INVESTITURE DU CANDIDAT DU RHDP SUR FOND DE CONTESTATIONS
Tout le gratin du Rassemblement des houphouetistes pour la démocratie et la paix (RHDP), était réuni samedi dernier au stade Félix Houphouët Boigny pour l’investiture festive et fastueuse du candidat du parti, le président sortant Alassane Ouattara. Des dizaines de milliers de militants se sont en effet massés à l’intérieur et autour de la plus grande enceinte sportive de la Côte d’Ivoire, pour entendre la voix de stentor de leur porte-étendard appeler à la mobilisation générale afin de battre à plate couture et ce dès le premier tour, les autres candidats à la présidentielle d’octobre prochain. Sur la pelouse, l’heure n’était pas à l’expression des peurs ou des doutes, mais plutôt à l’affichage d’une confiance sans borne et d’un triomphalisme outrancier de celui qui se considère comme un « candidat malgré lui ». En martelant dans son discours d’investiture de plus d’une heure, que rien ne l’empêche d’être candidat, Alassane Ouattara a apporté une réponse claire aux prédications sombres de certains intervenants sur des plateaux-télé ou des réseaux sociaux, qui le trouvent orphelin de cohérence et de bon sens depuis qu’il a décidé de se porter candidat après la mort subite de son poulain Amadou Gon Coulibaly, le 8 juillet dernier. Ses opposants qui restent attachés de manière littéraliste à la Constitution ivoirienne, comptent en effet l’empêcher de briguer « le mandat de trop », en organisant des manifestations de rue qui pourraient malheureusement faire dérailler violemment ce pays encore en convalescence. Ce risque est d’autant plus élevé qu’on entend déjà çà et là des discours arrière-gardistes dessiner les contours communautaires de la crise politique en cours, avec des débordements meurtriers comme ceux auxquels on a assisté à Gagnoa, à Bonoua et à Divo, dans le sud du pays.
Toutes les mesures sont bonnes en tuant dans l’œuf les germes d’une guerre civile
Certains leaders de l’opposition vont jusqu’à ressortir malheureusement les discours prolétariens et xénophobes farouchement opposés à l’invasion de la Côte d’Ivoire par des « étrangers » venus des Etats limitrophes pour piller les ressources du pays, exposant du coup ces derniers et leurs alliés naturels originaires du Nord, tous supposément partisans d’Alassane Ouattara. On espère que le cynisme de ces hommes politiques avides de pouvoir, ne nous fera pas revivre la fracture communautaire qu’on a connue en Côte d’Ivoire dans la première moitié de la décennie 2000 au cours de laquelle la scission était si nette et les tensions si vives que dans les cours communes et même sur les lieux de travail, les échanges se limitaient parfois à de simples civilités s’ils n’étaient pas émaillés de violentes disputes entre voisins ou collègues d’ethnies différentes. Malheureusement, tout est possible actuellement avec cette race d’hommes politiques qui ne reculent devant rien pour conquérir ou conserver le pouvoir, qui n’hésitent pas à susciter des turbulences ethniques et même des crimes documentés, dans le seul but de les mettre sur le dos de l’adversaire afin de le discréditer aux yeux de la communauté nationale et internationale. Il appartient à tous les acteurs de la crise en cours et davantage encore à Alassane Ouattara qui est malgré tout le président de tous les Ivoiriens, de désamorcer cette bombe identitaire avant qu’elle ne pulvérise ce qui reste encore du sentiment national en Côte d’Ivoire. C’est peut-être dans ce sens que les manifestations de rue ont été suspendues, et que le RHDP n’a pas encore appelé ses militants à apporter la réplique à la branche radicale de l’opposition qui rue dans les brancards depuis l’annonce de la candidature de l’actuel président à un 3e mandat. Toutes les mesures sont bonnes en tout cas pour négocier ce dangereux virage, en tuant dans l’œuf les germes d’une guerre civile, dans l’intérêt bien compris de la Côte d’Ivoire et de l’ensemble de la sous-région. Alassane Ouattara, qui est à ce jour le personnage le plus clivant de son pays, pourrait, dans le même ordre d’idée et pour couper l’herbe sous les pieds de ses détracteurs, surprendre ses compatriotes en démissionnant de ses fonctions présidentielles en cours de mandat, s’il venait à être réélu en octobre prochain, quitte à trouver entre-temps un vice-président qui le remplacera poste pour poste, jusqu’ aux prochaines élections en 2025.
Hamadou GADIAGA