NOUVEAU MASSACRE TERRORISTE AU NIGER
A peine sorti du deuil décrété suite à la mort de 66 personnes sauvagement tuées à Tillaberi, dans la zone des trois frontières entre le Niger, le Mali et le Burkina Faso, le 15 mars dernier, le Niger a encore mis, le 23 mars dernier, ses drapeaux en berne et ce pour trois jours, plongé qu’il est à nouveau dans la douleur de la perte de 137 personnes massacrées, deux jours plus tôt, dans plusieurs villages et campements de la région de Tahoua, près de la frontière malienne. Que se passe-t-il donc au pays du Ténéré qui connaît, ces derniers temps, une recrudescence des actes de violences contre des populations civiles, avec des chiffres (plus de 200 morts en une semaine) qui font froid dans le dos ? Que ce soit l’œuvre de « bandits armés » comme le soutient le gouvernement nigérien dans son communiqué, ou de terroristes comme l’on est porté à le croire, Mohamed Bazoum, le nouveau président élu du pays, qui attend d’être investi le 2 avril prochain, sait à quoi s’en tenir, avec ces massacres à grande échelle qui sonnent comme un accueil sanglant pour un début de mandat qui ne s’annonce pas comme une sinécure. Car, quel qu’ait pu être son programme de campagne, le défi sécuritaire semble s’imposer de fait à lui comme la priorité des priorités.
Ces massacres odieux sonnent comme une interpellation du Niger à repenser le maillage sécuritaire et la stratégie de lutte contre les forces du mal
D’autant que dans le cas d’espèce, il s’agit de tueries en masse de populations civiles sans défense, au moment où le pays est pris dans l’engrenage des attaques terroristes sur fond de conflits intercommunautaires. Toute cette barbarie se déroule au moment où le Niger s’apprête à vivre la première dévolution pacifique du pouvoir entre deux présidents élus, sur fond de crise post-électorale persistante malgré le récent verdict sans appel de la Cour constitutionnelle en faveur du natif de Diffa. Ceci aurait-il entraîné une baisse de vigilance qu’on lierait à la parenthèse de l’élection présidentielle et à la vulnérabilité actuelle du pays face aux groupes armés aux desseins obscurs, qui écument la sous-région ? Ou bien faut-il voir dans ces attaques meurtrières récurrentes, une réponse au dernier sommet du G5 Sahel de N’Djamena, qui a décidé de concentrer les efforts de lutte contre le terrorisme dans le « triangle de la mort », c’est-à-dire dans la zone concernée ? Quoi qu’il en soit, ces massacres odieux sonnent comme une interpellation du Niger à repenser le maillage sécuritaire et la stratégie de lutte contre les forces du mal. Car, on se demande si l’armée nigérienne tire véritablement leçon de ces massacres à répétition qui semblent obéir au même mode opératoire, surtout s’il s’avère que dans leur stratégie, les assaillants attendent presque toujours le départ des patrouilles des Forces de défense et de sécurité (FDS) avant de passer à l’action. Et dans le cas d’espèce de ces deux attaques particulièrement meurtrières en moins d’une semaine, le fait que les terroristes aient pu revenir aussi vite et facilement à la charge pour frapper durement malgré la convocation d’un Conseil de défense, interroge fortement sur la capacité de riposte du pays au regard de la vaste étendue de son territoire.
De toute évidence, la bête immonde semble avoir gardé toute sa capacité de nuisance
C’est dire si le président Bazoum aura du pain sur la planche pour ramener la sérénité au sein des populations. Au-delà, ces attaques sont une interpellation aux acteurs politiques nigériens à vite refermer la parenthèse de la contestation électorale. Principalement, le candidat malheureux, Mahamane Ousmane, qui est visiblement engagé dans un combat perdu d’avance, mais qui contribue à fragiliser le pays. C’est pourquoi, à défaut de reconnaître sa défaite, l’ex-chef d’Etat devenu opposant devrait faire preuve de patriotisme en faisant montre d’empathie vis-à-vis de son peuple meurtri. Autrement, c’est une vilaine image que le Niger renvoie à l’extérieur, de voir des politiciens s’étriper pour le pouvoir au moment où le peuple suscite la compassion d’autres nations dans le double deuil qui le frappe. Cela dit, ce qui se passe au Niger doit non seulement amener les autres pays de la sous-région à garder l’arme au pied, mais aussi et surtout les forces coalisés engagées dans la lutte contre le terrorisme dans la sous-région, à se mobiliser davantage pour éliminer cette menace sécuritaire permanente qui est rédhibitoire au développement. Car, de toute évidence, la bête immonde est loin d’être vaincue. Pire, au moment où on la croyait mortellement touchée au Sahel, elle semble avoir gardé toute sa capacité de nuisance. Particulièrement dans ces territoires perdus au fond du désert, qui passent pour être le ventre mou de la lutte contre le terrorisme dans la sous-région ouest-africaine. A quand donc la fin de la comptabilité macabre ? Bien malin qui saurait répondre à cette question.
« Le Pays »