POURPARLERS INTERMALIENS :Le bout du tunnel est encore lointain
Le deuxième round des pourparlers intermaliens débute, en principe, ce lundi 1er septembre 2014, à Alger. L’on se souvient que le premier round avait vite tourné court, en raison de divergences de vue au sein des groupes armés du Nord-Mali. Cette fois-ci, l’on peut croire que les choses iront plus vite, puisqu’après 4 jours de discussions laborieuses à Ouagadougou, six groupes politico-militaires du septentrion ont pu accorder leurs violons pour présenter un front face au gouvernement malien. C’est dans ce contexte qui pourrait inviter à l’optimisme, qu’un nouveau groupe armé, dénommé le Mouvement populaire pour le salut de l’Azawad (MPSA), est apparu dans le Nord du Mali. Au rythme où vont les choses, l’on peut parier que le MPSA, qui est sorti des flancs du MAA (Mouvement arabe de l’Azawad), risque de ne pas mettre un terme au printemps des groupuscules armés dans cette partie du Mali. L’on pourrait, dans ces conditions, s’interroger sur les motivations réelles de ces mouvements, qui n’en finissent pas de proliférer depuis le début de la crise malienne.
La création à la pelle de mouvements cache mal une volonté de maintenir le statu quo
La question est d’autant plus pertinente que cette kyrielle de groupuscules, dont certains pourraient réunir tous leurs partisans dans une cabine téléphonique, se rejoignent tous sur la question d’une plus grande autonomie de l’Azawad, dans le cadre d’un Mali uni, du moins officiellement. Ce foisonnement de groupes armés dans le Nord du Mali, dont tous brandissent l’étendard « Azawad » pourrait être décrypté en réalité comme une volonté des acteurs de faire perdurer une crise dont ils se servent comme d’une véritable rente viagère. Si on n’y prend garde donc, la recherche de la paix au Nord-Mali, pourrait s’apparenter à une épreuve qui consiste à remplir un tonneau sans fond.
L’on a beau multiplier les pourparlers, ce tonneau des Danaïdes ne sera jamais rempli. De ce point de vue, l’on peut dire que le bout du tunnel est encore lointain. En effet, la résolution définitive de la crise signifierait la fin des privilèges indus et des trafics illicites de tous genres, dont les seuls bénéficiaires sont les leaders de tous ces groupuscules qui écument aujourd’hui le Nord du Mali. Le moins que l’on puisse dire par conséquent, est que la création à la pelle de mouvements politico-militaires dans le septentrion malien, cache mal une volonté de maintenir le statu quo. En se posant simplement la question de savoir à qui profite ce statu quo, l’on peut être tenté de dire qu’il profite avant tout à tous ces hommes enturbannés dont le gîte et le couvert sont assurés par la communauté internationale. C’est pourquoi, l’on peut avoir des raisons d’être pessimiste quant à l’issue des pourparlers intermaliens d’Alger. Un autre élément, qui peut amener à désespérer de la rencontre d’Alger, se rapporte au contenu qu’il va falloir donner à l’idée d’autonomie de l’Azawad, sur laquelle tous les groupes armés semblent faire l’unanimité. En effet, quand on connaît les circonstances historiques dans lesquelles le Mouvement national de libération de l’Azawad est né, quand on connaît ses revendications originelles, l’on peut parier qu’il sera très difficile de placer une frontière entre l’indépendance de l’Azawad, que le MNLA a dû abandonner à son corps défendant et l’autonomie de l’Azawad, préconisé aujourd’hui par tous les mouvements armés du Nord-Mali.
Il faut souhaiter que l’Algérie puisse aider les frères ennemis maliens à enterrer la hache de guerre
Cette question de l’autonomie du septentrion malien, risque de donner du grain à moudre à des irrédentistes touaregs et arabes qui ne se sont jamais en réalité départis de leur revendication initiale : la sécession du septentrion malien.
Cela dit, le seul acteur qui pourrait tirer les marrons du feu, dans ces pourparlers intermaliens, est l’Algérie. Non seulement, elle a réussi, peut-on dire, à imposer sa médiation dans la crise malienne, mais aussi à obtenir la libération de ses diplomates qui étaient entre les mains des djihadistes du Mouvement pour l’unicité du jihad en Afrique de l’Ouest (MUJAO).
Cette libération, dans des circonstances qui gardent tous leurs mystères, qui intervient à la veille du deuxième round des pourparlers, et après l’élargissement inattendu de l’ancien « coupeur de bras » de Tombouctou, pourrait laisser croire à un arrangement entre Alger et certains cadres repentis du MUJAO, que le MNLA notamment a recyclés pour les rendre plus fréquentables aux yeux de la communauté internationale. Pour toutes ces raisons, l’on peut dire que le deuxième round des pourparlers d’Alger s’ouvre dans un contexte où de nombreuses questions demeurent sans réponse. Toutefois, il faut souhaiter que l’Algérie, qui n’est pas à sa première médiation dans la crise qui secoue le septentrion malien depuis l’époque de Modibo Keïta, puisse, cette fois-ci, aider les frères ennemis maliens à enterrer définitivement la hache de guerre.
« Le Pays »