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SOUTIENS A LA SYRIE ET A LA TURQUIE : Que peut faire l’Afrique ?


La mobilisation de la communauté internationale pour venir en aide à la Turquie et à la Syrie frappées, le 7 février 2023, par un puissant séisme d’une magnitude évaluée entre 7,5 et 7,8 sur l’échelle de Richter et qui s’est soldé par de nombreuses pertes en vies humaines (11 200 morts, selon le bilan provisoire) et d’importants dégâts matériels,  continue. Selon le président turc, Recep Tayyip Erdogan qui a lancé un appel d’urgence, 45 pays ont proposé leur aide. Les grandes puissances mondiales, fidèles à leur habitude, ont répondu présentes, en annonçant d’importants moyens dont le déploiement est en cours. L’Union européenne (UE), par exemple, a dépêché dans l’urgence, des équipes de recherche et de sauvetage, assistées d’un système satellitaire qui fournit des informations géo-spatiales et cartographiques et s’est aussi dit prête à soutenir les populations touchées au moyen de ses programmes d’aide humanitaire.    Mais du côté de l’Afrique, en dehors de la Tunisie qui, pour l’instant, a annoncé son intention de venir en aide aux pays sinistrés en envoyant 2 avions avec à leur bord, 60 sauveteurs et 14 tonnes de couvertures et de vivres, les pays africains se sont contentés d’exprimer verbalement leurs condoléances et leur solidarité.

 

Pour donner, il faut avoir

 

En dehors donc des complaintes et des pleurs par lesquels les chefs d’Etat africains s’illustrent en pareilles circonstances, comme ce fut le cas lors de l’attaque de Charlie Hebdo, la plupart des pays africains ne bougeront pas le doigt face à la tragédie qui frappe les peuples turc et syrien. Et pour cause. La plupart des pays africains sont eux-mêmes dans une situation permanente d’urgence. Frappés par l’extrême pauvreté, les populations de la majorité des Etats africains peinent à s’offrir les trois repas quotidiens quand tout simplement elles ne sont pas dépendantes de l’aide internationale pour assurer leur survie. Bref, pour donner, il faut avoir et le dénominateur commun en Afrique, c’est l’indigence. Cette indigence est accentuée par les crises structurelles et conjoncturelles que rencontrent de nombreux Etats au Sud du Sahara. C’est le cas, par exemple, de la crise sécuritaire qui mobilise toutes les énergies et toutes les ressources des Etats de la bande sahélo-saharienne qui ont engagé une lutte à mort contre les groupes armés dont l’action meurtrière menace l’existence même des nations. Et ces Etats peuvent d’autant plus être fondés à l’inaction face à la tragédie en Turquie et en Syrie, qu’ils peuvent éprouver une sorte d’inégalité dans la réponse aux urgences que fait la communauté internationale. En effet, dans le discours, certains dirigeants du continent ne cachent plus leur amertume face au manque réel d’engagement des puissances occidentales et leur manque de sincérité face à l’insécurité dans les Etats d’Afrique de l’Ouest, notamment au Mali, au Niger et au Burkina Faso. Et cela amène les opinions internes africaines à se poser la question de savoir si l’aide qu’apportent les Etats dit riches aux pays pauvres ou en difficultés comme c’est le cas en Turquie ou en Syrie, n’est pas tout simplement une aide calculée.

 

L’Afrique doit aussi apprendre à être présente là où le devoir, y compris humanitaire, l’appelle

 

La seconde raison qui explique l’immobilisme des Etats africains face à la catastrophe humanitaire en Turquie et en Syrie, c’est la mentalité d’assistanat qui s’est développée au sein des Etats africains et de leurs populations habitués à tendre la sébile. Il est inscrit dans le schéma mental de nombreux Africains que la solidarité se fait toujours selon l’axe Nord-Sud et non le sens inverse. Cela dit, si ces raisons peuvent expliquer la faible mobilisation des Etats africains, elles ne sauraient les justifier car ce qui se joue en Turquie et en Syrie, touche à l’humanité. Et il y a d’autant plus nécessité à agir que c’est une véritable course contre la montre qui est engagée pour sauver des vies. Selon les spécialistes, les 72 premières heures sont cruciales pour retrouver des survivants qui sont encore des milliers à être dans les décombres ou des grabats alors que selon certains responsables de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS), « les cartes des évènements montrent que 23 millions de personnes sont potentiellement exposées, dont 5 millions de personnes vulnérables ».  L’argument du manque de moyens que peuvent brandir les Etats africains face à ce drame, est d’ailleurs très fragile. Car, ce dont les Turcs et les Syriens ont le plus besoin en ce moment, ce sont les ressources humaines pour déblayer les décombres à la recherche des personnes encore ensevelies. Et s’il y a bien une richesse que personne ne peut disputer au continent noir, c’est le nombre et la jeunesse de sa population qui sont, dans les circonstances présentes, les ressources les plus nécessaires.Dans tous les cas, si l’Afrique qui aspire à un rôle de plus en plus important sur la scène internationale et qui n’hésite pas à le revendiquer devant diverses tribunes, veut voir cette ambition se matérialiser, elle doit aussi apprendre à être présente là où le devoir, y compris humanitaire, l’appelle.  

 

« Le Pays »   


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