dans l’organisation du scrutin et les acteurs politiques de tous bords.  Ce déplacement intervient dans un contexte de fortes tensions politiques au Bénin, nées de graves frustrations de l’opposition qui ne décolère toujours pas de faire les frais d’une réforme « d’exclusion » – comme le dénonce l’opposition – du Code électoral, à l’initiative du président Patrice Talon.    Pour cette opposition, l’intention de ce dernier ne vise pas autre chose que de la conduire pieds et poings liés à l’abattoir. Nul besoin de rappeler que depuis l’introduction du fameux système de parrainages dans ce Code électoral en vue de la présentation des candidatures au scrutin du 11 avril prochain, l’opposition crie au scandale.  Elle voit son horizon politique assombri, du fait de la volonté plus ou moins affichée de Talon, de jouer sur du velours le 11 avril prochain, après avoir pris le soin d’écarter ses potentiels concurrents susceptibles de lui faire de l’ombre dans sa quête de second bail à la tête de l’Etat.   Pour une opposition déjà sonnée d’avoir été totalement privée de sièges à l’Assemblée nationale, le parti au pouvoir et ses satellites y ayant raflé la mise du fait de la fameuse réforme, l’on comprend tout son désarroi. De quelle marge de manœuvre cette opposition peut-elle encore disposer pour exister politiquement face à un chef d’Etat déterminé à avoir tout pour lui et à ne rien céder à ses adversaires ?

 

Le mal du Bénin est déjà connu et sa gravité nécessite, en urgence, une thérapie de choc

 

Du reste, ce système de parrainages en particulier et les contours encore flous des nouvelles exigences légales en général, sont les conséquences directes de l’exclusion de cette opposition des législatives d’avril 2019.  Mais, selon toute apparence, le président Patrice Talon n’en est pas gêné outre mesure. Le chien aboie, la caravane passe.   Et l’autisme dont il a fait montre jusque-là, peut laisser croire que l’ennemi juré de Boni Yayi ne renoncera pas à ses réformes. Il y a fort à penser que l’opposition ne se laissera pas « démonter » non plus, elle qui semble décidée à mener le combat jusqu’au bout, convaincue du bien-fondé de sa lutte. Dans un tel cas de figure, que peut vraiment le diplomate Ibn Chambas ?  En quoi sa visite a-t-elle pu faire bouger les lignes dans le sens d’un rapprochement entre pouvoir et opposition sur les questions brûlantes liées au processus électoral et qui les divisent ?  Apparemment, on n’est pas plus avancé, le diplomate onusien ayant eu droit, à l’occasion de sa visite, à un réquisitoire en règle de la part du parti des Démocrates, la formation politique de l’ex-président béninois Boni Yayi. En fait, l’opposition en veut à Ibn Chambas, depuis les législatives non-inclusives de 2019, d’avoir failli à son rôle de facilitateur. Il aurait, en effet, à l’époque, produit un rapport qui contentait plus le pouvoir en place qu’il ne prenait en compte les aspirations du peuple béninois, aux dires de l’opposition. Et chat échaudé craignant l’eau froide, l’on comprend pourquoi les opposants ne l’ont pas ménagé. Tant et si bien que IBN Chambas a jugé bon de faire une clarification sémantique à ses interlocuteurs, en indiquant que sa visite ne s’inscrivait pas dans le cadre d’une médiation, mais plutôt d’une mission d’information.   Une telle mission pour quoi faire ? Est-on tenté de se demander, surtout que le mal du Bénin est déjà connu et que sa gravité nécessite, en urgence, une thérapie de choc dans laquelle la communauté internationale se doit de s’impliquer activement. En tout cas, à deux mois du scrutin, la situation qui prévaut au Bénin, commande plus qu’une mission d’information. L’ONU devrait plutôt se montrer plus ferme et plus ambitieuse, notamment en obtenant des autorités béninoises qu’elles revoient le nouveau Code électoral qui, en certains de ses aspects, marque un grave recul de la démocratie au pays des vaudous.

 

CBS

 

 


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