HomeA la uneLE PRESIDENT CONGOLAIS ET SA LONGEVITE AU POUVOIR : Sassou se chatouille pour rire

LE PRESIDENT CONGOLAIS ET SA LONGEVITE AU POUVOIR : Sassou se chatouille pour rire


 

Candidat, à 73 ans,  à sa propre succession pour un troisième mandat d’affilée, le président congolais Denis Sassou Nguesso, qui cumule déjà trois décennies de pouvoir à Brazzaville, n’est non seulement pas prêt à passer le témoin, mais surtout tente de justifier encore le bien-fondé de sa longévité au pouvoir. Pour lui, non seulement, il n’est pas un cas unique, mais la longévité au pouvoir n’est pas une particularité des pays africains puisque même dans les démocraties les plus abouties comme la France et les Etats-Unis, on trouve des présidents qui ont duré au pouvoir. Oubliant de préciser que depuis lors, aucun président de ces pays ne s’est amusé à vouloir s’accrocher au pouvoir.  Aussi Sassou pense-t-il être un démocrate bon teint qui respecte la volonté de son peuple et pas plus. Et ce n’est pas de sa faute, si son peuple lui renouvelle chaque fois sa confiance, comme il s’apprête à le faire le 20 mars prochain. C’est ce qu’il a soutenu le 23 février dernier, au détour d’une visite de chantier à Kinkala, dans le Sud du pays. Faut-il en rire ou en pleurer ? En tout cas, quand on voit le parcours et la fin peu honorable qui a été celle d’un Jean Bedel Bokassa en RCA, d’un Mobutu Sésé Séko au Zaïre ou d’un Blaise Compaoré au Burkina  Faso, qui se vantaient tous de la même légitimité que le président congolais auprès de leur peuple, l’on ne peut s’empêcher de penser que Denis Sassou Nguesso se chatouille pour rire.  En effet, tous autant qu’ils sont, ces chefs d’Etat sont sortis de l’histoire par la petite porte, et c’est ce qui risque d’arriver tôt ou tard au maître de Brazzaville, s’il ne se résout pas à jouer franc jeu et à passer la main. Si l’on suit sa logique, parce que De Gaulle, par exemple, a duré au pouvoir en France, lui aussi doit durer au pouvoir au Congo. C’est peut-être son droit de le penser, mais ce faisant, Sassou se trompe complètement sur toute la ligne. D’abord, parce que son histoire est loin d’être celle de l’icône de la résistance française à l’envahisseur nazi pendant la deuxième guerre mondiale. Ensuite, en terme de longévité au pouvoir, le Général français est loin d’avoir réalisé la moitié de ses performances actuelles, lui qui ne semble pourtant pas encore rassasié du pouvoir. Enfin, l’ex-président français n’a pas contourné une disposition constitutionnelle pour prolonger son bail à la tête de l’Etat, comme lui l’a fait au Congo. Sans oublier qu’on n’est plus au XXè siècle, mais bien au XXIè siècle. Si Denis Sassou Nguesso a envie d’être dans l’air du temps et de voir chanter ses louanges de démocrate accompli, il sait ce qu’il a à faire. Pour l’instant, son histoire jure avec cette réalité. Et c’est chercher à se dédouaner à moindre frais que de vouloir justifier sa longévité au pouvoir par celle d’autres présidents, ou par la méconnaissance des réalités de l’Afrique par ceux qui la jugent de l’extérieur.

Si ce n’est pas de l’égoïsme ou de l’égocentrisme, cela y ressemble fort

Au demeurant, l’on a aussi vu sous nos cieux en Afrique, des chefs d’Etat qui ne se sont pas accrochés de façon morbide au pouvoir, et qui ont su garder toute l’estime et la reconnaissance de leur peuple, à l’image d’un Nelson Mandela en Afrique du Sud. De cela, Sassou Nguesso ne fait pas cas. Pour tout dire, Denis Sassou Nguesso fait partie de cette race de chefs d’Etat africains qui cachent mal leur jeu de fossoyeurs de la démocratie et dont le comportement renvoie plutôt une mauvaise image du continent. Il est temps que ces dirigeants-là cessent de faire croire que ce sont les peuples qui les aiment et qui les réclament, et qu’ils sont là pour les servir. Car, les méthodes grossières – à faire honte à la plus vicieuse des péripatéticiennes-  dont ils usent  pour confisquer le pouvoir, ne sont que le reflet d’une conception patrimoniale du pouvoir qui s’accommode mal des règles élémentaires de la démocratie. Si ce n’est pas de l’égoïsme ou de l’égocentrisme, cela y ressemble fort. Et chercher à présenter les choses comme si leur pouvoir n’a jamais été l’objet de contestation frise quelque peu la mauvaise foi. Et dans le cas du Congo, n’eût été la complicité de François Hollande qui a quelque peu refroidi les ardeurs des combattants de l’alternance opposés à un troisième mandat du natif de Edou, il y a fort à parier que Sassou ne serait pas aussi serein qu’il le paraît aujourd’hui.  Il y a aussi l’exemple du général Mokoko, à qui l’on fait voir en ce moment des vertes et des pas mures  pour une sombre histoire de coup d’Etat,  exhumée depuis qu’il a eu « l’outrecuidance » de vouloir défier dans les urnes l’homme fort de Brazzaville à la prochaine présidentielle. Pourtant, le même Sassou n’a pas hésité un seul instant à renverser un président démocratiquement élu, en la personne de Pascal Lissouba, pour s’accaparer du pouvoir par la force des armes. Est-ce là aussi la volonté du peuple ? Cela dit, on ne peut pas être plus royaliste que le roi, et chaque peuple mérite ses dirigeants. Il appartient au peuple congolais de décider de son sort et de son avenir, et de prendre son destin en main. Libre à lui de le confier à qui il veut, mais encore faudrait-il que les règles du jeu soient équitables et scrupuleusement respectées par tous. En tout état de cause, Sassou gagnerait à faire sienne la maxime selon laquelle « il faut savoir quitter les choses avant que les choses ne vous quittent ».

Outélé KEITA


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