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INVESTITURE DU PRESIDENT MALIEN


 Kankeletigui* face à lui-même et à ses défis

Le samedi 21 septembre dernier, Bamako a fait sa toilette pour accueillir d’importantes personnalités venues essentiellement d’Afrique, mais aussi d’ailleurs. Et pour cause. Elles y étaient, sur invitation du gouvernement, pour prendre part à la cérémonie festive d’investiture du président Ibrahim Boubacar Keïta et à l’an 58 de l’indépendance du Mali. D’emblée, l’on peut dire que le choix des autorités maliennes de coupler la cérémonie d’investiture à celle de l’an 58 de l’indépendance n’est pas anodin. En effet, IBK a voulu par là, peut-on dire, se positionner comme le président de tous les Maliens. Et dans un contexte marqué par la contestation de son élection par l’opposition et par des velléités de remise en cause de l’intégrité territoriale du grand Mali, IBK n’a pas manqué de rendre hommage au père de la Nation, Modibo Keïta, ainsi qu’à tous ceux qui ont succédé à ce dernier.

Cette  donne devrait conduire Cissé à cesser de rêver

Cet acte peut être décrypté comme un engagement de sa part à garder intactes les limites du Mali telles qu’elles lui ont été léguées par ses illustres devanciers. L’autre motivation qui a conduit IBK à organiser ce double événement de la manière la plus solennelle qui soit, est liée sans doute à sa  volonté de légitimation et de reconnaissance de son élection par ses pairs africains. Et cela a été chose faite, puisqu’ils étaient nombreux les chefs d’Etat africains qui ont fait le déplacement de Bamako pour lui témoigner leur solidarité. En plus de ces illustres hôtes, l’on pouvait noter la présence, à Bamako, du patron de la diplomatie française, Jean-Yves le Drian. Et ce dernier ne compte pas pour du beurre sur l’échiquier politique  français, c’est le moins que l’on puisse dire. Dès lors, l’on peut comprendre pourquoi IBK affichait un sourire large ce samedi, sur l’imposante avenue du Mali, lieu qui a abrité la grandiose cérémonie festive d’investiture d’IBK et de l’an 58 de l’indépendance du Mali. En tout cas, la présence massive de chefs d’Etat africains et de Jean-Yves Le Drian à cette double célébration, est le signe que la façon dont IBK a été élu ne constitue pas, à leurs yeux, un problème au point qu’ils puissent se permettre de ne pas s’afficher à ses côtés. De ce point de vue, ils ont, par la même occasion, envoyé un message clair à Soumaïla Cissé. Et ce message peut être décrypté ainsi qu’il suit : Ne compte pas sur nous pour t’aider dans ta lutte pour contester le pouvoir d’IBK. Et cette  donne, ajoutée au risque d’essoufflement du mouvement de contestation de la légitimité du pouvoir d’IBK, devrait conduire Cissé à cesser de rêver. Pour être plus précis, il doit prendre son mal en patience jusqu’en 2023, date à laquelle IBK quittera le pouvoir, en principe. Pour être conséquent avec lui même, Soumaïla Cissé ne pouvait pas être présent à cette double célébration. Cela est de bonne guerre. Mais le contexte du Mali peut l’amener plus tard à accepter la main tendue réitérée d’IBK. Car l’enjeu, ici, est de tout faire pour sauver le Mali d’un risque d’éclatement et non pas de s’installer dans une opposition faite de marches, de barricades et l’on en oublie. Cela dit, du discours que IBK a prononcé à l’occasion de cette double célébration, l’on peut s’arrêter sur trois points. Le premier est lié à sa foi en l’accord d’Alger. En effet, pour lui, il n’y a pas d’alternative à ce document. L’Algérie, on le sait, peut aider à la pacification du Nord-Mali.

La guerre a un coût et la paix n’a pas de prix

Elle peut notamment user de son influence sur certains groupes signataires de l’accord d’Alger, pour faire évoluer les choses dans le bon sens. En outre, elle dispose d’une puissante machine de guerre suffisamment dissuasive pour casser du terroriste. L’on peut même se risquer à dire que  l’Algérie peut aider à un rapprochement entre Bamako et le chef djihadiste Iyad Ag Ghali, à qui, dit-on, Alger accorde aujourd’hui gîte et couvert. Le deuxième point digne d’intérêt du discours d’IBK, est lié à la  flèche qu’il a décochée à l’endroit de certains partenaires du Mali. Il a, en effet, martelé ceci : « Nous sommes tristes de voir que certains de nos partenaires cherchent à marchander leur soutien ». Prudence diplomatique oblige, IBK n’a pas nommé ces partenaires. Mais l’on pourrait penser aux Américains dont on sait qu’ils ont tout fait pour que les Nations Unies ne prennent pas en charge le fonctionnement de la Force du G5 Sahel. Le troisième et dernier point du discours d’IBK sur lequel on peut s’arrêter, est celui lié à l’augmentation du budget de la défense. 22% en effet de la cagnotte de la République, lui seront consacrés. C’est un immense effort qu’il faut saluer à sa juste valeur. Car, la guerre a un  coût et la paix n’a pas de prix. Et le Mali est en guerre. Et dans cette épreuve qui lui a été imposée, il doit se donner les moyens de la gagner. Et une nation qui se respecte, ne doit pas compter exclusivement sur les autres pour y faire face. Le Mali semble l’avoir enfin compris. Et puis, par là, IBK semble aussi mettre en application l’adage selon lequel quand quelqu’un vous lave le dos, il faut songer à vous laver le ventre. Mais ces annonces demandent à être suivies d’actes concrets pour rassurer davantage les Maliens. L’autre condition à remplir à cet effet, est liée à l’utilisation responsable et transparente des fonds qui seront débloqués. IBK doit d’autant plus y veiller que son régime n’a pas toujours été exemplaire en matière de gouvernance. IBK gagnerait aussi à ne pas perdre de vue le combat pour arracher du chômage et de l’oisiveté, ces millions de jeunes Maliens. Car, ces vices sont les alliés naturels des djihadistes.

« Le Pays »

* Kankeletigui : l’homme à une seule parole


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