RAPPORT 2021 DU REN-LAC SUR L’ETAT DE LA CORRUPTION AU BURKINA FASO : Comme de l’eau sur les plumes d’un canard
En 2019, à l’occasion de la publication du rapport annuel sur l’état de la corruption au Burkina Faso, le Secrétaire exécutif du Réseau national de lutte contre la corruption (REN-LAC) REN-LAC, Sagado Nacanabo, disait ceci : “Pour les services qui sont considérés comme les plus corrompus, il n’y a pas de grand changement. Il y a peut-être le changement des inversions de place. Le premier qui devient deuxième ou le troisième qui devient quatrième. Il n’y a pas un très grand bouleversement », a-t-il laissé entendre. Deux ans plus tard, le constat reste le même. En effet, selon le nouveau rapport porté à la connaissance du public, le 6 décembre 2022, le trio en tête des services publics les plus corrompus de l’année 2021, demeure la Police municipale avec un indice de 51,34%, la douane (37,34%) et la police nationale (31,77%). C’est à se demander si les corps incriminés ne se sont même pas accommodés de leur classement. Les classements se succèdent et se ressemblent. « Le molosse, a écrit un sage, ne change pas sa manière éhontée de s’asseoir » Avant de revenir sur ce classement, l’on se doit de tresser des lauriers au REN-LAC pour sa constance et sa détermination dans la lutte contre la corruption qui sape les efforts de développement du pays. En effet, entre autres méfaits des pots-de-vin, l’on peut retenir, au plan politique, la difficulté à mettre en œuvre les politiques de développement du pays, la consolidation et le maintien des pouvoirs publics en place, rendant chimérique toute alternance démocratique et la perte de confiance de la communauté internationale vis-à-vis des gouvernants.
Il devient urgent de prendre des mesures vigoureuses sans complaisance pour combattre cette gangrène
Au plan économique, les dessous de table sont à l’origine de l’échec dans l’atteinte des objectifs du développement en multipliant les coûts économiques, créant ainsi de gros manques à gagner au niveau de la trésorerie de l’Etat. En outre, la corruption perturbe le jeu de la libre-concurrence, privant ainsi les populations de leurs avantages en termes de réduction des coûts et d’égalité des chances. Tout cela entraîne comme conséquences immédiates, l’aggravation de la pauvreté et la naissance de grandes inégalités sociales qui peuvent se solder par des actes d’incivisme de la part des citoyens voire des conflits entre gouvernants et gouvernés. Au regard de ces méfaits dévastateurs de la corruption pour le tissu socio-politique et économique de notre pays, l’on peut affirmer que le REN-LAC fait une opération de salubrité publique par la publication de ses rapports annuels. De ce fait, cette organisation de la société civile mérite tous les encouragements dans sa difficile croisade contre les délinquants à col blanc qui sont tapis dans l’Administration publique. Pour revenir au rapport 2021, il faut noter, avec Sagado Nacanabo, « qu’en 2021, la gestion gouvernementale a été caractérisée par de nombreux scandales doublés d’une impunité garantie aux auteurs de corruption. Le Président du Faso, censé impulser la dynamique de bonne gouvernance, a brillé par son mutisme devant les mauvaises pratiques de certains de ses proches ». Dès lors, on ne peut plus s’étonner de la persistance et de l’aggravation de la corruption dans le pays. Toute chose qui est très inquiétante quand on fait le parallèle entre cette corruption et la lutte contre l’insécurité. En effet, la tête de peloton se compose de ceux-là mêmes qui ont en charge la sécurité des populations. L’on peut se demander comment ces populations qui font l’objet de rackets, peuvent répondre à l’appel à la collaboration avec les Forces de défense et de sécurité dans la lutte contre l’insécurité. C’est pourquoi il devient urgent et même très urgent de prendre des mesures vigoureuses sans complaisance pour combattre cette gangrène avant qu’il ne soit trop tard.
Sidzabda