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PRESIDENTIELLE AU CONGO  


Après trente-six ans de pouvoir, le président congolais, Denis Sassou Nguesso, 77 ans, est encore sur la ligne de départ de la course à sa propre succession pour un énième mandat, à la faveur de la présidentielle du 21 mars prochain. Pour un pays qui se dit démocratique, on se demande si le Congo n’est pas finalement l’otage de Sassou qui refuse de faire valoir ses droits à la retraite après près de quatre décennies de pouvoir, dans une alternance piégée par des institutions qu’il manipule à sa guise et au gré de ses intérêts. Pendant ce temps, l’opposition est réduite à sa plus simple expression  quand la prison et l’oppression ne servent pas d’épouvantails pour décourager les plus téméraires de ses adversaires politiques qui osent le défier dans les urnes. Ce n’est pas le général Jean Marie Michel Mokoko  qui dira le contraire ; lui, le candidat malheureux de la présidentielle de 2016 qui a contesté la victoire du maître de Brazzaville et a fini par se retrouver derrière les barreaux.

 

Le mal du Congo, c’est la mal gouvernance

 

Pour le vote de dimanche, six sparring-partners accompagnent le chef de l’Etat congolais dans ce scrutin aux allures de mascarade électorale quinquennale organisée sur les rives du fleuve Congo pour sauver les apparences d’une démocratie de façade, qui cache mal les dessous d’une dictature parmi les plus féroces du continent africain ; l’homme à la rancune tenace étant connu ne pas faire de quartier à ses adversaires. Lors des  derniers moments de sa campagne, l’homme fort de Brazzaville n’a pas jugé nécessaire de monter lui-même au créneau, se contentant de faire parler ses « nègres de service ». C’est à se demander si dans son for intérieur, le président Sassou n’a pas honte de son bilan après tant d’années d’exercice du pouvoir. En tout cas, c’est l’impression qu’il peut donner, d’en avoir tellement honte qu’il préfère laisser d’autres parler à sa place, pour défendre l’indéfendable au nom d’intérêts purement œsophagiques. Autrement, comment comprendre, de la part de son porte-parole de ministre,  la comparaison osée, avec l’Allemagne d’Angela Merkel pour justifier la volonté de Sassou de s’éterniser au pouvoir au Congo ? C’est oublier peut-être qu’en Allemagne, les libertés sont garanties, contrairement au Congo qui présente plutôt les caractéristiques d’un régime autoritaire, avec des institutions et une armée complètement à la solde du prince régnant. Et puis, la Chancelière allemande n’est pas sous le coup d’accusations de « biens mal acquis », contrairement au président congolais qui figure en bonne place sur la short-list des présidents africains accusés de s’enrichir indûment avec leurs proches pendant que leurs compatriotes meurent de faim ou de maladies et croupissent dans la misère comme c’est le cas du Congo qui regorge pourtant de très grandes richesses naturelles et minières. Disons-le tout net, le mal du Congo, c’est la mal gouvernance.  Et si seulement Sassou aimait son pays, il se serait gardé de briguer un autre mandat!

 

Tant que Sassou vivra et ne sera pas rassasié de pouvoir, aucune perspective d’alternance ne sera envisageable au Congo

 

Car, trente-six ans à voir la même tête au sommet de l’Etat pour toute une génération de Congolais sans réelles perspectives d’avenir, et sans que le sort des populations à la base ne s’améliore, il faut être Denis Sassou Nguesso pour le faire et chercher encore à conquérir la confiance du peuple à travers des projets de société dont les réalisations dépassent rarement le stade des belles maquettes. C’est pourquoi le président congolais ne saurait s’enorgueillir d’un  bilan qui est loin d’être flatteur à bien des égards, pour un pays qui vit aujourd’hui pratiquement en apnée économique au point que les institutions financières internationales ne voulaient même plus lui prêter de l’argent. Si le Congo n’avait pas été un Etat mais une entreprise, il y a longtemps qu’il aurait baissé pavillon et mis la clé sous le paillasson. C’est pourquoi l’on est porté à se demander ce que peut encore faire le président Sassou pour le bien-être de ses compatriotes en cinq ans, qu’il n’ait pu réaliser en trente-six ans de règne. C’est aussi pourquoi il est temps que « l’Empereur » comme le surnomment certains de ses pairs africains, songe à libérer les Congolais qui semblent gagnés par la résignation quand ils ne donnent pas l’impression d’avoir, de Sassou las, confié leur sort à  Dame nature. Car, tout porte à croire que tant que Sassou vivra et ne sera pas rassasié de pouvoir, aucune perspective d’alternance ne sera envisageable au Congo.  Et il en sera toujours ainsi tant que la transparence du scrutin ne sera pas garantie. Ce n’est pas pour rien que l’Eglise catholique s’est vu refuser le droit d’observer ces élections. C’est dire si les jeux sont déjà faits et le résultat connu d’avance : c’est en roue libre que Sassou va remplir les formalités d’une élection qui n’a manifestement pas de suspense.

 

« Le Pays »

 

 

 

 

 

 


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