HomeA la uneREMISE DU PRIX HOUPHOUET BOIGNY POUR LA RECHERCHE DE LA PAIX EN RCI : Les Ivoiriens pourront-ils enfin se regarder dans la glace ?

REMISE DU PRIX HOUPHOUET BOIGNY POUR LA RECHERCHE DE LA PAIX EN RCI : Les Ivoiriens pourront-ils enfin se regarder dans la glace ?


Ce mercredi 8 février 2023, se tient à Yamoussoukro, capitale politique de la Côte d’Ivoire, la cérémonie de remise du Prix Félix Houphouët Boigny- UNESCO pour la recherche de la paix. Un prix institué par l’UNESCO, en 1989, et destiné à « honorer les personnes vivantes, institutions ou organismes publics ou privés en activité, ayant contribué de façon significative à la promotion, à la recherche, à la sauvegarde ou au maintien de la paix, dans le respect de la Charte des Nations unies et de l’Acte constitutif de l’UNESCO ». Il comprend un chèque de 122 000 euros, une médaille en or plus un diplôme et porte le nom de Félix Houphouët Boigny, premier président et père de l’indépendance de la Côte d’Ivoire, qui, avant de tirer sa révérence en 1993, a œuvré à laisser de lui, le souvenir d’un homme de paix. C’est dire tout le prestige et la crédibilité de ce prix qui a déjà eu à mettre en lumière, les efforts de paix d’une trentaine de personnalités non moins iconiques tels les ex-présidents sud-africains Nelson Mandela et Frederick De Klerk distingués en 1991, l’ex-Premier ministre israélien, Yitzahk Rabin et son ministre des Affaires étrangères d’alors, Shimon Peres, concomitamment distingués avec l’égérie de la lutte du peuple palestinien, Yasser Arafat en 1993, le roi Juan Carlos d’Espagne  et l’ancien président américain Jimmy Carter honorés en 1994, l’ex-président sénégalais, Abdoulaye Wade, en 2005, l’ancien-nouveau président brésilien Luis Inacio Lula da Silva, en 2008, pour ne citer que ceux-là.

 

L’écho de ce prix ne pouvait pas mieux retentir

 

Cette année, le prix est décerné à l’ancienne Chancelière allemande, Angela Merkel. Sa « courageuse décision » d’accueillir, en 2015, plus d’un million de réfugiés syriens, irakiens, afghans et érythréens qui passaient pour des parias qu’aucun pays européen ne voulait accueillir sur son sol, n’a pas laissé insensible le jury international présidé par le Dr Denis Mukwege, lui-même Prix Nobel de la Paix 2018. Lequel jury a tenu à mettre l’ancienne chancelière sous les feux des projecteurs, à la faveur de l’édition 2022 de ce prix. Une distinction honorifique sans aucun doute amplement méritée pour l’ancienne locataire de la Willy-Brandt-Straße, qui sonne comme un appel à la tolérance, à plus de générosité et d’altruisme dans un monde égoïste et fortement agité. Un appel qui a d’autant plus tout son sens que le monde actuel vit l’une des crises multidimensionnelles les plus difficiles de son histoire, avec le langage des armes qui semble s’être imposé, d’Est en Ouest et du Nord au Sud, comme principal mode de communication entre les hommes. C’est dire si l’écho de ce prix ne pouvait pas mieux retentir, au moment où la planète tout entière est manifestement en quête de paix.  Une paix qui a besoin de se traduire plus en actes qu’en paroles car, comme le disait Félix Houphouët Boigny lui-même, « la paix n’est pas un vain mot, c’est un comportement ».

 

Il y a comme un goût d’inachevé

 

Et l’on ne pouvait pas mieux faire dans la symbolique, comme pour donner plus de poids aux paroles de l’illustre personnalité dont le prix porte le nom, en choisissant Yamoussoukro, sa ville natale qui est aussi celle où repose sa dépouille mortelle, pour abriter cette cérémonie de remise de ce prix, qui se veut la  première en terre d’Eburnie.  Une cérémonie dont le prestige est appelé à être rehaussé par la présence, aux côtés du président Alassane Dramane Ouattara (ADO), de personnalités de Côte d’Ivoire et d’ailleurs, à l’istar des anciens présidents ivoiriens Henri Konan Bédié et Laurent Gbagbo, des membres du gouvernement ivoirien, du corps diplomatique, des membres du jury international du Prix, du président de la Commission de l’Union africaine, Moussa Faki Mahamat, des présidents du Ghana, Nana Akuffo-Addo et du Liberia, Georges Weah, du président en exercice de la CEDEAO, le bissau-guinéen Umaro Cissoko Embalo, du président en exercice de l’Union africaine, le sénégalais Macky Sall, tous invités à cette cérémonie. Autant dire que pour la remise de ce prix dont la cérémonie de remise à Yamoussoukro est un symbole fort, le président ADO a essayé de ratisser large. Aussi bien à l’extérieur qu’à l’intérieur du pays. Mais l’on constate qu’au moment où la cérémonie se tient sur la terre natale d’Houphouët Boigny, ses héritiers ne sont pas loin de s’entredéchirer. En témoigne cette récente vague de démissions au sein du PDCI-RDA. Les démissionnaires sont allés grossir les rangs du RHDP, faisant le vide autour du Sphinx de Daoukro. Pendant ce temps, c’est l’ancien président Laurent Gbagbo, même s’il n’est ni ne se réclame  héritier du Père de la Nation, qui laisse planer le doute sur sa présence à une cérémonie qui devait pourtant rassembler. C’est pourquoi l’on se demande si en héritiers de l’apôtre de la paix que fut Houphouët Boigny, les Ivoiriens pourront enfin se regarder dans la glace, pour une réconciliation vraie. En tout état de cause, au-delà de la Côte d’Ivoire, la remise du prix Houphouët Boigny en terre ivoirienne, est une interpellation pour les dirigeants africains, à être non seulement des apôtres, mais aussi des acteurs de la paix. Car, il y a comme un goût d’inachevé quand on voit que ce prix est attribué dans une sous-région ouest-africaine en pleine tourmente, sans qu’aucun des dirigeants de cette partie de l’Afrique ne puisse y prétendre.

 

« Le Pays »


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