HomeA la unePOURSUITES JUDICIAIRES CONTRE L’EX-PRESIDENT SUD-AFRICAIN : Zuma récolte ce qu’il a semé

POURSUITES JUDICIAIRES CONTRE L’EX-PRESIDENT SUD-AFRICAIN : Zuma récolte ce qu’il a semé


Depuis sa démission forcée le 14 février dernier de ses fonctions de président de la République et du parti au pouvoir, c’est une avalanche de tuiles judiciaires qui s’amoncellent autour de Jacob Zuma, en raison de sa gestion kleptocratique des affaires de l’Etat durant les 9 ans qu’il a trôné à la tête de l’Afrique du sud. La ribambelle de scandales qui ont salement écorné l’image de son pays et de son parti ont pour noms, viol, corruption, abus de position dominante, clientélisme, enrichissement illicite et nous en oublions. L’ex-président sud-africain avait pu, pendant toutes ces années, se jouer de la Justice grâce au soutien de sa formation politique, l’African national congress (ANC) qui ne voulait pas voir l’une de ses figures historiques traînée dans la gadoue ou livrée au lynchage d’une opposition bien déterminée à mettre un terme à l’hégémonie de ce parti ultra dominant. Maintenant que l’ANC lui-même, pour des raisons politiques et électoralistes, a demandé et obtenu sa démission de la tête de l’Etat, il est évident que l’ancien pensionnaire du pénitencier de Robben Island aux côtés de Nelson Mandela, ne pourra plus compter sur ses nombreux réseaux étatiques qui l’avaient plus d’une fois sorti du bourbier judiciaire. Sa situation est d’autant plus incertaine que son successeur et camarade de lutte anti-apartheid, Cyril Ramaphosa, a axé son programme de gouvernement sur la lutte contre la corruption, les passe-droits et sur la reddition des comptes, quelle que soit la personne mise en cause. Et comme pour joindre l’acte à la parole ou aux promesses de Cyril Ramaphosa, le parquet sud-africain a décidé de relancer, moins d’un mois après sa démission, les accusations portant sur des pots-de-vin que Jacob Zuma aurait touchés dans un contrat d’achat d’armes signé avec un groupe français, Thales en l’occurrence.

Jacob Zuma est plus à invectiver qu’à plaindre

Tenez-vous bien, 783 versements avaient été effectués à la fin des années 90 au profit de l’insatiable Zuma dans le cadre de cette transaction avec le groupe français, mais l’insubmersible président s’était tiré d’affaire en obtenant l’abandon des poursuites pour vice de forme. Mais extraordinaire ironie de l’histoire, c’est ce dossier puant la corruption qui avait paradoxalement accéléré sa prise du pouvoir, qui risque aujourd’hui de lui ouvrir le chemin de l’enfer, puisque c’est désormais presque sûr que Jacob Zuma va répondre de ses actes devant les juges, avant de rallier probablement la prison pour y rejoindre son ex-conseiller économique, condamné dans le cadre de la même affaire à 15 ans de réclusion criminelle. Même s’il garde toujours des soutiens au sein de son parti, notamment les militants de l’ANC canal historique, il sera difficile au soldat Zuma de sortir blanchi de la saga judiciaire qui s’annonce, simplement parce que d’autres affaires aussi compromettantes les unes que les autres, attendent d’être enrôlées ou rouvertes pour demander des comptes à ce président aux multiples frasques. On pourrait citer ses liens « bizarroïdes » avec une fratrie d’hommes d’affaires indiens, les Gupta, qui ont permis à ces derniers de faire main basse sur les ressources publiques, ainsi que les faramineuses dépenses qu’il a engagées au frais du contribuable pour rénover sa résidence privée dans son village natal et dont le dossier n’a pas été totalement vidé ; on n’oubliera pas évidemment cette rocambolesque histoire de viol sur une femme séropositive au milieu des années 2000, qui pourrait connaître un rebondissement, maintenant que le « roi Zoulou » est nu. Même s’il clame son innocence et dénonce l’attitude des responsables de l’opposition, de la société civile et de certains de ses camarades de l’ANC qui consiste à chercher des poux sur son crâne rasé, Jacob Zuma risque de finir sa vie politique par là où il l’avait commencée, c’est-à-dire en prison, même si ce serait pour des motifs différents. Mais n’allons pas vite en besogne, car les procédures judiciaires sont souvent longues et au regard de l’âge avancé de l’homme (75 ans), il ne faut pas exclure la possibilité qu’il tire sa révérence sans répondre de ses présumés actes. Il ne faut pas non plus oublier qu’il y a eu de longues tractations entre les premiers responsables de l’ANC et l’ex-président avant qu’il ne rende le tablier, et il se pourrait que des promesses de retraite paisible aient été faites à cet adepte de la démesure afin d’éviter l’implosion du parti au sein duquel il a toujours des affidés. En tant qu’ancien baroudeur de l’ANC, il est difficile d’imaginer Jacob Zuma complètement lâché par les siens aussi longtemps que ces derniers seront au pouvoir, et c’est pour cela qu’un troisième scénario peut être envisagé, celui de le voir gracié par le président en exercice, en cas de condamnation par la Justice sud-africaine. Quoi qu’il en soit, c’est une sortie de scène mouvementée et pour le moins humiliante pour celui qui avait fait rêver ses compatriotes et surtout, pour celui qui avait reçu la caution morale de l’icône planétaire, Nelson Mandela, pour présider aux destinées de l’Afrique du sud. Mais à vrai dire, Jacob Zuma est plus à invectiver qu’à plaindre d’autant qu’il ne récolte que ce qu’il a semé, c’est-à-dire les dossiers judiciaires et le déshonneur après avoir pris trop de liberté avec la morale, dans tous les sens du terme.

Hamadou GADIAGA


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