HomeA la uneDROIT DE L’HOMME : Pourquoi la peine de mort doit être abolie

DROIT DE L’HOMME : Pourquoi la peine de mort doit être abolie


Le débat autour de la peine de mort n’en finit pas. Car de plus en plus des voix s’élèvent pour demander son abolition. C’est du moins ce que pense l’auteur du point de vue ci-dessous qui y va de ses arguments.

 

La problématique de  la peine de mort est une question sociétale hautement sensible qui a toujours divisé les Hommes dans l’histoire de tous les peuples. Et le peuple du Burkina  n’est   pas  en marge de ce  choc des convictions pro et  antiabolitionnistes. Pour ne pas demeurer par notre silence des otages consentants, il urge de radicaliser notre refus de la banalisation de la vie humaine et de la déshumanisation du droit.

 

1) Du point de vue juridique

 

« la protection de la vie, la sureté et l’intégrité physique sont garanties » ainsi dispose l’article 2 de la constitution burkinabé. Aussi, le Burkina Faso a ratifié des conventions internationales qui posent le principe de la protection de la vie humaine : La déclaration  universelle des droits de l’homme en son article 3. Le pacte international relatif aux droits civils et politiques en son article 6, la charte africaine des droits de l’homme et des peuples en son article 4. Les dites conventions sont reprises au 11e paragraphe du préambule de notre constitution, donc faisant partie  du bloc de constitutionnalité. Dès lors, maintenir l’application de la peine de mort dans le code pénal, le code de justice militaire, la loi de 1972 relative à la police des voies ferrées, est le comble du paradoxe, voire même une aberration juridique. Selon la hiérarchie des normes de Hans Kelsen, une loi ordinaire ne peut être contraire à la  constitution qui est la loi mère car étant au sommet de la hiérarchie normative. Or, toutes les lois sus-citées sont des lois ordinaires. C’est pourquoi nous affirmons que la peine de mort est anticonstitutionnelle car celle-ci est contraire à notre loi fondamentale.

La peine de mort viole le principe   de la personnalisation et de l’individualisation de la peine, cela signifie que la peine est sensée punir celui qui a commis la faute, or  l’article 20 du code pénal interdit à toute famille d’un condamné à mort de lui offrir une cérémonie religieuse ou coutumière avant son inhumation sous peine d’amende pouvant aller jusqu’à 500 000f ; une sanction par ricochet de la famille du condamné. Par exemple dans « Dans dernier jour d’un condamné » de Victor HUGO, le condamné avait écrit dans son testament, que ce qui lui faisait plus mal, c’est sa fille de deux ans qui joue et rit le jour où il sera guillotiné. Une victime innocente du fait de la loi. On dira que l’auteur du crime a aussi laissé une veuve et des orphelins, faut-il y ajouter une veuve et des orphelins au nom de la justice ?

La justice n’est pas infaillible. En cas d’erreur judiciaire le mort  déshonoré ne peut  pas être ressuscité pour être blanchi.

La peine de mort peut constituer un obstacle à la vérité et à la justice car la convention de la CEDEAO portant  extradition interdit à son article 5 l’extradition dans un pays où le condamné  est passible d’une peine humiliante ou dégradante, or la peine de mort en est une.

 

2) Du point de vue sociologique

 

L’argument clef des anti- abolitionnistes est que la peine de mort serait dissuasive. Un démenti cinglant s’impose.

En effet que vaut la soi-disant épée de Damoclès qu’est la peine de mort face à un terroriste endoctriné qui, dans sa folie meurtrière,  est convaincu que le seul salut pour lui est « de paver la route du paradis avec les cranes des païens et d’y épouser un ange céleste  » ? Absolument rien !

Arthur KOESTLER dans ses « réflexions sur la guillotine » a fait état d’une statistique : jadis, en Angleterre  sur 250 pendus,  170 avaient déjà assisté à des exécutions capitales. En Grande Bretagne, pendant que l’on exécute une personne pour vol, l’on constate des vols dans le public venu assister. Toutes les études menées par les criminologues ont établi l’absence de lien entre la peine de mort et la courbe de la criminalité.

Aux Etats unies, certains états horrifiés par la vision de la pendaison, avaient proposé l’injection létale jugée avoir des effets immédiats et sans douleur. La pratique a prouvé le contraire car certains agonisaient pendant plus de 34 minutes et les doses sont souvent doublées. D’ailleurs, les laboratoires pharmaceutiques refusent de nos jours de produire le Thiopental de sodium sensé anesthésier avant  l’arrêt cardiaque.  Ainsi le pentobartital, un produit utilisé pour anesthésier les animaux, est utilisé en remplacement. L’humanité se confond dangereusement à l’animalité.

Il est donc temps que le Burkina Faso abolitionniste de fait (depuis le moratoire des nations unies de 2007, notre pays n’exécute pas ses condamnés à mort) devienne abolitionniste de droit  en ratifiant le 2e protocole facultatif visant à l’abolition de la peine de mort. L’action de la coalition nationale contre la peine de mort est saluée car la peine de mort est indigne d’un Etat de droit. C’est un aveu d’échec de la politique criminelle d’un Etat. « Une bonne politique sociale est la meilleure politique criminelle ». VON LISZT

 

Wilfried ZOUNDI

Juriste consultant

Ex député / spécialiste du droit pénal

[email protected]

 

 


Comments
  • M le Juriste consultant Ex député / spécialiste du droit pénal: et si vous fondiez votre argumentaire su des choses plus « terrestres » ? Il eut fallu vous rendre auprès des veuves et orphelins de policiers tués comme Yamtarba. Vous pourrez également demander l’avis de la famille du directeur provincial de la Police nationale du Noumbiel, le commissaire Yacouba Tou, assassiné froidement par des bandits. N’oubliez pas surtout d’aller demander l’avis également, aux mamans des jeunes filles égorgées par un certain Saul ? Demandez à ses enfants et à sa veuve, « qui jouent et qui rient », ce que leur père et époux ressentait dans l’agonie de la mort qui lui ont donnée les bandits. Victor Hugo que vous citez n’est pas le bienvenu, ni du point moral ni du point éthique, dans le contexte de la réflexion sur la peine de mort au Burkina Faso. Ni d’ailleurs les Conventions inertes et muettes des Nations unies que vous citez, tout comme u code pénal burkinabè qui n’existe que pour ceux qui en tirent des subsides et des motifs de l’impunité.

    8 octobre 2016
  • Cher M. Kanzim,
    Je vous encourage à être du côtés des personnes que vous avez citées et faire entendre leurs vois plus tôt que de demander à M. Zoundi de le faire. Ne parlez pas aux nom des victimes s’il vous plait. Il y a eu des situations en Afrique où les proches des victimes ont demandé de ne pas exécuter le criminel. Si vous demandez au paysan dont on a volé une brebis, il vous dira de tuer le voleur peut-être! Sachez que la peine de mort qui est dans notre code pénal a été importée aussi ainsi que la plus part de ses dispositions. Nous devons avoir la sagesse de protéger la vie humaine. Si le fait de tuer vous révolte, pourquoi voulez-vous qu’on tue en retour celui qui a commis un crime et dont le comportement est purement et simplement le fait de la société, de la gouvernance. Vous et moi écrivons, lisons et savons utiliser internet. Ne pensez-vous pas que c’est une injustice que d’autres millions de personnes au Burkina ne sachent ni lire ni écrire? Vous arrivez certainement à vous offrir 3 repas par jour, vous rendez-vous compte qu’il y a des millions de Burkinabè qui peinent à avoir 1 seul repas par jour? Ce sont ces injustices, ces inégalités qui conduisent des gens nés bons à être des criminels et vous en êtes un des redoutables.

    Le monde entier a tant besoin de se débarrasser de la barbarie et de se pencher sur la construction de sociétés qui prennent en compte les besoins des citoyens, qui réduisent au maximum les inégalités, l’insécurité et l’injustice. Soyez un des combattant pour ce monde salutaire. Le Burkina Faso est partie à des textes qui l’obligent à abolir la peine de mort. Le pays a adhéré librement et souverainement et donc de façon souveraine, il doit se conformer à ses obligations.

    Travaillons à ce qu’il y ait moins de criminels et des citoyens qui s’écartent de notre modèle de société. Sensibilisons, éduquons les populations et dénonçons tous les cas suspects pour que tout le monde soit en sécurité. La violence n’arrête pas la violence, le feu n’éteint pas le feu, une douleur ne soulage pas l’autre. Soyons humain!

    18 octobre 2016

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