HomeA la uneMUNICIPALES EN AFRIQUE DU SUD : Vers une bérézina de L’ANC ?

MUNICIPALES EN AFRIQUE DU SUD : Vers une bérézina de L’ANC ?


Répondant dès 7h à la convocation du corps électoral fort  de plus de 26 millions d’électeurs, les Sud-Africains n’ont pas marchandé leur présence dans les isoloirs pour désigner ceux qui devraient localement présider à leur destinée. En attendant que ces urnes livrent leurs secrets, le baromètre politique laisse envisager l’éventualité plus que forte d’une reconfiguration de la scène politique au niveau local, avec la perte annoncée de plusieurs grandes métropoles par l’ANC, aux commandes de la plupart des 278 villes depuis la fin de l’apartheid. En toile de fond de cette déculottée annoncée pour le parti majoritaire, l’effet conjugué du désamour entre de nombreux électeurs et le parti, et  la stratégie politique de l’opposition. Depuis la retraite politique de Nelson Mandela, en effet, la fracture entre l’ANC et la base n’a cessé de s’agrandir. En cause, l’échec de la politique sociale et économique du parti et les nombreuses frasques du président Jacob Zuma, aveuglément soutenu par le parti. En effet, la nation arc-en-ciel, confrontée à de grandes difficultés économiques, est au bord de la récession ; en témoigne le  chômage qui  bat des records (26,7% au niveau national avec des pics de près de 36 % dans certaines villes comme Port Elizabeth) ou encore la dépréciation du Rand. Elle est de ce fait sujette à des spasmes sociaux marqués par des revendications salariales souvent insatisfaites et réprimées dans le sang comme ce fut le cas à Marikana, jetant ainsi le froid sur les relations entre l’ANC et son bras social, la puissante COSATU. La gouvernance ANC perpétue de fait l’apartheid que le parti a combattu, trahissant non seulement ainsi la mémoire de tous ceux qui sont tombés sur les champs de bataille de la lutte contre cette injustice,  mais aussi les espoirs de l’immense majorité des Sud-Africains  qui avaient vu dans l’accession du parti au pouvoir, la fin des injustices sociales. Pendant ce temps, le président Zuma ravit la palme des scandales en nageant dans toutes les eaux boueuses de la République : détournements, corruption, affairisme, affaires de fesses, etc.

Il faut compter avec les achats de conscience et les votes ethniques

Autre source des pépins annoncés pour l’ANC : la stratégie politique de l’opposition politique. Pour mettre fin à l’hégémonie politique de l’ANC, elle n’exclut  pas le recours à des coalitions pendant qu’elle mène un travail de sape des esprits en versant dans le symbolisme. Le leader du principal parti de l’opposition, Mmusi Maimane, n’hésite plus à disputer à l’ANC l’héritage de Nelson Mandela  tandis que le charismatique Julius Malema, lui, surfe sur les divisions au sein du parti majoritaire où pro et anti Zuma se livrent à une guerre des tranchées. Il a ainsi rendu visite à l’ex-président sud-africain, Thabo Mbeki, qui avait démissionné en 2008, après avoir été désavoué par l’ANC et l’a invité à voter pour son parti,  les Combattants pour la liberté économique (EFF). Mais tout cela est-il suffisant pour un rejet de l’ANC par l’électorat ? Rien n’est moins sûr en raison du poids de l’histoire et ce, dans un contexte africain où les motivations du choix des électeurs obéissent très souvent à des critères autres que politiques. L’histoire sud-africaine confère, en effet, à l’ANC une légitimité qui cristallise encore dans un certain conservatisme le vote d’une grande partie de l’électorat. Les générations qui ont connu les affres de l’apartheid, lui vouent encore une grande dévotion. A cela, il  faut adjoindre le poids de l’emblématique Nelson Mandela dont l’image reste indissociable de l’ANC. En plus du poids de l’histoire, il convient de garder aussi en mémoire que l’Afrique du Sud, malgré le label démocratique qui lui est reconnu, évolue au Gondwana, un continent où les pratiques sont très contagieuses. Ne dit-on pas bien à propos que  «  les oiseaux de même plumage rament ensemble » ? Il faut donc compter avec les achats de conscience et les votes ethniques. Et l’ANC,  dont les leaders avec en tête Zuma lui-même ont fait la preuve de leur vacuité morale, n’hésitera pas à y faire recours.

 

SAHO


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