HomeA la uneRETOUR DE L’EX-CHEF DE LA JUNTE GUINEENNE A CONAKRY

RETOUR DE L’EX-CHEF DE LA JUNTE GUINEENNE A CONAKRY


Après onze ans d’exil, l’ex-chef de l’Etat guinéen, Moussa Dadis Camara, a foulé à nouveau le sol de son pays natal. C’était le 22 décembre 2021, à la faveur de l’ouverture faite par les tombeurs d’Alpha Condé, de permettre le retour au bercail des exilés politiques dont le ci-devant enfant terrible de Nzérékoré. Ce dernier a été précédé à Conakry, quelques jours plus tôt, par le nom moins emblématique chef de la transition, le général Sékouba Konaté. Soit dit en passant, l’exilé de Ouagadougou peut remercier le colonel Doumbouya qui lui aura permis de réaliser ce rêve qu’il caressait depuis longtemps, mais qui est resté mission impossible sous le professeur Condé jusqu’à la chute de ce dernier dans les conditions que l’on sait.  On se rappelle qu’une tentative du rodomont capitaine de rentrer dans son pays en 2015, s’était soldée par un échec après une escale manquée à l’aéroport d’Abidjan.  Le moins que l’on puisse dire, c’est qu’avec le retour au bercail de ces deux anciens chefs d’Etat longtemps tenus éloignés de leur terre natale, la Guinée amorce un tournant important de son histoire politique plutôt mouvementée.

 

On peut saluer le mérite du colonel Mamady Doumbouya qui multiplie les actes forts

 

 

Car, quoi qu’on dise, cela pourrait participer de la décrispation nécessaire à la réconciliation nationale que les Guinéens appellent de leurs vœux. Surtout que le contentieux du massacre du 28 septembre 2009 dans le stade éponyme, reste pendant devant la Justice.  Un dossier judiciaire dans lequel le dirigeant guinéen, chef de l’Etat à l’époque des faits, reste inculpé pour son rôle présumé dans lesdits événements qui avaient fait plus de cent morts, des milliers de blessés et des centaines de femmes violées, selon les résultats d’une enquête indépendante de l’ONU. C’est pourquoi il y a lieu de se demander si en signant son retour au pays, l’ex-chef du CNDD (Conseil national pour la démocratie et le développement), la junte qu’il avait dirigée à l’époque, ne prend pas des risques. Notamment ceux de se faire alpaguer et de ne pas pouvoir ressortir du pays. On attend d’autant plus de voir que dans ledit dossier, la Cour pénale internationale (CPI) a récemment donné de la voix pour enjoindre les autorités guinéennes d’organiser rapidement le procès, faute de quoi elle s’en saisirait. En attendant, on peut saluer le mérite du chef du CNRD (Comité national pour le rassemblement et le développement), le colonel Mamady Doumbouya qui, depuis sa prise du pouvoir en septembre dernier, multiplie les actes forts qui paraissent autant de signaux d’une volonté de tourner la page pour permettre au pays d’amorcer un nouveau départ.  Dans cet ordre d’idée, on imagine combien la famille de l’ex-président Sékou Touré a pu apprécier la récente rétrocession, le 10 décembre dernier, de ses biens confisqués à sa veuve et à ses héritiers. Dans la foulée, c’est le général Sékouba Konaté, l’ex-président de la transition, qui signait son retour au bercail le 18 décembre dernier après plusieurs années d’absence, suivi quelques jours plus tard du fougueux capitaine Moussa Dadis Camara.

 

 

Ce serait à son honneur de  saisir l’opportunité d’un éventuel procès pour dire sa part de vérité

 

 

Autant de faits et de gestes qui peuvent être lus comme une disposition d’esprit du nouveau maître de Conakry à changer qualitativement les choses, dans sa volonté de « refondation » de l’Etat guinéen. Et on ne peut que le prendre au mot quand il promet de ne pas interférer dans les dossiers judiciaires. Reste maintenant pour lui à clarifier les contours de la transition en levant le voile sur le calendrier devant conduire le pays à des élections pluralistes pour le retour à l’ordre constitutionnel normal. C’est aussi sur ce plan qu’est attendu le tombeur d’Alpha Condé qui ne cesse de crier la noblesse de ses intentions devant une communauté internationale impatiente de le voir sortir le pays de l’Etat d’exception. Il ne lui reste plus qu’à joindre l’acte à la parole par une transmission du pouvoir aux civils dans les meilleurs délais ; toute chose qui lui permettrait d’entrer dans l’histoire de son pays par la grande porte. Contrairement à tous ses frères d’armes de la Guinée et d’ailleurs venus balayer le palais présidentiel pour mieux s’y installer.  Ce serait tout à son honneur. A lui de montrer qu’il en est capable.  En tout état de cause, pour en revenir au capitaine Moussa Dadis Camara, il a toujours clamé son innocence dans l’affaire du massacre du 28 septembre. Maintenant que l’occasion lui est donnée de rentrer au bercail, ce serait à son honneur de  saisir l’opportunité d’un éventuel procès pour dire sa part de vérité et décharger sa conscience pour une affaire dont ses compatriotes, principalement les parents des victimes, n’attendent que la vérité pour que justice leur soit rendue.  Se montrera-t-il à la hauteur de l’histoire ? On attend de voir.

 

« Le Pays »

 

 

 


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