HomeA la uneSORTIE DE OBAMA SUR LA DEMOCRATIE : Un discours qui amuse les soutiens occidentaux des dictatures

SORTIE DE OBAMA SUR LA DEMOCRATIE : Un discours qui amuse les soutiens occidentaux des dictatures


Comme l’on pouvait s’y attendre, le président américain Barack Obama, n’a pas manqué lors de son séjour éthiopien, de pointer du doigt, du haut de la tribune de l’Union africaine, les défis que l’Afrique doit impérativement relever si elle veut s’inscrire dans la voie de la stabilité et du développement. L’un de ces défis est celui de la démocratie. « Les progrès démocratiques en Afrique étaient mis en danger par ces chefs d’Etat inamovibles », a-t-il martelé dans son discours. Ces propos, qui s’inscrivent en droite ligne de sa célèbre phrase prononcée à Accra, selon laquelle l’Afrique n’a pas besoin d’hommes forts mais « d’institutions fortes », relèvent en réalité de la lapalissade. Mais venant de la part de l’homme le plus puissant de la planète et qui, de surcroît, est censé être le porte-voix et le symbole de la démocratie, cette évidence vaut son pesant d’or, dans une Afrique tiraillée plus que jamais entre les aspirations de plus en plus fortes des peuples à aller à la démocratie et les velléités non moins affichées de certains dirigeants à régner à vie sur leurs pays. Seulement, l’on est en droit de se demander si ces critiques suffiront pour modérer l’appétit gargantuesque des princes qui nous gouvernent. A cette question, l’on peut répondre sans risque de se tromper par la négative.

L’antidote de la dictature se trouve en Occident

Et cette réponse ne doit pas étonner outre mesure les puissances occidentales. En effet, ce sont elles qui, par leur hypocrisie et leur incohérence, confortent le pouvoir des satrapes d’Afrique et encouragent les apprentis-dictateurs à persévérer dans leur logique. Si la volonté de ces puissances était réelle et sincère, elles se seraient prises autrement. On les a vues en Libye. Là-bas, elles ne se sont pas contentées de mots pour débarrasser le pays de l’un des dictateurs les plus féroces du continent noir. Et elles l’ont fait sans l’avis de l’Union africaine. En plus des morts, elles ont posé des actes significatifs qui ont eu raison du puissant appareil répressif et sécuritaire du colonel Kadhafi. C’est cet engagement franc et massif qui a permis aux opposants libyens de se défaire du joug de l’enfant terrible de Syrte. Sans cela, l’on pouvait parier que le pouvoir de Kadhafi serait toujours en place aujourd’hui. Car, de toute évidence, il avait tous les moyens, si les puissances occidentales avaient fait preuve de mollesse à son endroit, de mater dans le sang les insurgés venus de Bengazi. Il se pose alors la question de savoir pourquoi l’Occident n’affiche pas la même fermeté vis-à-vis des autres dictateurs d’Afrique. La réponse, l’on peut aisément l’imaginer. Kadhafi n’a pas été débarqué et tué parce qu’il était antidémocrate. Il l’a été parce que les richesses de son pays ne profitaient pas suffisamment aux puissances occidentales. Si c’était pour la première raison, il y a longtemps que la page des dictateurs aurait été tournée en Afrique. L’antidote de la dictature se trouve donc en Occident. Seulement, l’on peut avoir l’impression que les occidentaux rechignent à l’appliquer aux dictateurs d’Afrique. Obama

et les autres seraient bien inspirés d’aider les peuples qui souffrent dans leur chair des actes attentatoires à la démocratie que les princes qui nous gouvernent posent au quotidien et qui expliquent, (Obama l’a du reste reconnu) l’instabilité et le sous-développement de ce continent aux immenses richesses. Mais là, il convient de ne pas se faire trop d’illusions. Les puissances occidentales se contenteront d’envolées lyriques sur la démocratie, comme vient de le faire Obama à la tribune de l’UA, pour simplement se donner bonne conscience. Et les dictateurs d’Afrique le savent. Ils savent que les cris d’orfraie de ces puissances à propos des tripatouilleurs de Constitutions sont du vent. Ils en rient donc sous cape, persuadés que ce qui motive l’Occident, c’est beaucoup plus ses intérêts que son souci de sauver la démocratie chez les nègres. Et ce n’est pas la France qui dira le contraire, elle qui, au moment où le peuple tunisien s’était insurgé contre le pouvoir dictatorial de Ben Ali, avait eu l’indécence de marquer son soutien au satrape, par l’entremise de Michèle Alliot Marie, à l’époque des faits ministre de la Défense de l’hexagone.

Il y a de quoi s’indigner du comportement des Occidentaux à l’égard de nos dictateurs

La preuve, s’il en est besoin, que la sortie d’Obama sur la démocratie n’a fait ni chaud ni froid aux dictateurs du Gondwana, est la réaction des deux Congo qui, aujourd’hui, sont en passe de tripatouiller leur Constitution. La RDC, par la voix de son ministre de l’information et porte-parole du gouvernement Lambert Mendé, n’a pas craint de dire ceci : «Le président Obama ne fait que répéter ce que nous entendions depuis plusieurs mois de la part de plusieurs dirigeants occidentaux qui, lorsqu’ils visitent l’Afrique, ne peuvent pas s’empêcher de donner des leçons aux pays africains, comme si l’Afrique avait le monopole de la durée des dirigeants à la tête des Etats ». Le même son de cloche avec la même désinvolture a été entendu au pays de Sassou Nguesso où Jean Didier Elongo, membre du comité central du PCT (Parti congolais du travail) a réagi au discours d’Obama en ces termes : «Etre donneur de leçon, c’est bien, mais nous pensons que l’Afrique doit prendre son destin entre ses mains et le Congo a cette chance d’avoir un homme d’exception qui nous réunit autour du dialogue pour régler les problèmes à l’africaine ». Pour toutes ces raisons, l’on peut dire que les dictateurs ont de beaux jours devant eux en Afrique. Les satrapes africains, dont Obama a du reste pris le soin de ménager les susceptibilités, sont d’autant plus convaincus de cela qu’ils savent qu’en plus de l’hypocrisie des occidentaux, ils peuvent compter sur les faiblesses de leurs opposants pour s’éterniser au pouvoir. Et ces faiblesses se rapportent à leur ventre et à leur pubis. Le cas de l’opposant burundais, Agathon Rwasa, qui vient de répondre à l’appel à la soupe de Nkurunziza en enjambant les cadavres, est éloquent à ce sujet. Décidément, il y a de quoi désespérer de l’Afrique et s’indigner du comportement des Occidentaux à l’égard de nos dictateurs. La seule alternative qui semble s’offrir aux Africains épris de démocratie pourrait consister à déposer plainte contre les occidentaux pour complaisance, voire pour complicité avec les dictateurs qui, pour préserver leur trône, n’éprouvent aucun scrupule à massacrer leurs compatriotes. Cette plainte pourrait être formulée par les organisations des sociétés civiles (OSC) et déposée auprès des juridictions à compétences universelles. Même si elles n’obtiennent pas gain de cause, le simple fait de le faire peut être un acte qui peut interpeller des consciences. Et cela n’est pas rien.

« Le Pays »


No Comments

Leave A Comment