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DIALOGUE POLITIQUE EN COTE D’IVOIRE


Après une présidentielle plutôt mouvementée sur fond de violences et de contestation de la légitimité de la candidature du président Alassane Dramane Ouattara (ADO), qui a abouti à la réélection de ce dernier pour un troisième mandat dans les conditions que l’on sait, l’heure est à présent au dialogue en Côte d’Ivoire. Ce, pour tenter de sauver ce qui peut encore l’être en vue des législatives initialement prévues pour se tenir en ce mois de décembre 2020, mais qui ont  finalement été repoussées au premier trimestre de la nouvelle année 2021 qui pointe à l’horizon.  Un dialogue qui se veut inclusif entre le gouvernement, l’opposition et la société civile et dont le bal des négociations a été lancé le 21 décembre 2020, par le Premier ministre Hamed Bakayoko, instruit par le président ADO de mener les discussions. Le moins que l’on puisse dire, c’est qu’une semaine après l’investiture du président ADO pour son troisième mandat, les choses semblent s’accélérer en Côte d’Ivoire en vue d’une décrispation de l’atmosphère sociopolitique.

 

Il faut souhaiter que cette main tendue du locataire du palais de Cocody à l’opposition porte l’adhésion de tous les protagonistes

 

Si cela peut être vu comme une volonté du chef de l’Etat de prendre à bras-le -corps la question de la réconciliation nationale qui, quoi qu’on dise, apparaît encore à bien des égards comme le talon d’Achille de sa gouvernance, il faut souhaiter que cette main tendue du locataire du palais de Cocody à l’opposition porte l’adhésion de tous les protagonistes en vue de faire baisser le mercure des tensions politiques qui mettent à mal la cohésion sociale au pays d’Houphouët Boigny.  Et c’est peu dire, tant la pilule du troisième mandat de l’enfant de Kong semble encore bien difficile à avaler pour ses adversaires qui n’en démordent pas. C’est dans ce contexte que le Secrétaire exécutif du PDCI, Maurice Kakou Guikahué, arrêté en novembre dernier dans le cadre des manifestations postélectorales, vient de faire l’objet d’un transfert médical en France suite à la dégradation de son état de santé en prison. Ce, au moment où certains leaders de l’opposition comme Pascal Affi Nguessan, sont toujours en détention pour les mêmes raisons. Une situation dont on espère qu’elle ne viendra pas plomber les discussions qui viennent de s’engager difficilement, d’autant que la question du préalable de la libération des prisonniers politiques exigée par l’opposition, ne semble pas encore près d’être satisfaite par le pouvoir. C’est dire si aussi bienvenu que soit ce dialogue de l’espoir, le chemin de la réconciliation  en Côte d’Ivoire reste encore parsemé d’embuches.   Mais la solution est entre les mains des Ivoiriens. Pour cela, ils ont besoin de se parler franchement et sincèrement pour aplanir les difficultés en vue de trouver un modus vivendi qui ne mette pas en péril la paix sociale. Sauront-ils s’élever au-dessus de leurs querelles byzantines pour donner une chance à la paix et tenter de recoller les morceaux du tissu social déchiré ? On attend de voir. Mais d’ores et déjà, on peut se féliciter de la présence des grands courants de l’opposition politique ivoirienne comme le PDCI d’Henri Konan Bédié, le FPI de Pascal Affi Nguessan et la plateforme EDS proche de l’ex-président Laurent Gbagbo, à la rencontre de prise de contact du 21 décembre dernier, pour autant que cela soit la traduction d’une disposition d’esprit à aller au dialogue Mieux, le FPI, tendance Gbagbo annonce qu’il prendra part aux législatives de mars prochain et ce, après dix ans d’absence sur le terrain politique.

 

Il appartient au président Ouattara de donner des gages de sa bonne foi

 

C’est déjà un pas dans le sens de l’apaisement politique, après les événements violents et parfois sanglants de la présidentielle d’octobre dernier. Reste maintenant à savoir dans quel sens vont évoluer les discussions. Pourvu, pourrait-on dire, que la montagne n’accouche pas d’une souris.  Car, à y regarder de près, ce dialogue, aussi difficile qu’il puisse être,  paraît aujourd’hui un chemin incontournable pour donner des chances à la Côte d’Ivoire de rebondir, après la profonde déchirure de 2010-2011 dont les événements de cette année électorale 2020 sont le prolongement et les répliques telluriques dans un pays où les cœurs ont visiblement encore du mal à désarmer.  Aussi est-il impératif pour la Côte d’Ivoire,  de tourner définitivement la page des rancœurs politiques sous peine de se retrouver dans un cercle vicieux de sempiternelle vengeance. Cela demande un dépassement de soi des acteurs politiques, pour mettre l’intérêt supérieur de la nation au-dessus de toutes considérations. Il y va de la paix et de la cohésion nationale. La question est maintenant de savoir si tous les acteurs ont les mêmes attentes de ces concertations et si l’on est en droit d’en attendre les résultats escomptés. On attend de voir, tant la situation politique en Côte d’Ivoire n’a jamais manqué de rebondissements.    En tout état de cause, au-delà des signaux positifs que constitue le simple fait de renouer le fil du dialogue, il appartient au président Ouattara de donner des gages de sa bonne foi en posant des actes en phase avec sa volonté d’apaisement du climat social. Dans ce sens, il lui appartient de juger de l’opportunité et de l’étendue des concessions à faire pour mériter la confiance de ses compatriotes, particulièrement celle de ses adversaires politiques,  en vue d’une adhésion pleine et entière à son projet. C’est le seul combat digne qui vaille encore la peine d’être mené pour lui,  après dix ans de pouvoir pour les résultats que l’on sait. Autrement, on ne serait pas étonné qu’à la fin de ce mandat querellé, la question de la réconciliation reste toujours un vœu pieux, à défaut d’être en chantier sur les bords de la lagune Ebrié.

 

« Le Pays »

 

 

 


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