POLEMIQUE AUTOUR DES RESULTATS DE LA PRESIDENTIELLE BISSAU-GUINEENNE:A quoi joue la Cour suprême ?
Un arrêt confusionnel qui provoque un imbroglio judiciaire. C’est le moins que l’on puisse dire de l’avis que vient de rendre la Cour suprême sur les résultats de la présidentielle du 29 décembre dernier en Guinée-Bissau. En effet, après avoir rejeté les recours du candidat du PAIGC (Parti africain pour l’indépendance de la Guinée et du Cap vert), l’instance judiciaire suprême exige une « vérification » du procès-verbal global par la Commission nationale des élections. De quoi apporter de l’eau au moulin du candidat perdant, c’est-à-dire Domingos Simoes Pereira qui, au lendemain de la proclamation des résultats, dénonçait déjà des fraudes électorales. Pour lui, c’est clair : la Cour suprême demande un recomptage des voix à partir des procès-verbaux régionaux. « C’est une folie », répond, pour sa part, le camp de Umaru Sissoco Emballo déclaré vainqueur et pour qui « le recomptage des votes n’est pas prévu par la loi ». Et d’ajouter : « Le candidat du PAIGC veut être président à tout prix. Il veut faire croire à un imbroglio entre la Commission nationale électorale et la Cour suprême. La seule instance autorisée à se prononcer sur les résultats définitifs, est la commission nationale électorale. Aucune autre instance n’est habilitée à proclamer le vainqueur ». Vous l’aurez donc compris. L’arrêt de la Cour suprême a créé plus de problème qu’il n’en a résolu.
Jamais l’on avait déjà vu des « grands juges » semer le doute dans l’esprit des électeurs
Ce qui fait craindre le réveil des vieux démons dans un pays comme la Guinée-Bissau où tout est prétexte à coup d’Etat. En tout cas, la question que tout le monde se pose est la suivante : à quel jeu joue la Cour suprême ? Car, elle voudrait créer l’impasse et la confusion en Guinée-Bissau, qu’elle ne s’y prendrait pas autrement. Toute chose qui ne l’honore pas en tant qu’instance devant trancher les litiges électoraux. On a déjà vu des Cours suprêmes/constitutionnelles annuler des scrutins comme ce fut le vas au Kenya et aux Comores, mais jamais l’on avait déjà vu des « grands juges » semer le doute dans l’esprit des électeurs au lendemain d’un scrutin. Cela est d’autant plus déplorable que ces élections qui se voulaient ouvertes, étaient censées ramener la Guinée- Bissau sur les rails de la démocratie en ce sens qu’elles offraient l’occasion d’une alternance pacifique. Mais hélas ! Du reste, il faut rappeler que la sortie de la Cour suprême intervient après que la Commission nationale des élections, habilitée à proclamer les résultats définitifs, a confirmé la victoire de Umaru Sissoco Emaballo qui, sans trop attendre, a déjà enfilé la tunique de chef d’Etat. Si fait qu’après la tournée régionale qui l’avait conduit au Nigeria et au Congo-Brazzaville, Umaru Sissoco Emballo s’est envolé pour le Portugal où il a été reçu avec tous les honneurs dus à son rang. Faut-il dire que le processus est désormais irréversible ? On attend de voir.
Boundi OUOBA