DETOURNEMENT PRESUME DES FONDS DESTINES AUX DEMOBILISES EN COTE D’IVOIRE : Ces « coupeurs de route* » qui créent des ennuis à ADO
On en sait un peu plus sur les raisons de la grogne des démobilisés en Côte d’Ivoire. En tout cas, à en croire un des leurs, Diomonde Megbe, les 6 400 ex-combattants semblent agacés par cette sorte de traitement de faveur accordé à leurs anciens compagnons d’armes qui ont pu intégrer l’armée régulière et avec lesquels ils ont pourtant mené la rébellion de 2002 à 2009, pour permettre à Alassane Ouattara (ADO) d’arriver au pouvoir. Aujourd’hui, le pouvoir ivoirien a de la peine à tenir parole pour les primes qui ont été promises à ces anciens rebelles pour le service rendu dans le dénouement de la crise post-électorale de 2010-2011. Si les 8400 ex-rebelles ont pu rentrer dans leurs ‘’droits’’ en faisant parler la poudre, en janvier et en mi-mai, les 6400 anciens soldats qui ont été démobilisés dans le cadre du DDR (Désarmement, démobilisation et réintégration), comme le prévoyait l’Accord politique de Ouagadougou (APO), qui revendiquent des primes similaires, sont, quant à eux, pour le moment tenus en respect par les forces de l’ordre. En effet, sortis dans la rue pour se faire entendre le 23 mai dernier à Bouaké, ceux-ci ont été aussitôt réprimés dans le sang. Bilan : 4 morts. Contrairement aux autres qui ont pu imposer la loi des armes, les démobilisés, sachant que le rapport de force n’est pas en leur faveur pour faire plier le pouvoir ivoirien, préconisent la voie du dialogue. Ils demandent à prendre langue avec le gouvernement, tout en pointant un doigt accusateur sur le côté obscur du processus de DDR.
Le président Ouattara doit être abasourdi en apprenant cette forme d’escroquerie qui ne dit pas son nom
On tombe des nues en apprenant du sieur Megbe que sur les 2,5 millions de F CFA qui étaient destinés à chacun des démobilisés dans le cadre de leur réinsertion, ce ne sont que 800 000 F CFA qui leur ont été reversés. Les intermédiaires s’étant sérieusement servis. Ce qui révèle le côté hideux de la politique de démobilisation et de réinsertion de ces ex-combattants et qui légitime un peu plus leurs revendications. Même le président Ouattara doit être abasourdi en apprenant cette forme d’escroquerie qui ne dit pas son nom. Car, comment comprendre qu’une telle somme d’argent soit débloquée pour aider les démobilisés et que ces derniers ne reçoivent finalement que la portion congrue ? Ce fait est d’ailleurs révélateur qu’ADO était jusque-là coupé des réalités du terrain. En effet, tout porte à croire qu’il n’a pas encore réussi à mettre les gens qu’il faut à la place qu’il faut, pour faire face aux problèmes de l’armée ivoirienne. Il est peut-être lui-même animé de bonnes intentions pour résoudre de façon efficiente les maux qui minent la Grande muette ivoirienne, mais encore faut-il que son entourage l’aide dans ce sens. Depuis son accession au pouvoir, nombre de collaborateurs du président ivoirien ont été mouillés dans des affaires pour le moins scandaleuses, le mettant toujours devant le fait accompli. L’on se souvient encore de cette histoire de primes non reversées des Eléphants après leur sacre à la CAN 2015, qui avait éclaboussé le ministre des Sports, en son temps. Cette révélation des ex-combattants sur la gestion des fonds de réinsertion doit amener, enfin, le président Ouattara à descendre de sa tour d’ivoire pour voir clair dans certaines choses au risque de se laisser surprendre, encore, par des événements. En un mot comme en mille, le pouvoir ivoirien doit faire un effort d’empathie à l’égard de ces ex-combattants qui ont vu en réalité leurs fonds détournés. Toute autre action visant à les réduire au silence sans les rétablir quelque peu dans leurs droits, serait comme se battre contre des moulins à vent.
Drissa TRAORE
* Coupeurs de route : escrocs