Dr ISMAËL DIALLO, INFECTIOLOGUE : « La saison pluvieuse est favorable au choléra »
Médecin infectiologue au CHU-Yalgado Ouédraogo et Maître assistant à l’université Ouaga I Pr Joseph Ki-Zerbo, le Dr Ismaël Diallo, dans cette interview qu’il nous a accordée le 9 juillet 2018, nous parle du choléra qui, en ce temps de saison des pluies, sévit. Par quoi est-il causé ? Comment se comporter face à quelqu’un qui est atteint de cette maladie ? Et comment la prévenir ? Ce sont, entre autres, des questions auxquelles le Dr nous a apporté des réponses. Lisez !
Comment peut-on définir le choléra?
Le choléra est une toxi-infection intestinale due au Vibrio cholerae, très contagieuse, à déclaration obligatoire.
Y a-t-il des degrés de complication?
C’est une maladie grave et mortelle. Il s’agit d’une urgence médicale et une urgence de santé publique.
Est-elle une maladie mortelle?
Oui, elle est mortelle comme dit précédemment. Sans traitement, la mortalité est d’environ 50%.
Quelles sont les causes de cette maladie ?
Le choléra est dû à 2 sérogroupes : Vibrio cholerae O1 et Vibrio cholerae O139.
Le sérogroupe le plus souvent en cause actuellement est le O1, et est l’agent de la septième pandémie qui a débuté en 1961. Le sérogroupe O139, isolé en 1992, est fréquente en Asie.
Comment se manifeste-elle ?
Le signe essentiel est la diarrhée. C’est une diarrhée très liquidienne avec des grumeaux blanchâtres dans les selles dont l’aspect ressemble à de « l’eau de riz », d’odeur fade ou de poisson frais. Les selles sont incessantes. Le malade peut perdre 10 litres, voire 15 litres d’eau par jour. La diarrhée est accompagnée souvent de vomissements et de crampes. La conséquence de cette perte de liquide est une déshydratation sévère et une soif vive.
Comment reconnaître quelqu’un qui souffre du choléra et quel comportement adopter face à cet individu?
Une diarrhée suivie de vomissements, qui tue en quelques heures un adulte, est presque toujours du choléra.
Quelles sont les périodes pendant lesquelles cette maladie est fréquente ?
Avec le manque de latrines, la saison pluvieuse lui est favorable avec les ruissellements d’eau.
Aussi en cas de catastrophe naturelle et en cas de déplacement de la population.
Que faut-il faire pendant ces moments ?
Le choléra relève d’une contamination féco-orale. Il convient d’isoler les malades et de rechercher des cas dans leur entourage. Les selles et les vomissements sont décontaminés par de l’eau de javel. La prévention générale repose sur l’accès à l’eau potable et aux installations sanitaires et la sensibilisation sur les règles élémentaires d’hygiène (lavage des mains, hygiène alimentaire, utilisation des installations sanitaires).
Quel est l’état actuel du choléra au Burkina?
Pour l’instant, et je l’espère pour longtemps, nous n’avons pas de cas signalé, et ce depuis 2006, si ma mémoire est bonne.
L’on a tendance à croire que c’est une maladie qui prend de l’ampleur, comment expliquez-vous cela ?
Le choléra est une maladie du péril fécal, donc une maladie des mains salles. Le choléra est transmissible par contamination directe interhumaine ou par l’intermédiaire d’aliments ou d’eau de boisson souillés par des excrétas. Vous comprenez que le manque d’hygiène, la précarité, pour ne citer que ceux-là, sont des facteurs qui favorisent la survenue de la maladie.
Peut-on en guérir ?
Oui, on peut en guérir même en l’absence de traitement. Mais la mortalité peut atteindre 50% de décès.
Prise en charge très tôt, la durée des symptômes est raccourcie et le malade récupère plus vite.
En termes de nutrition, qu’est-ce qu’un individu atteint de cette maladie doit-il consommer ?
L’eau consommée doit être potable et l’hygiène alimentaire de rigueur. Il n’y a pas de régime particulier.
Pour un individu atteint, il faut qu’il soit pris en charge dans une structure de soins car le malade doit être isolé. Les excréta (selles et vomissures) doivent être désinfectés, par exemple, avec de l’eau de Javel. Il doit être réhydraté efficacement et enfin, on lui prescrira des antibiotiques.
Comment prévenir la maladie ?
– Améliorer l’accès à l’eau potable ;
– Lutter contre le péril fécal par la construction et l’utilisation de latrines ;
– Promouvoir l’hygiène des mains (lavage des mains) ;
– Hygiène alimentaire (bien laver les aliments, faire bien cuire les aliments) ;
– Il existe des vaccins anti-cholériques qui peuvent être utilisés en prévention.
Valérie TIANHOUN