KOSSI : 45 enfants interceptés, les présumés trafiquants aux arrêts
Pendant que le Burkina Faso célébrait son 54e anniversaire à Dédougou, la Police de la Kossi n’avait pas baissé la garde. En effet, c’est ce jour 11 décembre 2014 que le poste frontalier de Madouba, situé à 85 Km au Nord-ouest de Nouna, a intercepté un véhicule de transport en commun, avec à son bord 45 enfants et 6 passeurs en partance pour un pays voisin. C’est pour lancer «un cri du cœur» que le Directeur provincial de l’action sociale et de la solidarité nationale de la Kossi, Moustapha Ouattara, a rencontré la presse le 13 décembre 2014, dans les locaux de ses services. Récit des faits.
«C’est aux environs de 15 h que la Police de Madouba, à la frontière malienne, a mis la main sur un véhicule avec à son bord 46 enfants et 6 passeurs. Après vérification, un des enfants était accompagné, mais les 45 autres étaient en situation de trafic». C’est ainsi qu’a débuté la rencontre avec Moustapha Ouattara, Directeur provincial de l’action sociale et de la solidarité nationale (DPASSN) de la Kossi. Selon lui, «les 6 passeurs» sont des Burkinabè résidents à Bamako au Mali, et les 45 enfants sont natifs des villages de Pia1, Kira, Soye, et Gnimini dans la zone de Djibasso. Comme mode opératoire, les parents rassemblent les enfants après les travaux champêtres et attendent l’arrivée des convoyeurs. «Le comble ici, c’est que certains parents sont même complices, en déboursant les frais de transport de leurs enfants qu’ils envoient dans une aventure incertaine», s’est désolé Moustapha Ouattara. Poursuivant son propos, il a fait savoir que suivant les explications des parents et des enfants eux-mêmes, la pratique serait même coutumière et elle permettait aux enfants de subvenir à leurs petits besoins et de venir en aide aux familles. «Je dis non, la place d’un enfant est à l’école. Un enfant ne peut pas prendre en charge, de par son travail, une famille», s’est insurgé M. Ouattara pour qui «les parents ne savent pas qu’ils envoient ainsi leurs enfants à une mort certaine ; pour certains d’entre eux». Le hic est que les 45 enfants interceptés sont âgés de 8 à 16 ans et «aucun n’est scolarisé».
Tous ou presque ne sont pas à leur premier voyage sur Bamako
Interrogés, les enfants ont dit se rendre à Bamako de plein gré, pour «chercher du travail». C’est le cas par exemple de Bakary Dao. Originaire de Soye, il a dit se rendre chez son oncle à Bamako pour faire du jardinage. A la question de savoir s’il ne peut pas faire du jardinage à Soye, il a répondu: «Il n’y a pas d’eau à Soye pour faire le jardinage en saison sèche». Quant à Hadjaratou Konaté de Gnimini, elle comptait se rendre à Bamako pour travailler chez sa grande sœur, avec l’accord de ses parents. Tous ou presque ne sont pas à leur premier voyage sur Bamako. Toute chose qui a conforté M. Ouattara quand il dit que les passeurs sont des habitués de ces faits. Malgré leur interception par la police, beaucoup d’enfants ont déclaré être prêts à répartir sur Bamako dès que possible. Une situation qui a amené Moustapha Ouattara à lancer ce cri de cœur à la Direction de lutte contre la violence faite aux enfants (DLVE). Le DPASSN a demandé la hausse du nombre de bourses et des frais de formation, pour envisager une meilleure insertion des enfants interceptés. Selon M. Ouattara, sa structure a déjà initié des sorties de formation et de sensibilisation sur des activités génératrices de revenus au bénéfice des enfants de Kira, avec l’appui de la FDC. «Franchement, nous sommes limités en moyens», a déploré M. Ouattara qui se demandait comment remettre chaque enfant à ses parents, avec l’assurance qu’il pourra rester dans son terroir. «Même les 45 enfants que nous venons d’intercepter sont logés ici à la Direction avec d’énormes difficultés, rien que pour leur nourriture». C’est pourquoi M. Ouattara a lancé un appel à toutes les bonnes volontés et surtout à l’Etat de se pencher sur la situation. Quelles seront maintenant les perspectives pour les 45 enfants interceptés? Avons-nous voulu savoir. «Les 6 passeurs sont actuellement entendus par la police. A notre niveau, nous avons convoqué les parents afin qu’ils viennent remplir des fiches d’identification avant de repartir avec leurs enfants», a répondu le DPASSN. Pour conclure, Moustapha Ouattara a invité les parents des enfants à abandonner cette pratique, et les exhorte à inscrire leurs enfants à l’école ou à les laisser apprendre des métiers.
Hama Hamidou DICKO