POURPARLERS INTERMALIENS :Des couacs qui étaient prévisibles
A peine ont-ils démarré que les pourparlers intermaliens à Alger prennent du plomb dans l’aile. En effet, certains groupes ne voient pas d’un bon œil la présence d’autres groupes autour de la table de négociation. Pour eux, ces groupuscules sont illégitimes car trop proches de Bamako qu’ils accusent, du reste, de les avoir suscités pour brouiller la lisibilité des pourparlers. Il y a aussi d’autres mouvements comme le Mouvement national de libération de l’Azawad (MNLA), qui estiment que le train du dialogue va trop vite. Et qui n’ont pas manqué de le faire savoir.
Il est préférable que tous les groupes fréquentables soient associés
Mais pouvait-il en être autrement quand on sait que les groupes du Nord-Mali sont allés à Alger en rangs dispersés? Ces couacs étaient donc prévisibles. De fait, on se rappelle qu’avant l’entame de ces pourparlers, les maîtres de Kidal avaient lancé un appel aux autres groupes à rejoindre le trio MAA, HCUA et MNLA. Un appel qui avait été très mal accueilli par certains groupes qui l’avaient considéré comme un affront. N’ayant donc pas réussi à faire le consensus en leur sein, à parler d’une seule voix avant de prendre langue avec Bamako, ces groupes ne pouvaient que se regarder en chiens de faïence à Alger. On peut, d’une certaine manière, comprendre la frustration de ceux qui remettent en cause la légitimité d’autres groupes. Certes, il est difficile de composer avec des acteurs qui n’avaient pas pris part aux différents rounds de négociations à Ouagadougou, qui ont abouti à des accords ayant permis au Mali d’être aujourd’hui debout, mais aussi au MNLA de jouir d’une certaine légitimité. Certes, on peut qualifier certains acteurs, au regard de leur importance sur le terrain, de groupions. Mais dans le souci d’aboutir à des accords qui soient acceptés de tous et qui permettent au Mali de retrouver sa stabilité, il est préférable que tous les groupes fréquentables soient associés, comme l’indiquent d’ailleurs les termes des pourparlers. Le MNLA ne devait donc pas s’étonner de voir cette flopée de groupes dont beaucoup viennent de ses entrailles. Ce mouvement devrait surtout faire preuve de bonne foi car en accusant Bamako d’aller vite en besogne, on peut se demander si son intention n’est pas de faire traîner les négociations.
Le risque d’un retour à la case départ est grand
Fort de son avantage sur le terrain, ce mouvement pourrait être tenté de dicter la marche et la démarche à suivre. Tant que le schéma des pourparlers restera inchangé, le MNLA ne devrait pas trouver à redire, vu que, dans ce cas, le rythme des travaux est celui auquel il était préparé. Reste que quand on vient à une table de négociation pour trouver des solutions à un problème aussi vieux que celui du Nord-Mali, on ne peut jamais en prévoir l’issue. En tous les cas, il appartient aux groupes du Nord-Mali de trouver un modus vivendi afin de présenter une plate-forme commune et cohérente à Bamako.
Cela dit, on ne peut non plus absoudre à bons comptes le locataire du palais de Koulouba qui pourrait avoir suscité à dessein la naissance de certains mouvements dans la perspective de la réunion d’Alger. Cela risque d’être contre-productif. Si Bamako tient à une paix durable, il faudra tôt ou tard trouver une solution définitive au problème du Nord qui n’a d’ailleurs que trop duré. En attendant que les acteurs se ressaisissent, on peut, sans risque de se tromper, affirmer que ces pourparlers se déroulent dans un climat de suspicion et d’incertitudes. Et on ne serait étonné outre mesure si ces pourparlers de paix venaient à accoucher d’une souris car ce ne serait pas la première fois que les mouvements irrédentistes du Nord-Mali et Bamako signent des accords inopérants en Algérie. En tout cas, le risque d’un retour à la case départ est grand.
Dabadi ZOUMBARA