REVISION DE LA LOI PORTANT STATUT DE L’OPPOSITION : Les députés de l’opposition claquent la porte
Réunis en séance plénière pour examiner trois projets de loi, les députés de l’Opposition politique ont quitté l’hémicycle, le 1er juin 2018, pour, ont –ils dit, protester contre le retrait du projet de loi portant modification du statut du chef de file de l’Opposition politique. Ils ont animé une conférence de presse pour exprimer leur indignation.
Les députés de l’Opposition ont claqué la porte de l’hémicycle le 1er juin dernier. Et pour cause, le retrait du projet de loi modificatif de la loi portant statut de l’opposition politique par le ministre de l’Administration territoriale et de la décentralisation, à la demande des députés de la majorité présidentielle. Après avoir quitté l’hémicycle, ils ont animé une conférence de presse pour dire non à ce qu’ils ont appelé la volonté des députés de la majorité de faire de l’Assemblée nationale une caisse de résonance. «L’assemblée nationale vient, une fois de plus, de démontrer son incohérence et son mépris pour l’opposition. Rappelez- vous que le 21 mai 2018, les groupes parlementaires de l’opposition parlementaire ont organisé une conférence de presse pour dénoncer les dysfonctionnements que nous avons constatés au niveau de l’Assemblée nationale. Au cours de cette conférence, nous avions évoqué, entre autres points de dysfonctionnement, la tendance à transformer l’Assemblée nationale en une caisse de résonance. L’attitude de la majorité parlementaire vient ce matin nous conforter dans notre position. Autant le gouvernement peut faire des injonctions pour modifier notre ordre du jour, autant les députés de la majorité parlementaire prennent des décisions en lieu et place du gouvernement. Là, nous constatons un alignement du pouvoir qui remet sérieusement en cause le principe de la séparation des pouvoirs. Cette manière de conduire la démocratie au Burkina Faso a offusqué les groupes parlementaires de l’Opposition qui ont décidé de quitter la salle », a indiqué Nicolas Dah, président du groupe parlementaire UPC (Union pour le progrès et le changement). A l’en croire, toutes les commissions qui ont été saisies, ont étudié la loi et donné des avis favorables à son adoption. C’est pourquoi il n’est pas opportun de retirer le projet de loi au moment de son adoption, a-t-il soutenu. Pour François Zilma Bacyé, président du groupe parlementaire Paix, justice et réconciliation nationale, co-animateur de la conférence de presse, le rappel de l’article 103 n’est pas juste. « On ne peut pas comprendre qu’on gère une Assemblée nationale de cette manière. Cela n’allait pas se faire si feu le président Salifou Diallo était là », a-t-il déploré. Ses propos sont soutenus par Blaise Sawadogo, président du groupe parlementaire du Congrès pour la démocratie et le progrès (CDP). Pour lui, la démocratie est en danger au pays des Hommes intègres. C’est pourquoi lui et ses camarades ont quitté l’Assemblée, pour tirer la sonnette d’alarme.
Mais comment en est-on arrivé là ?
Réunis en séance plénière en vue d’examiner trois projets de loi : il s’agit du projet de loi portant modification de la loi portant statut de l’opposition politique, le projet de loi portant réglementation générale du renseignement au Burkina Faso et le projet portant statut de loi sur le statut du cadre de la Police nationale. Après la présentation du rapport de la Commission des affaires générales, institutionnelles et des droits humains (CAGIDH), les cinq autres commissions générales ont donné leur appréciation et tous leurs responsables étaient favorables à l’adoption du projet de loi. Mais dans le débat général, plusieurs députés ont relevé des insuffisances du texte soumis à leur vote. Après la clôture du débat général, les deux groupes parlementaires de la majorité ont demandé et obtenu une suspension de 15 minutes pour se concerter. A leur retour, au nom des groupes parlementaires MPP et Burkindlim, Lassina Ouattara a invité le gouvernement à retirer son projet de loi. Une requête que Siméon Sawadogo, ministre de l’Administration territoriale et de la décentralisation, va finir par accepter. Il n’en fallait pas plus pour que l’opposition crie au scandale. Elle a demandé à son tour une suspension pour se concerter. De retour à l’hémicycle, le président du groupe parlementaire UPC, Nicolas Dah, a souhaité que le processus d’adoption de la loi se poursuive. Ce qu’a rejeté Me Bénéwendé Sankara, 1er vice-président de l’Assemblée nationale, qui avait quelques heures plus tôt, remplacé le président de l’Assemblée nationale, Bala Sakandé. Pour Bénéwendé Sankara, l’acte est justifié en vertu de l’article 103 du règlement de l’Assemblée nationale, qui dispose que «les projets de loi peuvent être retirés par le gouvernement à tout moment, jusqu’à adoption définitive par l’Assemblée nationale». Il n’en fallait pas plus pour que les députés de l’opposition quittent la salle. D’ailleurs, ils n’ont plus regagné l’hémicycle puisque les deux autres projets de loi ont été adoptés sans eux.
Issa SIGUIRE