HomeA la uneL’APPEL DE BAMAKO AU RETRAIT DU GATIA D’ANEFIS : IBK prend un risque majeur

L’APPEL DE BAMAKO AU RETRAIT DU GATIA D’ANEFIS : IBK prend un risque majeur


 

La médiation internationale l’a exigé et le président Ibrahim Boubacar Kéita (IBK) l’a ordonné : le retrait sans condition du Groupe touareg Imrad et alliés (Gatia) de la localité d’Anéfis. Une concession faite à contre-cœur et avec  des grincements de dents au sein de la branche armée du Gatia certes, mais qui réjouit totalement la mission de paix de l’ONU au Mali. En effet, d’une part, l’organe politique du Gatia a dû s’employer à convaincre ses combattants réticents et d’autre part, la Minusma n’a pas boudé son plaisir, estimant que ce retrait des troupes pro-gouvernementales d’Anéfis, évitera une dégradation de la situation sécuritaire dans la région de Kidal. De fait, chaque camp avait renforcé son dispositif militaire et était prêt à en découdre.  Ce retrait de la Plateforme permettra-t-il aux acteurs de la crise malienne de poursuivre la mise en œuvre, toujours pénible, de l’accord de paix d’Alger ? C’est là, la principale interrogation, quand on sait que la CMA avait quitté la médiation du suivi des accords de paix d’Alger, après l’attaque menée par le Gatia le 15 août 2015.  Elle avait conditionné son retour à la table de la médiation par le retrait de la Plateforme d’Anéfis et la cessation du soutien que le pouvoir d’IBK lui apportait.  De retour de sa visite d’Alger, le président IBK a vite réagi en lâchant du lest. L’Histoire lui donnera-t-elle raison ? Dans le contexte actuel où chaque partie se doit de faire des concessions, IBK et la Minusma peuvent-ils parier sur la bonne foi de la CMA ? Ou du moins, ce retrait de la Plateforme va-t-il constituer une autre chance pour la paix au Mali ?

Bamako ne devrait pas jouer la carte du retrait sans la moindre garantie

Ces questions ont toutes leur intérêt car si la CMA veut mériter la confiance d’IBK qui vient de prendre un gros risque politique en s’exposant à la colère de l’opinion malienne, elle devrait donner des gages de franche collaboration. Or, la seule constance que l’on retient de cette CMA, ce sont ses retournements de veste spectaculaires. La CMA pourrait être tentée de réoccuper la zone évacuée par les troupes de la Plateforme, parce que la bonne foi n’est pas sa vertu première. Et ce d’autant plus que l’on peut se demander, après le départ du Gatia, qui peut encore, sur le plan opérationnel, l’en empêcher, si cette CMA se décidait à investir Anéfis et ses environs, quand on connaît le  mode opératoire fait de lourdeurs, des éléments  de la Minusma.  Il suffit d’un incident pour que ces rebelles réoccupent la zone et ils sont très bien placés pour en créer ou en susciter. Dès lors, il serait illusoire de penser que l’accord d’Alger sera appliqué parce que l’exigence de la CMA a été satisfaite. Tout comme il serait utopique de croire que cette dernière résistera à la tentation de la ré-annexion. Dans ce sens, le pouvoir de Bamako a pris un gros risque.

L’on se doit de le rappeler, Anéfis est une zone stratégique et chacun des deux camps voudrait bien le contrôler. C’est pourquoi d’ailleurs Bamako avait fait du déploiement des forces internationales dans la zone, la  condition sine qua non à tout départ de ses « protégés ». Comment se fait-il alors que le Gatia décampe « sans condition » ? Il se pourrait que Bamako ait obtenu la garantie que la CMA ne tentera pas d’envahir Anéfis ou que dans cette affaire, elle ait fait l’option de contenter la médiation internationale. La crise de confiance entre les camps a atteint une  proportion telle que Bamako ne devrait pas jouer la carte du retrait sans la moindre garantie.

Dans tous les cas, IBK aura fait sa part de chemin  en ordonnant l’évacuation de la zone par la Plateforme, même s’il s’est mis à dos les éléments combattants. Le président malien aura montré sa bonne foi à la face du monde. Si demain, la zone s’embrasait de nouveau, personne ne pourrait lui en vouloir ou du moins, l’accuser de n’avoir pas joué sa partition. La CMA serait très mal inspirée de tenter d’exploiter la situation à ses fins.

Michel NANA


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