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RESULTATS DES MUNICIPALES AU BENIN


Le 21 mai dernier, les résultats provisoires des élections municipales au Bénin, ont été publiés par la Commission électorale nationale autonome (CENA). Sans surprise, les deux partis du chef de l’Etat, Patrice Talon, à savoir l’Union progressiste et le Bloc républicain se sont accaparés de la part du lion. En effet, ces deux formations politiques dansant au rythme du tambour du président Talon, ont engrangé à elles seules, 1555 sièges sur 1815 prévus, soit 77%. Seulement 260 sièges, soit environ 15% des votes, ont été concédés , peut-on dire , à la Force Cauris pour un Bénin nouveau (FCBE), l’ex-parti de Thomas Boni Yayi. En rappel, l’ancien président a pris congé de la FCBE, parti qu’il avait porté sur les fonts baptismaux, parce qu’il le soupçonnait d’être inféodé à Patrice Talon. De ce point de vue , l’on peut poser l’opération suivante en terme de nombre de conseillers pro-Talon : 1555 sièges+260 sièges= ? le résultat donne 1815, soit 100% des votes. Doit-on en rire ou en pleurer ? Les deux à la fois. L’on doit en rire parce qu’un tel résultat s’apparente à un gag. Et du côté de l’Occident, l’on ne manquera pas, en guise de dérision, de décrypter cela comme faisant partie des bizarreries de la démocratie made in Africa. Mais l’on doit en même temps écraser une larme pour la démocratie au Bénin. En effet, si un tel score avait été enregistré au pays du « propriétaire de la bananeraie », c’est-à-dire en Ouganda de Yoweri Museveni, par exemple, personne n’aurait crié au scandale. Mais, que ce résultat soit enregistré au Bénin, peut être perçu comme un véritable gâchis. Car, le Bénin a la réputation d’être la vitrine démocratique de l’Afrique de l’Ouest. Et cette réputation a été construite brique après brique par les présidents qui se sont succédé à la tête du pays, depuis le renouveau démocratique amorcé dans les années 90. Patrice Talon est en train de travailler à réunir les ingrédients pour la mort du pluralisme politique au Bénin.

Seul Talon et des candidats fantoches qu’il aura sélectionnés, pourront bénéficier des parrainages des élus afin d’avoir le quitus pour briguer la magistrature suprême

Par voie de conséquence, c’est la démocratie qu’il est en train de conduire méthodiquement à l’abattoir. La première étape de sa méthode, a été de mettre en place une Assemblée nationale pendue à ses basques. Ce fut fait à la faveur des élections législatives d’avril 2019. Et le moins que l’on puisse dire, c’est que ce scrutin a choqué par son caractère non inclusif. En effet, à force d’intrigues et de condamnations arbitraires, Patrice Talon a réussi à exclure les partis d’opposition de la compétition. De ce fait, tous les députés élus ne respirent que par les narines de Talon. Et pour remercier leur bienfaiteur, leur premier acte législatif a été de voter une modification constitutionnelle qui fait obligation aux futurs candidats à la présidentielle, d’être parrainés par des députés et des maires. Depuis donc le 21 mai, la deuxième étape du plan anti-démocratie de Talon a été franchie. En effet, Patrice Talon vient de réaliser un sans-faute aux municipales en obtenant, rassurez-vous, et ce n’est pas une erreur, 1815 sièges sur 1815 sièges en jeu, soit 100% des votes. Après donc ces législatives et ces municipales, 100% des députés et 100% des futurs maires seront inféodés à Patrice Talon. Par conséquent, seul ce dernier et des candidats fantoches qu’il aura sélectionnés, pourront bénéficier des parrainages des élus afin d’avoir le quitus pour briguer la magistrature suprême. C’est pourquoi l’on peut affirmer, sans aucun risque de se tromper, que les résultats des municipales du 17 mai, s’apparentent à un boulevard que Patrice Talon s’est ouvert pour la présidentielle de 2021. La grande question est de savoir qui arrêtera Patrice Talon dans sa volonté affichée de rabougrir la démocratie béninoise . Cette question est d’autant plus fondée que l’on peut avoir l’impression que Patrice Talon a réussi l’exploit de pousser les opposants, en tout cas ceux qui sont restés au pays , à la résignation. En outre, le richissime homme d’affaires devenu président, n’a rien à cirer avec ce que les autres pensent de sa gouvernance démocratique. Il reste la société civile. Là encore, on peut douter de sa capacité à refroidir les ardeurs anti-démocratiques de Talon. Car, ce dernier semble avoir fait parler sa fortune pour obtenir le silence de bien des organisations de la société civile naguère très critiques.

Pousdem Pickou


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