HomeA la unePROCES DU PUTSCH MANQUE : Laissons le juge travailler sereinement !

PROCES DU PUTSCH MANQUE : Laissons le juge travailler sereinement !


 

Le procès tant attendu du putsch manqué de 2015 contre les autorités de la Transition burkinabè, s’est, enfin, ouvert le 27 février 2018, dans la Salle des Banquets de Ouaga 2000, transformée pour la circonstance en prétoire, et qui s’est révélée petite pour le nombreux public qui a fait le déplacement. Pour avoir accès à la salle, il fallait montrer patte blanche, en raison de l’impressionnant dispositif sécuritaire qui quadrillait la zone. Et ce sont des citoyens visiblement très intéressés, qui ont pris d’assaut la salle des Banquets aux premières heures de la journée, pour ne pas se faire conter l’événement. C’est dire si les attentes des Burkinabè par rapport à ce procès sont fortes. Mais il y a lieu de croire qu’elles ne seront pas déçues. Puisque les premières salves qui portaient sur les questions de forme, ont donné un avant- goût de la partie serrée qui s’annonce. D’ores et déjà, contestant la légitimité du tribunal,  les avocats de la défense ont claqué la porte, obligeant du coup le président à reporter sine die le procès.

Il souffle comme un parfum de pression sur la Justice militaire

Le moins que l’on puisse dire, c’est qu’il était temps d’aller à ce procès, tant cet épisode malheureux de la vie politique burkinabè cristallise les attentions au point de polluer l’atmosphère sociopolitique. Et pour cause. Beaucoup de Burkinabè parmi les insurgés d’octobre 2014, ne pardonnent pas à l’éphémère président du CND (Conseil national pour la démocratie), le Général Gilbert Diendéré, d’avoir voulu mettre prématurément fin à leur rêve d’un Burkina nouveau, pour rétablir l’ordre ancien sur fond de morts d’hommes et de nombreux blessés. Et pour cela, ils souhaitent que justice soit faite, entendez par là que le Général putschiste soit châtié à la hauteur de sa… trahison. Quant à  ceux qui ont été emportés par l’insurrection populaire et qui nourrissaient le secret espoir de revenir au devant de la scène à la faveur de ce coup d’Etat en brandissant l’argument du rétablissement de l’ordre constitutionnel pour justifier l’acte de l’ancien bras droit de Blaise Compaoré, ils ont perdu leurs illusions et ont dû se résoudre à ravaler leurs rancœurs, mais pas leurs convictions. Et pour eux, ce procès n’est qu’une sorte de chasse aux sorcières qui ne répond qu’à la logique de la justice des vainqueurs. C’est pourquoi, depuis l’annonce de ce procès, il souffle comme un parfum de pressions qui ne dit pas son nom sur la Justice militaire qui subit des critiques de toutes parts. Participent de ces pressions à peines voilées, les marches et autres manifestations organisées par certaines chapelles politiques, en faveur ou à l’encontre de certains prévenus. Participent aussi de ces pressions, les différentes déclarations pondues au gré des intérêts des uns et des autres, et dont la presse s’est largement fait l’écho, à la veille de l’ouverture du procès. Et pourtant, chacun demande que le droit soit dit en toute impartialité, et que justice soit rendue. Mais comment vouloir d’une chose et de son contraire ? On  clame sur tous les toits que l’on veut l’indépendance de la Justice, et en même temps, on pose des actes visant à peser sur sa décision. En vérité, dans ce procès, tout porte à croire que les uns et les autres viennent avec des a priori ; chacun ayant son idée arrêtée et voulant que ce soit celle-ci qui prévale à la fin. Conséquence : on criera au scandale en arguant du fait que le droit n’a pas été dit. Or, la Justice n’a pas vocation à satisfaire des opinions.

Il est impératif de dépassionner les débats en évitant de faire dans la  surenchère

C’est pourquoi, pour des avis aussi divergents dont certains sont même diamétralement opposés, il faut laisser le juge travailler sereinement. Il y va de l’intérêt de tous. Car, si l’on n’y prend garde, on risque de compromettre la réconciliation nationale que tout le monde appelle de ses vœux, et qui doit passer par l’étape de la vérité et de la justice, qui se joue en ce moment. C’est pourquoi il est impératif de dépassionner les débats en évitant de faire dans la  surenchère tout en se mettant dans des dispositions d’esprit d’accepter le verdict qui sortira de ce procès. C’est à ce prix que les Burkinabè pourront se donner des chances de tourner définitivement cette page douloureuse de leur histoire, qui a endeuillé de nombreuses familles sans compter les  centaines de personnes qui s’en sortent avec des blessures dont certaines garderont des séquelles à vie. En tout état de cause, si ce procès doit être l’occasion d’une catharsis pour permettre aux Burkinabè de repartir sur de nouvelles bases, il faudrait que les uns et les autres mettent de l’eau dans leur vin et fassent confiance à la Justice. Laissons donc le juge travailler en toute tranquilité ! D’autant plus que ce procès s’annonce long et peut être plein de rebondissements. En effet, 84 prévenus, ce n’est pas une sinécure. Il va donc falloir faire preuve de patience, car le Tribunal militaire qui joue sa crédibilité, n’a pas droit à l’erreur. Il lui appartient donc de ne pas prêter le flanc et de mettre un point d’honneur à mener ce procès à bon terme. En tous les cas, qu’on le veuille ou pas, ce procès marquera inévitablement un tournant dans l’histoire du Burkina Faso. Et que l’on le veuille ou pas, le verdict fera des heureux, mais aussi des malheureux. Mais pourvu que le droit soit dit et que justice soit rendue aux victimes. Pour finir, l’on attend de voir si le Général Diendéré, qui avait fait son mea culpa au moment de sa capitulation après avoir reconnu sa faute et demandé pardon au peuple burkinabè, sera toujours dans la même logique. Si ses regrets étaient sincères, l’on ne devrait pas avoir de mal à reconnaître l’officier supérieur qui avait fait acte de contrition en avouant à l’époque que « ce coup d’Etat n’aurait jamais dû avoir lieu ». Toute chose qui pourrait faciliter la tâche au tribunal militaire. Dans le cas contraire…

 « Le Pays »


Comments
  • Le drame de la politique au Burkina comme dans beaucoup de pays africains, c’est que les gens se laissent influencer par des apparences trompeuses sans comprendre le fond des problèmes politiques. La crise de leadership qui agite le CDP (ex parti au pouvoir) est la résultante de la guerre latente de succession qui était menée au sein de ce parti par ceux qui se considéraient comme des dauphins légitimes de l’ex président Blaise Compaoré. Le pouvoir Compaoré a réellement commencé à vaciller avec les mutineries de 2011.Depuis lors, le général Gilbert Diendéré visait le fauteuil présidentiel. Mais Blaise Compaoré n’a pas osé l’affronter ouvertement. On s’est contenté d’arrangements hypocrites pour remplacer le proche de Gilbert, en l’occurrence le général Dominique Diendjéré, alors chef d’Etat-major général des armées et l’affecter comme ambassadeur. On a préféré sanctionner et licencier des policiers et autres mutins, en ménageant leurs chefs. Quand la crise s’aggravait progressivement les années suivantes et que Blaise Compaoré a senti que le pouvoir était en train de lui échapper, il a déclaré par voie de presse, qu’il y a des gens qui veulent prendre le pouvoir par la force, sans citer nommément des individus précis. Depuis lors, la confiance s’est détériorée entre Blaise Compaoré et Gilbert Diendéré, son chef de l’état-major particulier de la présidence du Faso. Il est évident aujourd’hui que Blaise Compaoré ne souhaite pas voir le clan du général Diendéré aux commandes du CDP. Eddie Komboîgo est un pur produit du clan Diendéré. Il y avait aussi une forte rivalité entre les deux généraux Gilbert Diendéré et Djibril Bassolé, car chacun d’eux espérait être le dauphin choisi du président. Blaise Compaoré, qui tentait de se rapprocher de Bassolé, était pris entre deux feux. Suite à l’insurrection de 2014 , ces 2 généraux, entre autres, ont été considérés par le Président Compaoré comme des gens qui l’ont trahi. Par conséquent, il n’est pas de doute que si Blaise Compaoré s’intéresse toujours à son parti CDP,il préfère le voir conduire par des hommes de confiance, loin des hommes de tenue qui auraient comploté contre lui. Vous voyez l’attitude du général Diendéré, qui vise une stratégie de noyer tout le monde dans son putsch de 2015, en insinuant que l’argent est venu de la Côte d’Ivoire pour soutenir le coup de force. Deviner qu’il veut noyer Blaise Compaoré et Alassane Ouattara, pour espérer échapper au procès, à défaut de juger tout le monde avec lui. Quelle félonie ! Curieusement, il n’accuse pas son épouse impulsive Fatou, qui ne cachait pas son rêve d’être Première Dame du Faso.

    28 février 2018
  • Il est évident que les généraux Bassolé et Diendéré ont causé trop de violences contre des citoyens, indépendamment du coup d’Etat où l’on a tiré sur des gens dans la rue pour les empêcher de protester et de circuler dans les rues de Ouaga.Ils assument une part de culpabilité pour les morts liées au putsch de septembre 2015.Quant à Diendéré qui croit qu’il peut se tirer d’affaires en essayant d’accuser de complicité des personnalités civiles, militaires, coutumières et religieuses, il se trompe. Car, c’est lui chef d’Etat putschiste du CND .Il devrait avoir honte de dire qu’on l’a soutenu pour faire le putsch comme s’il était un bambin qu’on manipule contre sa volonté .Pourquoi n’accuse-t-il pas son épouse vipère Fatou qui n’a jamais caché ses ambitions d’être une Première Dame du Faso.

    28 février 2018

Leave A Comment