HomeA la uneUNE JOURNEE VILLE MORTE EN RDC : Un bilan mi-figue mi-raisin

UNE JOURNEE VILLE MORTE EN RDC : Un bilan mi-figue mi-raisin


En réaction à l’attitude du gouvernement qui, dans le cadre des mesures de décrispation politique annoncées,  n’aurait libéré que 4 détenus sur la centaine de sa liste, l’opposition congolaise avait appelé ses militants à observer le 23 août 2016, une journée ville morte sur l’ensemble du territoire national. En attendant que les organisateurs livrent leur bilan, l’on peut dire que la grève a été inégalement suivie. En effet, dans la capitale Kinshasa, les activités ont été ralenties, même si des taxis et bus circulaient au centre ville. C’est le même constat fait à Goma et Mbuji May où une boutique sur trois semblait ouverte. Mais à Bukavu, par contre, l’appel de l’opposition semble n’avoir pas été entendu car l’activité économique n’a pas été perturbée, étant donné que les boutiques et autres magasins sont restés ouverts. Le moins que l’on puisse dire, c’est que cette grève générale n’a pas été suivie comme celle de février dernier qui avait battu le rappel des troupes. L’on pourrait dire que ce bilan mi-figue mi-raisin n’est guère surprenant. D’autant plus que l’on sait que le pouvoir ne se priverait pas, comme il est de coutume dans les républiques bananières, d’user de tous les moyens de pression, à l’encontre notamment des fonctionnaires, pour faire échouer cette journée ville morte. En tout cas,  l’opposition n’a pas eu besoin de plus pour voir dans la convocation, ce même jour, de la Commission préparatoire du dialogue censée sortir les Congolais de l’impasse dans laquelle s’achemine inexorablement le pays, une provocation du médiateur de l’Union africaine (UA), Edem Kodjo, qu’elle récuse, du reste, pour partialité, collusion avec le pouvoir et de « vouloir à tout prix accorder son troisième mandat à M. Kabila, en violation de la Constitution de la RDC ». Le moins que l’on puisse dire, c’est qu’en l’état actuel de la situation, le problème de la RD Congo reste entier. Et en attendant la guerre des chiffres au lendemain de cette manifestation, l’on n’aura pas avancé d’un iota dans le sens de la baisse du mercure social. En effet, depuis plusieurs mois, l’atmosphère sociopolitique reste invariablement tendue  sur la question de l’organisation des élections. Et le président Kabila fait face à une vive opposition d’une partie de ses compatriotes qui le soupçonnent de travailler à un glissement du calendrier électoral pour pouvoir briguer un troisième mandat, au terme de son deuxième et dernier mandat constitutionnel. C’est dans ce contexte de vives tensions que  l’ex-Premier ministre togolais, Edem Kodjo, envoyé par l’UA en tant que médiateur, peine véritablement à faire bouger les lignes pour amener les protagonistes congolais autour de la table du dialogue.

Le médiateur de l’UA a intérêt à rectifier le tir

Car, chaque camp semble camper sur sa position tout en accusant l’autre de mauvaise foi. Si ce n’est un dialogue de sourds, cela y ressemble fort. Et dans ce bras de fer, ce que craint certainement l’opposition, c’est que le médiateur de l’UA puisse convaincre certaines grosses pointures dans ses rangs, de participer audit dialogue pour lui donner une certaine légitimité, alors qu’elle estime que les conditions préalables à ce dialogue, sont loin d’être réunies. Notamment la libération des prisonniers politiques qu’elle réclame. Cette crainte est d’autant plus justifiée que l’UNC de l’opposant Vital Kamerhe et ses alliés, compte aller plus tard au comité préparatoire dudit dialogue,  après avoir observé le mot d’ordre de la journée ville morte. Mais, l’opposition congolaise gagnerait à rester unie et à adopter une stratégie commune de lutte. Autrement, elle risque de se faire avoir et de n’avoir, plus tard, que ses yeux pour pleurer. Car, à ce rythme, il n’est pas exclu que le pouvoir parvienne, par des manœuvres souterraines dont seuls les politiciens ont le secret, à rallier certains opposants à sa cause, qui choisiraient, in fine, de faire le jeu de Joseph Kabila. En tout cas, le parti au pouvoir, pour sa part, balaie du revers de la main les récriminations de l’opposition, estimant que toutes les conditions préalables à l’ouverture  du dialogue ont été réunies. De son côté, malgré sa récusation par l’opposition, le médiateur Edem Kodjo semble tant bien que mal, assez bien tenir la barre de son dialogue dont nul ne saurait dire, à ce jour, de quoi il va accoucher. Aussi est-il à craindre que le peuple ne soit au bout du compte le dindon de la farce. Car, dans ce conflit congolais, l’on a comme le sentiment que le chien aboie, mais la caravane passe. Kabila avance inexorablement vers son objectif. C’est pourquoi en s’entêtant à vouloir aller de l’avant sans avoir crevé certains abcès, notamment le sort des prisonniers politiques, Edem Kodjo renforce la suspicion sur sa médiation. Et l’équation est d’autant plus difficile à résoudre que les protagonistes ne semblent pas avoir la même compréhension de la notion de prisonniers politiques.  C’est pourquoi il est impératif que les Congolais fassent preuve de bonne foi, s’ils veulent se donner des chances de sortir de l’impasse. Et le médiateur de l’UA a tout aussi intérêt à rectifier le tir, s’il veut donner de la crédibilité à son action. Autrement, plutôt que de réconcilier les Congolais, sa médiation risque de provoquer l’effet contraire, en les précipitant dans la violence. Est-ce cela l’objectif recherché ?

Outélé KEITA


No Comments

Leave A Comment