HomeA la uneREPORT DE LA PRESIDENTIELLE AU BURUNDI : La grande victoire d’étape de Nkurunziza

REPORT DE LA PRESIDENTIELLE AU BURUNDI : La grande victoire d’étape de Nkurunziza


A l’issue de la dernière rencontre des dirigeants de la Communauté est-africaine (EAC), le 6 juillet dernier, sur la crise politique au Burundi, un médiateur en la personne du président ougandais Yoweri Museveni, a été nommé pour aider à trouver une solution négociée à la tempête sociopolitique consécutive à la décision de Pierre Nkurunziza de passer outre toutes les mises en garde à lui faites, pour se porter candidat à la prochaine élection présidentielle. Dans la foulée, il a été demandé le report de cette élection au 30 juillet 2015, pour donner plus de temps et de chances au médiateur de réussir sa mission.

Comme pour faire droit à cette requête, Bujumbura a accepté de reporter la très controversée élection, mais seulement d’une semaine, donc du 15 au 21 juillet 2015, arguant du fait que le Burundi se retrouverait dans un vide institutionnel s’il consentait à l’organiser à la date préconisée par l’EAC, puisqu’aux termes de la Constitution burundaise, la présidentielle doit être organisée au plus tard un mois avant la fin du mandat du président sortant, qui est fixée au 26 août 2015.

En acceptant le principe du report de cette élection, conformément au vœu de l’équipe de la facilitation (représentants de l’ONU, de l’Union africaine (UA), de l’EAC et de la Conférence internationale pour la région des Grands lacs), le président burundais veut démontrer à tous qu’il est certes inflexible sur les questions qui touchent à la souveraineté et au respect des institutions de son pays, mais qu’il est tout autant ouvert au dialogue et réceptif aux avis qui concourent à faire baisser la température de ces coulées de laves sociales en préparation au Burundi.

Et du coup, il déplace le débat sur le terrain moins volcanique du délai nécessaire pour organiser la présidentielle, au lieu de le focaliser toujours sur la légitimité même de sa candidature. Sacré Nkurunziza ! Et comme les voies du…Pasteur-Président sont insondables, il ne serait pas étonnant que cette nouvelle date du 21 juillet soit encore décalée, d’autant que l’hypothèse n’a pas été totalement écartée par Prosper Ntahorwamiye, le ci-devant porte-parole de la Commission électorale nationale indépendante (CENI) qui admettait que l’organisation du scrutin était politiquement possible, même au-delà du délai constitutionnel prévu.

Il appartiendra aux Burundais épris de démocratie et à tous les amis du Burundi, de ne pas se laisser abuser par ce coup de poker de Nkurunziza et de ses partisans, en recentrant le débat sur le caractère irréversible et insusceptible de recours, du moins dans les circonstances actuelles, des décisions prises à Arusha en 2000, aux termes desquels tout président élu doit céder la place à un autre, après deux mandats à la tête de l’Etat.

La situation sociopolitique au Burundi interpelle tous les démocrates d’Afrique et du monde

Le président du Burundi affirme à tous ses interlocuteurs qu’il veut aller rapidement aux élections pour éviter que la chienlit ne s’installe dans son pays, avec ce débat oiseux qu’il juge sur la légitimité de sa candidature, mené par des politiciens burundais au creux de la vague et soutenus par une partie de la Communauté internationale en total déphasage avec les réalités de son pays.

Eh bien, disons au Président qu’il gagnera l’élection, mais il déclenchera aussi la guerre, parce que des Burundais aussi bien de l’intérieur que de l’extérieur ont juré de ne pas croiser les bras face à leur président qui les considère comme, ne riez pas, de vulgaires « sous-traitants » des Shebabs somaliens, téléguidés depuis l’extérieur pour répandre la terreur au Burundi.

D’ailleurs, on ne compte plus le nombre de déflagrations et de morts à Bujumbura, de même que les attaques à la kalachnikov et à la grenade enregistrées à l’intérieur du pays. Les dernières en date ont été revendiquées par les auteurs de la tentative de putsch qui avait fait un flop en mai dernier. Et il est fort probable que des milices armées surgissent comme champignon après l’orage, ici et là dans tout le pays. Ce qui était jusque-là considéré comme de simples escarmouches bien localisées, deviendrait alors des affrontement généralisés avec les alguazils du pasteur-président qui se feront un point d’honneur à mater toutes les brebis galeuses et égarées, et on assistera à l’entrée très probable du Rwanda en scène pour soutenir les insurgés afin d’éviter que le chaos au Burundi ne déborde sur son territoire déjà en proie à des hordes de réfugiés.

On ne le dira jamais assez, la situation sociopolitique au Burundi interpelle tous les démocrates d’Afrique et du monde, à plus d’un titre. D’abord parce qu’elle est porteuse de germes d’une guerre civile forcément meurtrière et potentiellement déstabilisatrice de toute la région des Grands lacs. Ensuite, parce qu’il y a sur notre immense continent, d’autres chefs d’Etat qui attendent, en embuscade, que le voltigeur de Bujumbura réussisse le numéro qui consiste à tourner les apologistes de l’alternance en bourriques, pour le remplacer aussitôt dans les starting-blocks pour la course vers des mandats à vie.

En effet, depuis le cuisant échec de Blaise Compaoré dans sa tentative de sauter par-dessus la Constitution, pour se maintenir au pouvoir au-delà de son dernier mandat et la débandade qui s’en est suivie dans ses rangs, le « trouillomètre » avait, pour ainsi dire, atteint la cote d’alerte chez tous les présidents-fondateurs du continent. Mais la candidature contre vents et marées de Nkurunziza à la prochaine élection présidentielle va leur redonner du punch et stimuler davantage leur désir mal dissimulé de régner à vie sur leurs sujets, avec le risque évident de laisser le chaos et la désolation comme héritage à la postérité.

En empêchant donc Nkurunziza de franchir la ligne… rouge, ce sera un message lancé à ses voisins immédiats et à tous ses autres homologues que la jeunesse africaine, clairvoyante et avisée, ne se laissera plus berner par des politiciens bornés, qu’ils soient en treillis ou en jaquette.

Le Nigérien Mamadou Tandja et le Burkinabè Blaise Compaoré pourraient, forts de leur expérience, être mis à contribution pour faire passer ce message.

                                                                                                                          Hamadou GADIAGA


No Comments

Leave A Comment