HomeOmbre et lumièreGRATUITE DES SOINS POUR LES FEMMES ENCEINTES ET LES ENFANTS : C’est bien, mais attention aux dealers !

GRATUITE DES SOINS POUR LES FEMMES ENCEINTES ET LES ENFANTS : C’est bien, mais attention aux dealers !


On se souvient, le pouvoir de Roch Marc Kaboré avait pris une mesure portant sur la gratuité des soins pour les femmes enceintes et les enfants dont l’âge est compris entre 0 et 5 ans. L’on se rappelle aussi que le ministre de la Santé, Smaïla Ouédraogo, a rencontré le 31 mars dernier, les Hommes de médias, pour apporter des précisions sur la question. Il en est ressorti ce qui suit :

D’abord, dès avril 2016, ces mesures seront mises en œuvre dans les Centres de santé et de promotion sociale (CSPS), dans les Centres médicaux (CMA) et les centres médicaux avec antenne chirurgicale. Sont concernées pour le moment par ces mesures, les régions du Centre, des Hauts-Bassins et du Sahel. Ensuite et en rapport avec les enfants, des maladies comme  le paludisme, les diarrhées, les infections respiratoires aiguës, les affections néonatales sont désormais prises en charge.

Enfin, en ce qui concerne les femmes enceintes, elles bénéficieront de traitements gratuits si elles sont atteintes de certaines maladies.

Toute cette batterie de mesures mérite d’être saluée à sa juste valeur.  Car, elle  vient a priori retirer une énorme épine du pied de bien des Burkinabè au regard non seulement du public cible, mais aussi du répertoire des maladies. En effet, les femmes enceintes et les enfants de 0 à 5 ans sont des personnes très vulnérables. Le fait de les cibler en priorité dans la prise en charge de certaines pathologies est donc, on ne peut plus judicieux. De ce point de vue, l’on peut rendre hommage au gouvernement. Mais l’on peut avoir l’impression que ces mesures risquent de ne pas produire les effets escomptés pour plusieurs raisons.

D’abord, l’on peut faire le constat que le gouvernement n’a pas pris le temps qu’il fallait pour sensibiliser les populations et communiquer suffisamment avant la mise en œuvre de ces mesures. Une telle opération, dans toutes les langues nationales du pays, aurait eu l’avantage de mieux situer les Burkinabè sur le contenu de ces mesures de sorte à éviter les quiproquos qui ne manqueront pas d’être constatés sur le terrain.

 

Il revient au gouvernement et à l’ensemble de tous ceux qui sont impliqués dans l’opération, de jouer chacun sa partition

 

Car, ne l’oublions pas, nous sommes dans un pays où l’écrasante majorité de la population est analphabète. Le risque est grand que ces gens aient une compréhension erronée des restrictions qui accompagnent les mesures gouvernementales. Si l’on prend par exemple la tranche d’âge des enfants concernés, l’on peut parier que dans un pays où bien des enfants ne disposent pas de documents d’état civil comme c’est le cas au Burkina, l’observation stricte du critère de la tranche d’âge va susciter des gorges chaudes voire des disputes dans bien de nos structures sanitaires, surtout dans celles qui sont situées dans les zones rurales où le phénomène des enfants sans bulletin de naissance est plus accentué. Dans ces conditions, seule la déclaration de la mère de l’enfant peut faire foi et servir de référence. La deuxième raison qui peut faire capoter la mise en œuvre de ces mesures gouvernementales est liée à la conscience professionnelle des agents chargés de les exécuter. Il est vrai, le Burkina dispose d’agents de santé qui ont une conscience aiguë de leur devoir et aux yeux desquels le serment d’Hippocrate est sacré. Mais l’arbre ne doit pas cacher la forêt. De la même manière que des brebis galeuses existent dans les autres corps de métier, il en existe aussi dans le secteur de la santé. Si l’on n’y prend garde, de tels agents indélicats profiteront de la gratuité des soins pour s’enrichir sur le dos des patients. Tant que le gouvernement ne va pas sévir contre eux par des mesures fortes et dissuasives, ce sera la porte ouverte à toutes sortes de deals et autres pratiques mafieuses. La troisième raison qui pourrait fourvoyer la gratuité des soins est liée à la disponibilité et à l’accessibilité des produits concernés par l’opération. L’on peut se demander si le gouvernement a pris d’abord le soin de les rendre disponibles au niveau de toutes les structures sanitaires censées pratiquer la gratuité des soins. L’on peut en douter. En effet, la télévision nationale nous a montré une femme en larmes, pour n’avoir pas trouvé dans le dépôt pharmaceutique à elle recommandé par une structure sanitaire de la commune rurale de Saaba, le produit qui lui a été prescrit pour soigner son rejeton. Le cas pathétique de cette pauvre dame éplorée pourrait ne pas faire l’exception mais la règle, si dès à présent le gouvernement n’ouvre pas l’œil et le bon. Toujours dans le même registre, la vigilance doit être de mise pour que les produits disponibles soient de qualité et que les kits prescrits soient au complet. Pour toutes ces raisons, l’on peut dire à propos de la gratuité des soins pour les femmes enceintes et les enfants de 0 à 5 ans ceci : c’est bien, mais attention aux dealers ! Il revient au gouvernement et à l’ensemble de tous ceux qui sont impliqués dans l’opération, de jouer chacun sa partition en ne perdant pas de vue que l’une des pires bassesses humaines est de tricher avec la santé des populations pour faire fortune.

 

Sidzabda


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