ELECTIONS GENERALES EN SIERRA LEONE : Freetown résolument sur la bonne voie
Le 7 mars dernier, plus de 3 millions d’électeurs sierra-léonais étaient appelés à élire leur nouveau président, renouveler l’Assemblée nationale et les exécutifs locaux. Si 16 candidats sont dans les starting-blocks pour la présidentielle, deux sont clairement favoris. Ceux des deux principaux partis politiques : ACP (All People’s Congress) et SLPP (Sierra Leone People’s Party). Et le jeu est assez ouvert, en ce sens que le président en fonction, Ernest Bai Koroma, respectant la clause limitative de mandat, n’est pas candidat à sa propre succession. Ainsi, l’All People’s Congress, (ndlr : Congrès de tout le peuple), le parti au pouvoir qui a pour symbole le rouge, a désigné, pour la conquête du fauteuil présidentiel, l’ancien chef de la diplomatie sierra-léonaise, Samura Kamara, avec comme colistier, Chernor Maju Bah. Le principal parti de l’opposition, le Sierra Leone People’s Party (ndlr : le Parti du peuple de Sierra Leone) qui a pour couleur fétiche le vert, a, quant à lui, jeté son dévolu sur Julius Maada Bio, un sulfureux personnage qui a comme colistier, Mohamed Juldeh Jalloh. Difficile de dire qui des deux favoris aura la faveur des urnes. Cela dit, si jusqu’ici, les différents challengers engagés dans ces élections générales, ont fait preuve d’une campagne électorale civilisée, c’est-à-dire sans accrocs majeurs, ils doivent jeter leurs ego surdimensionnés à la rivière et ne privilégier que l’intérêt supérieur de la Nation, de sorte que les vaincus puissent féliciter le vainqueur comme cela a rarement été vu en Afrique.
Le successeur de Ernest Bai Koroma devra se poser en rassembleur
Si le candidat de la principale formation politique de l’opposition, Julius Maada Bio, a eu, par le passé, à se rendre tristement célèbre en exécutant de présumés putschistes en 1992 et en s’accaparant du pouvoir en 1996 avant d’ouvrir le pays au multipartisme, il aura eu le mérite de faire son mea culpa et c’est aux Sierra Léonais de juger de la pertinence de son projet de société à travers les urnes. Le candidat du parti au pouvoir a, peut-être, beaucoup plus de chances avec le soutien du président sortant, Koroma, qui, lui, aura surtout le mérite de faire de son mieux pour mettre le pays résolument sur la bonne voie de la démocratie, en n’ayant pas caressé le rêve de tripatouillage constitutionnel pour déverrouiller la clause limitative des mandats, contrairement à son homologue togolais qui renâcle à toute alternance. En tous les cas, le successeur de Ernest Bai Koroma devra se poser en rassembleur, en évitant les discours clivants tendant à créer deux types de citoyens en Sierra Leone. C’est à ce prix que le pays pourrait jouer dans la cour des grands, c’est-à-dire dans le cercle restreint des Nations démocratiques sur le continent africain. En tout cas, pour l’heure, les signaux sont bons, d’autant que le président sortant, Koroma, après deux mandats successifs à la tête de l’Etat, a décidé de faire valoir ses droits à la retraite en laissant la place à une autre compétence ; toute chose qui n’était pas gagnée d’avance sur un continent où la tendance est aux règnes à vie. La Sierra Leone est donc sur la bonne voie. Reste maintenant à espérer que l’incurie et les turpitudes de la classe politique ne viendront pas tout chambouler, au grand dam du peuple sierra-léonais. C’est, du moins, ce qui fait dire à certains que les élections de ce mercredi constituent un véritable test grandeur nature.
Drissa TRAORE