HomeA la uneENQUETE PARLEMENTAIRE SUR LES EVENEMENTS DE KIDAL : En veut-on à Moussa Mara ?

ENQUETE PARLEMENTAIRE SUR LES EVENEMENTS DE KIDAL : En veut-on à Moussa Mara ?


En mai 2014, alors que la tension entre Bamako et les groupes armés du Nord était encore vive, l’ancien Premier ministre, Moussa Mara, avait entrepris une visite hautement risquée dans le fief des insurgés à Kidal, qui s’était soldée par la mort d’une cinquantaine de militaires maliens et d’une demi-douzaine d’administrateurs civils. Plus de deux ans après les faits, la Commission ad hoc  qui était chargée de mener une enquête parlementaire pour « situer les responsabilités » dans cette affaire tragique, a déposé ses premières conclusions. Elle ne requiert ni plus ni moins que des poursuites judiciaires contre l’ex-PM et le chef d’état-major de l’armée à l’époque, le général Mahamane Touré. Par contre, le ministre de la Défense de l’époque, Soumeylou Boubeye Maïga, est hors de son collimateur pour insuffisance de preuves pouvant le mettre en cause. Il n’en fallait pas plus pour que certains partisans de l’ex-chef du gouvernement voient derrière cette affaire, une cabale politique visant à nuire à leur mentor qui ne cache pas du reste ses ambitions politiques. Alors, en veut-on à Moussa Mara ? En attendant d’avoir réponse à cette question, le moins que l’on puisse dire, c’est que l’Assemblée nationale malienne est dans son rôle. Car, ils sont certainement nombreux les Maliens qui ne comprendraient pas que ces événements restent sans suite, d’autant plus que les choses se sont terminées de façon tragique, avec à la clé une humiliation cinglante pour les Forces armées maliennes (FAMA) et le pouvoir de Bamako. Alors que  tout cela pouvait être évité. En tout cas, il est heureux de voir que l’intéressé lui-même, ne s’offusque guère d’une telle procédure. Au contraire, pour lui, «il faut laisser le processus continuer tranquillement et que l’Assemblée prenne des décisions qui lui semblent appropriées et ensuite, que le processus continue éventuellement sur le plan judiciaire ». C’est à penser que si Moussa Mara n’avait vraiment pas la conscience tranquille, il ne tiendrait pas de tels propos. A moins qu’il ne soit finalement de cette race d’hommes qui assument toutes leurs responsabilités, quoi que cela puisse leur en coûter.

S’il s’agit de calculs politiciens, la probabilité est grande que cette affaire fasse des dégâts au-delà du cercle du Premier ministre

Cela dit, et pour en revenir au sujet, est-ce l’entêtement du Premier ministre  à l’époque, de vouloir affirmer dans les faits, l’autorité de Bamako sur la ville rebelle, qui a conduit à cette situation désastreuse ? L’histoire le dira, surtout si procès il y a. Mais en attendant, l’on peut difficilement croire que l’ex-Premier ministre a entrepris une initiative aussi périlleuse, à l’insu et sans l’aval du Chef de l’Etat. D’autant plus que la question de Kidal est connue de tous au Mali, comme une zone de polarisation de toutes les tensions entre l’autorité centrale et les insurgés touaregs qui sont loin d’avoir renoncé à leurs velléités indépendantistes.   Dans ces conditions, comment la responsabilité du chef du gouvernement pourrait-elle être engagée sans celle du chef de l’Etat ? Comment pourrait-on toucher à Moussa Mara sans égratigner le président Ibrahim Boubacar Kéïta ? En tout cas, cette affaire est loin d’avoir livré tous ses secrets et l’on ne peut reprocher aux parlementaires maliens leur démarche citoyenne visant à comprendre  le nœud du problème. Car, d’un certain point de vue, l’on ne peut nier que ces événements ont peu ou prou contribué à consacrer la partition de fait du territoire, avec un Nord qui échappe totalement au contrôle de Bamako. Maintenant, s’il s’agit de calculs politiciens, ce qui n’est pas à exclure, la probabilité est grande que cette affaire fasse aussi des dégâts au-delà du cercle du seul Premier ministre.

En tout état de cause, si Moussa Mara avait réussi dans son expédition, nul doute qu’il aurait été aujourd’hui célébré en héros  et en aurait récolté des dividendes politiques. Mais tout porte à croire qu’il a joué et a perdu. Pour autant, Bamako a-t-il renoncé à la ville rebelle ? Rien n’est moins sûr. C’est pourquoi il y a lieu de croire que cette enquête parlementaire va remuer le couteau dans la plaie. Car, l’humiliation subie par les FAMA a été à la hauteur de la désillusion des autorités de Bamako et du peuple malien, et la blessure est loin d’être cicatrisée. C’est pourquoi l’on attend de voir jusqu’où iront ces enquêtes parlementaires pour  situer les responsabilités.

Outélé KEITA


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