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REPORT DE LA PRESIDENTIELLE EN RDC : La Cour constitutionnelle enfonce une porte qu’elle a déjà ouverte


 

Dans un message d’une rare virulence, les ministres des Affaires étrangères des 28 pays membres de l’Union européenne (UE) réunis au Luxemburg, demandent aux autorités de Kinshasa d’organiser des élections le plus rapidement possible, sous peine de sanctions ciblées. Or, le même jour, soit le 17 octobre dernier, la Cour constitutionnelle en RD Congo a donné son aval aux dispositions actant le glissement du calendrier électoral, issues du consensus entre les parties prenantes aux pourparlers inter-congolais. D’une pierre, Joseph Kabila a ainsi fait deux coups : il a renforcé son immunité en s’abritant derrière la double carapace de la  légalité constitutionnelle par cet avis des gardiens de la loi fondamentale congolaise  et de la légitimité politique conférée par l’accord entre les 300 acteurs du dialogue politique. Le moins que l’on puisse dire, c’est que ce verdict est sans surprise. C’est le contraire qui aurait étonné. De ce fait, l’accord politique repoussant la tenue de l’élection présidentielle au plus tôt à la fin avril 2018, ne fait donc qu’apporter de l’eau au moulin de Kabila en fournissant à l’acte pris, un socle de légitimité politique. Un rejet de l’accord politique par la Cour constitutionnelle aurait eu d’autant plus les allures d’une pêche miraculeuse dans les eaux du Congo, qu’en Afrique, les gardiens de la loi  sont si inféodés aux princes régnants que ramer à contre-courant de leur volonté, c’est se faire hara kiri. Dans le cas d’espèce, on le sait, le dialogue politique si ardemment souhaité par Kabila, n’était qu’une entourloupette destinée à obtenir son maintien dans le fauteuil présidentiel au-delà des délais constitutionnels. En avalisant donc les conclusions du dialogue, la Cour constitutionnelle joue  à la perfection l’acte final du rôle que les scénaristes qui arpentent les arcanes du Palais de marbre de Kinshasa, ont savamment écrit pour elle. Au passage, elle peut se féliciter d’avoir réussi à faire faire le sale boulot par la Commission électorale nationale indépendante (CENI) qui s’est dit techniquement incapable d’organiser à bonne date les élections. Mieux, elle pourrait se dédouaner à bons comptes, n’ayant fait qu’interpréter une mauvaise disposition de la Constitution qui autorise le président à conserver ses fonctions jusqu’à l’élection d’un nouveau.

Les perspectives ne sont guère reluisantes pour les coalisés du dialogue politique

Au-delà donc de la crédibilité des Cours constitutionnelles qui se retrouvent si souvent dans les mauvais rôles sur le continent comme il a été donné de le constater au Burundi, dans les deux Congo ou au Gabon, il faut incriminer la mauvaise qualité de certaines dispositions constitutionnelles qui cachent « le diable dans les détails ».  Il faut surtout déplorer l’inexistence de textes qui sanctuarisent comme aux Etats-Unis, l’esprit de la Constitution et qui constituent le dernier recours en cas de divergence dans l’interprétation de la loi fondamentale. En tout cas, pour l’instant, le président Kabila et  ses Raspoutine peuvent  se féliciter d’avoir réussi à tirer profit de ces  interstices de l’armature constitutionnelle. Leur satisfaction est d’autant plus grande qu’ils ont réussi à s’allier, dans leur forfaiture consistant à tordre le cou aux dispositions constitutionnelles, une partie de l’opposition appâtée par des portefeuilles ministériels.  Mais comme on le dit, « le tout n’est pas de partager le gâteau, il faut réussir à le manger ». Les perspectives, en effet, ne sont guère reluisantes pour les coalisés du dialogue politique. Car, l’opposition radicale conduite par Etienne Tshisekedi, rejette en bloc l’accord auquel sont parvenues la majorité et l’opposition participant au dialogue, estimant que le peuple congolais ne s’y retrouve pas. Elle se montre ferme sur ses positions et n’entend pas laisser Kabila jouir d’une minute supplémentaire des avantages du pouvoir au-delà du 19 décembre 2016. Et comme pour maintenir la flamme de la mobilisation, elle appelle à une journée ville morte ce mercredi 19 octobre 2016. Quand on se réfère aux évènements du 19 septembre dernier, c’est dire que la situation en RD Congo pourrait aller de Charybde en Scylla et ce dans un contexte où la très influente Eglise catholique a pris ses distances en claquant la porte du dialogue. Il faut même craindre, comme certaines chancelleries occidentales en donnent les signaux, des affrontements armés.  Dans ce cas de figure, l’opposition modérée qui entre au gouvernement, pourrait se retrouver dans la posture de la « galette brûlée sur les deux faces » : être contrainte de  vendre son âme au diable comme Agathon Rwasa au Burundi et participer aux orgies sanguinaires contre ses anciens camarades pour satisfaire l’inextinguible soif du pouvoir de Kabila et en cas de retournement de la situation,  subir l’ire du peuple congolais  en rançon de sa traîtrise. Quant à l’Union africaine (UA) qui a fourni le médiateur pour ce dialogue controversé, malgré les protestations de la vraie opposition, en cas de violences, elle portera toute la responsabilité de sa pyromanie devant l’Histoire.

SAHO

 


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