HomeA la uneMILITARISATION DE LA POLICE ET DE LA PROTECTION CIVILE AU MALI : Seuls compteront les résultats !

MILITARISATION DE LA POLICE ET DE LA PROTECTION CIVILE AU MALI : Seuls compteront les résultats !


Le 20 octobre dernier, le projet de loi sur la militarisation des fonctionnaires de police et de la protection civile, a été examiné par le Conseil national de transition, structure qui fait office d’assemblée législative pour la période de transition au Mali. L’objectif principal de cette militarisation, à entendre les autorités maliennes, est de permettre le déploiement des policiers dans les zones reprises par l’armée, aux groupes armés. Le caractère opportun du projet ne peut nullement être remis en cause. En effet, le motif invoqué pour justifier cette réforme, à savoir le déploiement du personnel policier et de celui de la protection civile dans les zones libérées par l’armée, de l’emprise des terroristes, s’inscrit dans une logique de cohérence et de bon sens. Il est, en effet, absurde de reprendre des zones aux terroristes, sans faire suivre cela de services après-vente. Et l’on n’a pas besoin d’être un expert en sécurité pour savoir que le service minimum à assurer dans les zones reconquises est d’y déployer immédiatement des forces dont la qualité de la formation et celle de l’équipement, sont suffisamment dissuasives pour décourager toute velléité terroriste de réinvestir les lieux. D’ailleurs, on peut affirmer sans grand risque de se tromper, que l’une des faiblesses majeures de la lutte contre le terrorisme au Sahel, réside dans le manque de service après-vente. Les autorités maliennes ont donc été bien inspirées d’y avoir pensé. Et si la résolution de ce manquement doit passer forcément par la militarisation des fonctionnaires de police et de ceux de la protection civile, pourquoi pas ?

 

 

Au-delà de la police, il faut faire en sorte que l’administration, dans toutes ses composantes, occupe le terrain reconquis

 

 

 En tout cas, les syndicats de la police nationale dans leur ensemble, se disent prêts à apporter leur pierre à la refondation de l’Etat, si cela passe obligatoirement par la militarisation de leur corps. Toutefois, les syndicats déplorent un projet « porté de manière unilatérale ». Ils ont rappelé par ailleurs que « la police est déjà présente sur les théâtres d’opérations » militaires, « sur l’ensemble du territoire national ». En somme, les syndicats militent pour un renvoi du projet afin de mener des discussions préalables susceptibles d’aboutir à un projet consensuel dont les contours seront déjà connus avant l’adoption. Visiblement, ces discussions n’ont pas eu lieu. Car, le projet a déjà été examiné ce jeudi au CNT. Et comme dans l’armée, on adopte les réformes « sans murmures ni plaintes », l’on peut craindre que les préalables formulés par les syndicats de police, soient balayés d’un revers…de godasses par la hiérarchie militaire. Un des effets induits de ce projet, est la dissolution des syndicats de la police. Et cette perspective n’est pas sans provoquer des appréhensions au sein des policiers. En effet, il est difficile à des fonctionnaires qui, en vertu du droit de grève, étaient habitués à battre le macadam et à porter des pancartes incendiaires, réclamant l’amélioration de leurs conditions de vie et de travail, de faire leur mue pour devenir des soldats, du jour au lendemain. En plus donc de faire en sorte que les policiers soient dotés en matériels de guerre susceptibles de casser du terroriste, il est impératif de leur inculquer aussi des valeurs dont seuls les militaires semblent avoir le secret. Et l’une d’elles est d’obéir et d’exécuter les ordres sans « murmures ni plaintes ». En tout cas, tout ce qui compte pour le peuple malien, lui qui, pendant une décennie souffre des méfaits du terrorisme, c’est la paix et la sécurité. Au-delà donc du déploiement de la police, pour occuper les zones libérées, il faut faire en sorte que l’administration, dans toutes ses composantes, occupe le terrain reconquis, car la nature a horreur du vide. En tout cas, seuls compteront les résultats. Les Maliens et les Maliennes, de ce point de vue, évalueront le bien-fondé de ce projet à l’aune des résultats engrangés sur le terrain. Tout le reste n’est que discours et bonnes intentions. Au cas où cette militarisation de la police porterait des fruits, l’on peut parier que l’expérience fera des émules du côté de Ouagadougou ou encore de Niamey. En effet, au Burkina comme au Niger, la collaboration entre militaires et policiers passe difficilement. Les premiers traitant les seconds avec un complexe de supériorité. De ce fait, les soldats estiment, à tort ou à raison, que les policiers ne méritent pas de posséder certaines armes de guerre. Ces préjugés ne facilitent pas la synergie des actions de ces deux corps. Une militarisation donc de la police, bien pensée, dans ces deux pays, pourrait contribuer à déconstruire ces préjugés et in fine, à augmenter l’efficacité de la lutte contre le terrorisme. Et c’est ce à quoi aspirent véritablement les populations du Sahel.

 

Pousdem PICKOU

 


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