DEGRADATION DE LA SITUATION SECURITAIRE AU BURKINA ET AU MALI : Damiba et Goïta dos au mur !
La situation sécuritaire dans les deux pays voisins du Sahel, en l’occurrence le Burkina et le Mali, va de Charybde en Scylla. En témoignent les deux boucheries que les deux armées viennent de subir. Alors que les Forces Armées maliennes (FAMa) pleurent 42 compagnons d’armes tombés, le dimanche 7 août dernier, à Tessit dans la zone dite des trois frontières, les Forces de défense et sécurité (FDS) du Burkina déplorent la disparition tragique, le 9 août, de 15 des leurs, suite à un incident de mines sur ce qui désormais constitue la route de l’enfer au pays des Hommes intègres, l’axe Bourzanga-Djibo. Ces massacres qui sont devenus le lot quotidien des unités combattantes des deux pays, ne sont cependant que la partie visible de l’iceberg terroriste qui se rapproche dangereusement des différentes capitales, Ouagadougou et Bamako, sans que rien ne semble arrêter la déferlante. En effet, pendant que les groupes djihadistes ne cachent plus leur volonté d’isoler Ouagadougou, c’est le cœur politique du Mali, sis au camp Soundiata Kéita de Kati dans les faubourgs de Bamako, qui a essuyé dernièrement l’ire des groupes fanatisés le 22 juillet 2022.
Ceux qui ont accueilli dans l’euphorie les coups d’Etat militaires, commencent à douter de l’armée comme solution à la crise sécuritaire
Et alors que les populations vivent ou redoutent l’apocalypse, le discours des autorités militaires dans les deux pays s’inscrit quasiment dans le déni. Des deux côtés, l’on claironne à la trompette militaire à qui veut les entendre, que « l’armée monte en puissance » sans que cela ne soit véritablement perceptible sur le terrain. Même ceux qui ont accueilli dans l’euphorie les coups d’Etat militaires dans les deux pays, commencent à douter de l’armée comme solution à la crise sécuritaire surtout que l’Etat du Niger qui montre un meilleur état sécuritaire, n’est pas dirigé par un bidasse. Et en réalité, l’échec des militaires face au désastre sécuritaire, ne relève pas d’un sort maléfique lancé par les adeptes de la démocratie. Il s’explique fort logiquement. En effet, les bons stratèges militaires, issus des prestigieuses écoles de guerre, sont envasés dans les micmacs politiques dans les capitales, laissant les théâtres d’opérations militaires aux acteurs les moins bien préparés à la guerre. Pire, l’arrivée au pouvoir des militaires, a ravivé les fractures au sein des différentes fractions des armées qui combattent sur le terrain. Et tout cela sonne comme une confirmation de la célèbre pensée de Georges Clemenceau selon laquelle « la guerre, c’est une chose trop grave pour la confier à des militaires ». En attendant de tirer toutes les leçons de ces intermèdes militaires, l’on ne peut que nourrir des regrets de voir des armées dans des nations souveraines, balbutier leur art de la guerre, en se cachant derrière l’alibi éculé de la guerre asymétrique qu’imposent des hordes de bergers et de paysans armés sans véritable formation militaire.
C’est le moment de sonner la mobilisation générale pour faire face à l’ennemi
En effet, la guerre que mènent les groupes armés dans le Sahel, n’est plus cette guerre sans front ni visage. Les zones d’actions et les modes opératoires sont aujourd’hui bien connus. Il n’y a que les armées régulières qui n’arrivent pas à opérer les mues nécessaires afin d’avoir une longueur d’avance sur l’ennemi. Et ce ne sont pas les grands discours du « complotisme » international dirigé contre les pays du Sahel en raison de leurs supposées grandes richesses minières, qui viendront effacer cet amer et triste constat. Cela dit, l’heure n’est pas au désespoir. Il est plus que temps de faire le sursaut d’orgueil tant attendu pour inverser le rapport de forces sur le terrain. Et le changement qualificatif commence d’abord par ne pas laisser la guerre aux seuls militaires qui ont montré leurs limites. Le capitaine Thomas Sankara disait : « un peuple conscient ne saurait confier la défense de sa patrie à un groupe d’hommes, quelles que soient leurs compétences. Les peuples conscients assument eux-mêmes leur défense ». C’est donc le moment de sonner la mobilisation générale pour faire face à l’ennemi qui exploite aujourd’hui la propension des populations à la fuite, pour gagner du terrain. Mais en attendant que prenne forme cette guerre populaire, il faut continuer à renforcer les capacités opérationnelles des combattants par une formation plus adaptée aux réalités du terrain et des équipements plus performants, surtout que des indices concordants permettent de dire aujourd’hui que les groupes armés ont recours aux nouvelles technologies pour semer le chaos. L’autre grande réponse à la dégradation de la situation sécuritaire, est la coopération entre les Etats, qui reste encore faible même si l’on a noté çà et là des opérations conjointes entre certains Etats et des organisations communautaires dont les actions sont restées largement en deçà des attentes. En effet, le péril est aujourd’hui commun à tous les Etats de la sous-région dont d’ailleurs la porosité des frontières est l’un des atouts des groupes armés qui peuvent utiliser l’un ou l’autre pays comme base arrière ou zone de repli après leurs attaques. Cela dit, il faut aller au-delà des guéguerres politiciennes qui desservent des populations liées le plus souvent par l’histoire et la géographie pour unir les forces et bouter définitivement le péril terroriste hors de nos frontières. En effet, l’Armageddon, cette grande bataille où les forces du bien triompheront des forces du mal, sera communautaire ou ne sera pas.
« Le Pays »