HomeA la uneDEMISSION DU CHEF DE L’ETAT AVANT LA PRESIDENTIELLE

DEMISSION DU CHEF DE L’ETAT AVANT LA PRESIDENTIELLE


C’est un truisme de dire que le fondement même de toute démocratie, c’est la qualité des institutions et partant, des dispositions réglementaires régissant les élections. Cependant, au-delà des textes, c’est l’esprit pernicieux de certains candidats qu’il faut désapprouver. Car, que vaut une bonne Constitution, si dans son application, il est possible de passer par violence ou ruse, pour gagner indûment une élection présidentielle ?  Après plusieurs décennies d’indépendance, nombre de pays africains ont des difficultés à incarner les valeurs démocratiques, surtout en matière d’organisation des élections. Ici et là, on observe des velléités de chefs d’Etat sortants, de passage par des méthodes peu orthodoxes pour se faire réélire coûte que coûte. L’une des principales maladresses, consiste à utiliser les moyens de l’Etat pour organiser sa campagne électorale.

Dans la majorité des cas, les présidents sortants bénéficient largement de la prime au sortant

En effet, l’utilisation des palais présidentiels, des moyens logistiques, matériels et même financiers de l’Etat, afin d’accroître son influence pendant les campagnes électorales, ne devrait pas seulement être considérée comme des détournements, mais aussi comme une atteinte aux principes d’égalité des chances en période électorale. Dans la majorité des cas, les présidents sortants bénéficient largement de la prime au sortant. Or, ils devraient plutôt se considérer comme des candidats au même titre que les autres. Voici la précaution par excellence pour limiter la boulimie du pouvoir et ses conséquences désastreuses ! On remarque que ce n’est pas seulement qu’en Europe ou aux Etats-Unis que de bons exemples démocratiques peuvent être pris. Prenons l’exemple du Sénégal. Abdou Diouf et plus récemment Abdoulaye Wade, ont perdu les élections alors qu’ils étaient tous deux, présidents sortants. Cela témoigne de la solidité des institutions, mais aussi de l’intégrité des hommes qui les dirigent. Aux USA, malgré la persistance de Donald Trump à se maintenir au pouvoir, on constate que force est restée à la loi. Des institutions démocratiques solidement ancrées permettent, en effet, de conjurer les velléités antidémocratiques individuelles, face à l’appât du pouvoir. En France, Sarkozy ne continue-t-il pas d’être inquiété par la Justice, en raison des moyens illégaux présumés, de financement de sa campagne présidentielle ? Face aux dérives électorales qui sont légion en Afrique, est-il possible de s’inspirer du cas malgache ?  Sur cette question, rappelons que le président Hery Rajaonarimampianina avait présenté à l’époque, à la Haute cour constitutionnelle, une demande de démission, conformément à la Constitution du pays. Cette demande était la condition sine qua non pour engager sa campagne, afin de briguer un deuxième mandat, à la présidentielle de novembre 2018. Il est important de souligner cependant que cela s’était produit dans un contexte particulier, où l’ex- homme d’Etat était en difficulté avec son opposition politique.

Il faut louer cette disposition de la Constitution malgache

Elu en 2013 à l’issue d’une longue période d’instabilité politique, Rajaonarimampianina était vivement contesté par ses rivaux qui l’accusaient de vouloir à tout prix les museler dans l’arène politique. Pendant environ deux mois et assidument, les partisans de l’opposition étaient descendus quasi-quotidiennement dans les rues de la capitale du pays, Antananarivo, pour exiger sa démission, ainsi que l’annulation de la loi électorale jugée partisane. Après sa démission, l’ex-président s’était retrouvé sur le même terrain de campagne que ses prédécesseurs, Andry Rajoelina (2009-2014) et Marc Ravalomanana (2002-2009). En vue de pallier la vacance du pouvoir, la Haute cour constitutionnelle avait ordonné la formation d’un gouvernement de coalition, qui avait permis de sortir le pays de l’impasse en ramenant le calme. En attendant l’élection d’un nouveau président, l’intérim de la direction du pays avait été confié à la deuxième personnalité de l’Etat, à savoir le président du Sénat, Riko Rakotovao. Quelles leçons peut-on tirer du cas malgache ? D’abord, soulignons que Rajaonarimampianina n’a pas persisté à rester au pouvoir, face à la pression qui montait de toutes parts contre sa légitimité à diriger. Malgré les apparences, il a su, au bon moment, rendre sa démission, avant l’atteinte du point de non-retour. Cette sage précaution avait permis de facto, d’éviter l’irréparable. Ainsi, l’ex-président avait confié son sort au verdict des urnes, et était éliminé dès le premier tour du scrutin. Ensuite, Rajaonarimampianina était reparti en campagne conformément à l’esprit de la Constitution.  Se plaçant sur un pied d’égalité avec ses rivaux, on n’a pas senti en lui un quelconque esprit de revanche ou d’attitude « va-t-en-guerre ». Cela n’a rien à voir avec ce que l’on a déjà vu ou entendu sous d’autres cieux : « On gagne ou on gagne ! » Combien de candidats à la présidentielle en Afrique, auraient pareillement renoncé à leurs privilèges récents, pour gagner une élection présidentielle ? En tout état de cause, il faut louer cette disposition de la Constitution malgache qui veut qu’un président en exercice démissionne en fin de mandat, avant d’aller en campagne. C’est une richesse institutionnelle qui devrait inspirer d’autres pays d’Afrique et même d’ailleurs !

« Le Pays »


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