HomeA la uneMINI TOURNEE D’ANGELA MERKEL ET THERESA MAY

MINI TOURNEE D’ANGELA MERKEL ET THERESA MAY


 L’Afrique, la nouvelle coqueluche !

La chancelière allemande, Angela Merkel, a entamé, hier,  29 août 2018, au pas de course,  une tournée ouest- africaine qui devrait l’amener, après la courte escale sénégalaise, au Ghana et au Nigeria. En revenant une deuxième fois sur le continent après sa première visite qui l’avait successivement conduite au Mali, au Niger et en Ethiopie en octobre 2016, la cheffe de l’Exécutif allemand ne fait plus mystère de ses ambitions en Afrique. Elle entend donner un nouvel élan à la diplomatie africaine de l’Allemagne, à des fins d’intensification des échanges économiques avec le continent noir. Et c’est dans cette perspective qu’elle a fait le déplacement avec une forte délégation d’hommes d’affaires qui ont pour mission de scruter le tissu économique des pays visités pour élargir l’horizon des entreprises allemandes.

Après avoir été éconduite comme une malpropre du continent et dépouillée de ses colonies consécutivement à sa défaite lors de la Première Guerre mondiale (1914-1918), l’Allemagne tente donc à nouveau de reprendre pied en Afrique. « Autres temps, autres mœurs », peut-on dire. Car, ce retour annoncé ne se fait plus par l’art militaire comme il en avait été décidé lors du Congrès de Berlin (1884-1885) convoqué par le Chancelier Bismarck et qui avait décidé du partage de l’Afrique, mais plutôt par l’arme de la séduction.

Le pays d’Adenauer joue bien la fibre du sentiment

Et il faut le dire, l’Allemagne a de beaux atours : elle est aujourd’hui la première économie européenne et a l’avantage de ne s’être pas trop immiscée dans les affaires politiques africaines. Et autre élément qui pourrait avoir son pesant d’or dans cette cour assidue que l’Allemagne fait à l’Afrique, le pays d’Adenauer joue bien la fibre du sentiment. En effet, un siècle après leur extermination et au moment où la chancelière parcourt le continent, l’Allemagne, dans un geste de réconciliation, a restitué hier, à la Namibie, les restes des Hereros et Namas, victimes de génocide pendant l’occupation coloniale allemande. En rappel, suite à la révolte, en janvier 1904, des tribus hereros confinées dans des zones tribales par la colonisation et qui s’était soldée par la mort de 123 colons allemands, l’Allemagne avait déployé une impitoyable machine de répression contre ces peuples, finalement contraints de se réfugier dans le désert du Kalahari où bon nombre d’entre eux ont péri de faim et de soif. L’on estime le bilan à 60 000 morts sur une population de 80 000 âmes. C’est aussi en Namibie, ex-Sud-Ouest africain allemand, que le gouvernement allemand a expérimenté ses techniques d’extermination massive et s’approvisionnait en crânes pour des études anthropologiques destinées à prouver la supériorité de la race blanche. C’est dire si par la symbolique de restitution des ossements, l’Allemagne, sans assumer clairement son passé colonial, tente de rentrer dans les bonnes grâces des Africains, en multipliant les gestes de bonne volonté.

La nouvelle offensive diplomatique de la chancelière allemande intervient à un moment où l’Afrique fait l’objet de toutes les convoitises en raison de sa richesse en matières premières,  de son vaste marché de consommation et de l’abondance de sa main- d’œuvre bon marché.

L’occasion est plus que jamais bonne pour le continent

En témoigne la tenue, dans les prochains jours, dans la capitale chinoise, du 3e Forum sur la coopération sino-africaine (FCSA). Participe aussi de cette nouvelle ruée vers l’Afrique, la visite en cours de la Première ministre britannique, Theresa May, qui, comme Angela Merkel, ne cache pas ses ambitions en Afrique. En effet, devant un parterre d’hommes d’affaires rassemblés au Cap, en Afrique du Sud, elle a affiché l’ambitieux objectif de voir le Royaume-Uni devenir le premier investisseur des pays du G7 en Afrique d’ici à 2022. C’est donc un « come-back » de l’Angleterre en Afrique, qui est aussi annoncé. Et pour être exhaustif dans la liste des visites sur le continent, l’on annonce pour bientôt aussi, l’arrivée de Madame Trump.

Cela dit, la question que l’on peut se poser est de savoir si l’Afrique, la nouvelle coqueluche des puissances économiques mondiales, est consciente de sa puissance d’attraction et si elle est prête à tirer profit de sa nouvelle situation. La réponse n’est pas évidente, tant les réalités sont disparates d’un pays à l’autre. Un rapide coup d’œil sur la cartographie des visites sur le continent, montre que tous les pays ne partent pas avec les mêmes atouts et le parent pauvre reste l’Afrique francophone qui, visiblement, n’est pas encore dans l’air du temps. Seul le Sénégal a eu droit aux égards d’Angela Merkel en un passage éclair et ce, pour des questions politiques, même si la coopération économique n’a pas été occultée.  Il y a donc des efforts à faire par le continent, pour profiter pleinement de son nouveau soleil.  Cela passe nécessairement par l’instauration d’une gouvernance économique et politique vertueuse et par un leadership fort et éclairé, qui  oblige les Occidentaux à investir massivement dans les secteurs-clés de l’économie africaine afin que la plus-value des richesses naturelles reste et serve aux Africains. L’occasion est, en tout cas, plus que jamais bonne pour le continent de déconstruire l’image de réservoir de matières premières à piller et de dépotoir pour produits manufacturés.

« Le Pays »   


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