LUTTE CONTRE BOKO HARAM AU NIGERIA :Les moyens financiers seuls ne suffiront pas
Tel un beau diable, le président nigérian, Goodluck Jonathan, se démène dans tous les sens pour se donner les moyens de venir à bout de Boko Haram. En effet, après le SOS lancé en direction de la communauté internationale qui a répondu par l’envoi d’experts civils et militaires et de moyens ultra-modernes dont l’efficacité reste à prouver, le président nigérian a, cette fois-ci, l’intention de recourir à un prêt extérieur d’un milliard de dollars pour renforcer les équipements de l’armée nationale, engagée dans une lutte contre les illuminés de la secte islamiste, Boko Haram. Cette démarche est de bonne guerre, puisque face aux défis que lui posent au quotidien les insurgés de Boko Haram, personne ne peut lui dénier le droit de lever des fonds pour les relever.
Les Talibans demeurent une préoccupation pour la richissime Amérique
L’argent, dit-on, est le nerf de la guerre, et le Nigeria en a certainement besoin pour apporter les réponses appropriées à la problématique de la secte islamiste. Mais les moyens financiers seuls pourraient ne pas y suffire au regard des considérations suivantes.
La première considération est liée au caractère asymétrique de la guerre que livre Boko Haram à l’Etat nigérian. En effet, si les équipements militaires utltra-modernes suffisaient pour vaincre les combattants engagés dans les guerres asymétriques, il y a longtemps que l’on n’entendrait plus parler des Talibans en Afghanistan. Malgré les énormes moyens financiers que l’Amérique a injectés dans sa croisade contre le péril islamiste dans ce pays et les équipements militaires de dernier cri des GI engagés sur le terrain, les partisans du Mollah Omar écument encore l’Afghanistan par des actions d’éclat et osées dont ils sont les seuls à avoir le secret.
Plus de 10 ans après l’offensive des Etats-Unis, les Talibans demeurent une préoccupation face à laquelle la richissime Amérique semble impuissante.
Certes, comparaison n’est pas raison, mais l’on peut être tenté de croire que l’armée de Goodluck Jonathan, même si elle venait à disposer d’équipements militaires de dernière génération acquis à prix d’or, pourrait être amenée à plier l’échine face à Boko Haram.
La deuxième considération qui permet de dire que les moyens financiers extérieurs auxquels le Nigeria a l’intention de recourir pour contrer Boko Haram pourraient ne pas suffire, est liée au fait que Goodluck Jonathan a du mal à obtenir une union sacrée de ses compatriotes autour de sa personne, contre les islamistes de Boko Haram. Dans sa propre famille politique, l’unanimité de ses camarades lui fait cruellement défaut. L’on peut même craindre que cette fracture au sein de la majorité présidentielle, ne conduise le Parlement nigérian à opposer une fin de non recevoir à la demande de Goodkuck Jonathan de recourir à un prêt extérieur d’un milliard de dollars pour équiper son armée. Dans une telle hypothèse, le président aura beau jeu d’exhiber et de stigmatiser le manque de volonté de l’institution parlementaire de l’accompagner dans sa lutte contre Boko Haram.
Il faut des hommes déterminés et convaincus
La troisième considération qui achève de convaincre que les moyens financiers demandés par Goodluck Jonathan peuvent être inefficaces dans sa croisade contre la secte islamiste, est en rapport avec le moral de l’armée nigériane. Aujourd’hui, l’on peut avoir l’impression que les soldats nigérians font preuve de mollesse face à Boko Haram. Or, aucune guerre ne peut se gagner avec des soldats qui ont le moral dans les chaussettes et qui manquent visiblement de patriotisme.
Toutes ces considérations nous amènent à soutenir que les moyens financiers sont certes un facteur important pour gagner une guerre, mais il faut d’abord des hommes déterminés et convaincus que la guerre qu’ils livrent à Boko Haram est une guerre juste dans laquelle ils doivent s’investir sans réserve dans l’intérêt supérieur du Nigeria. Ce sont des hommes qui ont ce profil-là qui semblent manquer aujourd’hui au pays de Goodluck Jonathan. Dans ces conditions, l’on peut même craindre que les équipements militaires que Goodluck Jonathan cherche à acquérir pour renforcer les capacités opérationnelles de l’armée grâce au prêt extérieur, ne soient simplement, un jour, récupérés par Boko Haram pour accroître sa capacité de nuisance. Cette hypothèse peut se défendre surtout dans le Nigeria d’aujourd’hui où la corruption et l’anarchie ont gangréné toutes les institutions de l’Etat, y compris l’armée.
Pousdem PICKOU