RESULTATS DE LA PRESIDENTIELLE DU 29 NOVEMBRE : Roch, inébranlable comme un roc

 

Les résultats provisoires de la présidentielle du 29 novembre 2015, au Burkina Faso, sont connus. C’est Roch Marc Christian Kaboré du Mouvement du peuple pour le progrès (MPP) qui, au moment où nous mettions sous presse, caracole en tête. Il rafle donc la mise. Il est talonné par son principal concurrent, Zéphirin Diabré de l’Union pour le progrès et le changement (UPC) qui s’en tire avec environ 30% des voix. Inébranlable comme un roc, Roch Marc Christian Kaboré devient le premier président le plus démocratiquement élu de l’histoire du Burkina. En effet, c’est la première fois que le pays des Hommes intègres organise les élections les plus ouvertes où aucun des candidats en lice ne bénéficie de ce que l’on appelle pudiquement la prime au sortant pour  ne pas dire la prime au fraudeur. Car, c’est connu, en Afrique, on n’organise pas des élections pour les perdre. En tout cas, étant donné que la plupart des observateurs présents au Burkina, ont salué le calme olympien dans lequel s’est déroulé le double scrutin du 29 novembre, et qu’aucun candidat, du moins jusqu’au moment où nous tracions ces lignes, n’a signalé un cas de fraude, on peut dire que Roch Marc Christian Kaboré a été élu dans la transparence. En cela, bien plus que le MPP, c’est la victoire de tout le peuple burkinabè resté debout pendant un an et ce, en dépit de l’adversité et des aléas de tout genre. C’est pourquoi Roch Marc Christian Kaboré doit avoir

le triomphe modeste  car cette victoire, il la doit à tous, même à ses adversaires politiques, notamment à Zéphirin Diabré qui n’a pas démérité, et qui, rappelons-le, a été l’un des premiers à avoir organisé la lutte contre les fossoyeurs de la démocratie burkinabè. Ce n’est que plus tard que Roch et ses camarades, abandonnant le navire CDP (Congrès pour la démocratie et le progrès) dans la tourmente, ont rejoint les rangs des « révolutionnaires » pour in fine porter l’estocade à un régime vieux de 27 ans, caractérisé par la corruption, le népotisme, le clientélisme, l’impunité, etc. La victoire de Roch n’est donc ni plus ni moins que le couronnement de l’engagement de tout un peuple décidé à ne plus se laisser conter fleurette, opprimé qu’il fut pendant plus d’un quart de siècle. C’est dire que le nouveau président va marcher sur des œufs. Car, autant le peuple lui a fait confiance, autant il peut le conspuer avec véhémence si, tout comme son ancien compagnon Blaise Compaoré, il fait montre d’arrogance en prenant ses distances vis-à-vis de ceux qui l’ont élu. « Plus rien ne devrait être comme avant », clame-t-on depuis la chute du régime Compaoré. Roch doit constamment porter ce slogan en bandoulière. La condescendance et les passe-droits ne doivent plus avoir droit de cité dans ce Burkina post-insurrection qui aspire à plus de démocratie et de liberté. De toute évidence, le nouveau président a tout intérêt à faire corps avec son peuple. Dans le cas contraire, appuyés par le même peuple, ses adversaires politiques pourront lui pourrir la vie. Certes, Roch a vaincu la présidentielle. Mais saura-t-il garantir la tranquillité de son sommeil en remportant aussi les législatives ? Il a intérêt à faire de ce scrutin couplé une pierre deux coups. Autrement, il doit se convaincre que la guerre continuera dans l’arène de l’Assemblée nationale. Mais en attendant, l’enfant débonnaire de Zorgho peut savourer, avec ses compagnons de lutte, sa victoire. Et pour cause : sorti du pouvoir par la fenêtre, il y revient crânement par la porte, paré du diadème de la légitimité populaire.

Boundi OUOBA