TAHIROU SANOU, SP/ARCOP, A PROPOS DE LA MAUVAISE EXECUTION DES MARCHES PUBLICS : « Un processus de sanctions est en cours de téléchargement»
Le domaine des marchés publics fait l’objet de polémiques au Burkina Faso. Pourquoi ? Des soupçons de corruption sont toujours collés à ce secteur. De même, plusieurs ouvrages réalisés ne tiennent que le temps d’une saison, avec toutes les conséquences qui vont avec. A ce propos, nous nous sommes entretenu avec Tahirou Sanou, Secrétaire permanent de l’Autorité de régulation de la commande publique (ARCOP), sur certains aspects de la commande publique. L’ARCOP a une grande responsabilité dans le secteur des marchés publics.
« Le Pays » : L’ARCOP a tenu ses Journées de la commande publique (JCP) dans un contexte où l’on constate la destruction, du fait des intempéries (vent, pluie), d’infrastructures issues de l’exécution de marchés publics, très souvent avant même leur réception. A quel niveau situez-vous les responsabilités parce que, pour les citoyens, les marchés publics sont mal exécutés ?
Tahirou Sanou : C’est vrai, la qualité des ouvrages issus de l’exécution des marchés publics, a été perçue comme l’une des dimensions des problématiques prévenantes de la commande dans le cadre des JCP. Les participants aux ateliers se sont d’ailleurs préoccupés aussi de la destruction des ouvrages du fait des intempéries, avant et après même leur réception. Le constat est là, il est réel et amer ; la qualité des ouvrages n’est ni à la hauteur des efforts d’investissement consentis par les administrations publiques, ni à la hauteur des besoins ou des attentes des populations bénéficiaires. A qui la faute ? Voilà la question qui se pose souvent et que vous reprenez. Pour moi, tout le monde est coupable sans être responsable au même degré, de la mauvaise qualité des ouvrages. Oui, je l’assume parce qu’affirmer que tout le monde est coupable, peut faire polémique. Mais, je veux simplement dire que d’abord le citoyen, pris individuellement ou collectivement, est en dernier ressort le gardien de la bonne exécution des marchés publics puisque c’est en son nom ou pour son compte que les administrations contractantes passent des contrats pour la réalisation d’ouvrages, sous le regard des organes de contrôle administratif, politique ou judiciaire. Celui-ci a donc toute la légalité et la légitimité d’être exigeant vis-à-vis des acteurs directement impliqués dans la réalisation des ouvrages et surtout de leur demander des comptes et au besoin, d’exiger que les auteurs identifiés répondent de leurs manquements. Je veux donc dire que les acteurs directement impliqués que sont les autorités contractantes, les prestataires, notamment les entreprises et les maîtres d’œuvres sont certes, au premier chef, responsables de la qualité des ouvrages, mais que les organes de contrôle ou de régulation ont également une responsabilité à assumer. Mais cela n’exclut pas le rôle combien essentiel du citoyen. Chacun ou chaque acteur, dans un élan de patriotisme, doit s’indigner par rapport à ce qui se passe en la matière et individuellement ou collectivement, agir pour plus de qualité.
Quelles sont les sanctions encourues par les entreprises défaillantes en matière d’exécution des marchés publics ?
La nouvelle réforme aménage le régime de sanctions à l’encontre des entreprises autour de trois types de sanctions. Il s’agit d’abord de sanctions pénales qui sont du ressort du juge pénal, ensuite de sanctions disciplinaires et pécuniaires qui sont de la compétence de l’ARCOP. Les sanctions disciplinaires touchent l’entreprise dans sa liberté de participer à la commande publique puisqu’elles consistent essentiellement à suspendre, soit temporairement, soit définitivement, les prestataires défaillants. Il convient aussi de préciser qu’une entreprise peut être déclarée défaillante sans être nécessairement exclue de la commande publique et tout dépend des circonstances dans lesquelles elle a exécuté ses prestations. Donc, lorsqu’elle ne conduit pas à l’exclusion, la défaillance restreint seulement la liberté d’accès à la commande publique puisque le prestataire ne peut pas participer à certaines procédures, notamment l’entente directe. Les sanctions pécuniaires, elles, par contre, touchent l’entreprise dans son patrimoine. Elles consistent, en effet, à faire payer au prestataire défaillant ou délinquant, une somme calculée à partir du montant de sa soumission ou du marché dont il est titulaire et ce, alternativement à une exclusion. Ces sanctions ont été introduites en 2016 par la loi 039.
Cs sanctions sont-elles appliquées sur le terrain ?
Je dis oui, mais des précisions s’imposent. D’abord, prononcer une sanction est un acte très grave en ce sens qu’il s’agit de limiter la liberté de toucher au patrimoine de la personne mise en cause. Pour cette raison, des précautions d’ordre procédural doivent être strictement observées sous peine d’exposer la décision de sanctions à l’annulation du juge. Je rappelle que les décisions de l’ARCOP, quelles soient rendues en matière de litige ou disciplinaire, sont susceptibles de recours devant le juge administratif. Et pour des questions de forme, celui-ci peut annuler une décision de sanction alors qu’au fond, les faits matériels sont établis. C’est donc dire qu’en matière de sanctions, ce ne sont pas les échos ou les opinions qui impriment le rythme ou le prononcé des décisions de l’ARCOP. Il y a les impératifs de légalité qu’il faut absolument observer. C’est dans ces circonstances que l’ARCOP, à travers l’organe de règlement des différends, prononce des sanctions d’exclusion et une liste des prestataires exclus de la commande publique existe et est disponible sur son site. Evidemment, lorsqu’un prestataire obtient l’annulation de la sanction, son nom est retiré de la liste. Cela a été le cas en 2017 avec un maître d’ouvrage délégué qui, après une enquête de la cellule créée à cet effet, s’était vu infliger une sanction d’exclusion. En termes de statistiques, ce sont 109 dénonciations et une dizaine d’enquêtes que l’ARCOP a examinées ou conduites. 94 décisions d’exclusion ont été prononcées. Ce n’est certainement pas suffisant, au regard de l’ampleur des mauvaises pratiques dans le secteur. Mais je peux vous assurer que n’eussent été certaines contraintes d’ordre technique sur lesquelles je ne souhaite pas m’étaler ici, beaucoup de cas d’ordre disciplinaire auraient été examinés cette année. Je rassure aussi l’opinion que ces problèmes techniques sont en passe d’être résolus ou le seront d’ici le premier trimestre de l’année en cours. Donc, les acteurs indélicats n’ont qu’à se préparer, car un processus de sanctions est en cours de téléchargement.
Comme le on sait, les mauvaises pratiques, dans le secteur des marchés publics, continuent. Est-ce à dire que les acteurs des marchés publics refusent de s’amender ?
A mon avis, la réponse doit être nuancée car je constate parfois que certaines entreprises sanctionnées, adoptent une attitude d’évitement ou de contournement de la peine, au lieu de la subir. Elles vont donc, en cas d’exclusion, tenter de revenir avec une nouvelle société ou, à défaut, de participer à la commande publique par personne interposée. Dans ces circonstances, il me paraît difficile de soutenir l’idée d’amendement pour une entreprise. Cela pose le débat de l’efficacité des sanctions. C’est pour cela aussi que les sanctions pécuniaires ont été introduites en 2016. Celles-ci connaîtront un début d’application effective avec la levée prochaine des contraintes existantes.
Il nous revient que certaines entreprises fautives négocient pour éviter les sanctions. Est-ce vrai et quel est, de façon générale, l’attitude de l’ARCOP sur une telle question ?
Je ne vois pas comment une entreprise pourrait négocier avec l’ARCOP pour échapper à une sanction. Du reste, il me paraît important de souligner que l’organe de règlement des différends, qui exerce le pouvoir moralisateur du secteur à travers les sanctions disciplinaires, instruit à charge et à décharge, les faits qui sont portés à sa connaissance par dénonciation ou à la suite d’une enquête. Lorsqu’il estime que les faits évoqués ne sont pas établis, il décide de ne pas prononcer de sanction. Cela me paraît normal, car il ne doit pas y avoir d’automaticité entre poursuite disciplinaire et décision de sanction. Entre les poursuites et la sanction, il y a le pouvoir d’appréciation impartiale et indépendante des membres de l’organe de règlement des différends.
Quelles sont, selon vous, les conséquences de la mauvaise exécution des marchés publics?
La mauvaise exécution des marchés publics implique des conséquences très graves, multiples et multiformes. Les conséquences sont multiples parce qu’elles sont d’ordres économique, financier et social. Une infrastructure, une route ou un marché à bétail, par exemple, qui s’écroule aussitôt après sa réalisation, crée un désordre dans le système économique, au niveau financier. Cette situation engendre une perte sèche pour les finances publiques et les retombées, au plan social, escomptées pour les populations, ne seront pas au rendez-vous. Les conséquences sont aussi multiformes parce certaines peuvent être évaluées ou quantifiables ; d’autres sont difficilement saisissables mais réelles. Ainsi, on peut évaluer l’impact financier de la mauvaise exécution des marchés sur le budget d’investissement public. Mais, quand une école mal exécutée s’écroule, mettant les élèves dans des situations d’arrêt momentané ou définitif d’apprentissage, quel ordre de grandeur permet de décrire les conséquences sociales qui en découlent? Si l’Etat est contraint de faire du sur- place en réallouant des crédits pour construire les mêmes écoles et diffère ainsi la construction de nouveaux Centre de santé et l’acquisition des équipements biomédicaux nécessaires, il s’ensuit nécessairement des conséquences socio-économiques inestimables pour les populations.
La corruption n’est-elle pas le principal facteur explicatif de la mauvaise exécution des marchés publics ?
Bien évidemment, la corruption est un facteur explicatif de la mauvaise exécution des prestations issues de la commande publique. L’argent que l’on sollicite ou qu’on agrée de la part du prestataire, crée un manque à gagner. Et comme la raison d’être de toute entreprise est de faire du bénéfice, l’entreprise convaincue de corruption va rattraper nécessairement le manque à gagner en jouant sur la qualité des prestations, c’est-à-dire exécuter au rabais les prestations initialement convenues avec la complicité silencieuse du corrompu.
Parlant de corruption dans le récent classement du REN-LAC, le secteur de la commande publique, précédemment classé dans le trio de tête en terme de corruption, a été extirpé ou s’est extirpée des premiers rangs. En tant que régulateur, que vous inspire ce classement ?
Effectivement, j’ai eu les échos de ce classement. Pour moi, ce classement est un bon signe parce venant du REN-LAC, il ne peut que traduire réellement l’état d’esprit des acteurs ainsi que la perception de l’opinion sur la question de la corruption dans le secteur de la commande publique sur la période concernée à savoir l’année 2017. Je relève au passage que le REN-LAC siège aussi bien dans le conseil de régulation de l’ARCOP que dans l’organe de règlement des différends aux côtés d’autres acteurs de la société civile. Donc, c’est une organisation qui, d’une manière ou une autre, est partie prenante dans le dispositif de régulation et partant, dans le dispositif de la commande publique. En tout état de cause, le recul du secteur de la commande dans le classement en 2017, au-delà de l’appréciation ou des commentaires qu’il peut susciter, devrait être perçu comme un message fort à l’endroit de tous les acteurs. D’abord, parce qu’il témoigne de l’ampleur de la corruption dans le secteur, puisque même s’il n’est pas classé parmi le trio, le secteur se trouve dans le top 10 des secteurs les plus corrompus. Au regard des conséquences fâcheuses que je viens d’évoquer, l’objectif doit être celui de minimiser davantage la réalité de la corruption, à défaut de la vaincre absolument. Ensuite, ce classement engendre un défi, celui de faire en sorte que plus jamais le secteur de la commande publique ne se retrouve parmi le trio.
Dans les classements des années antérieures, votre structure occupait les premières places des plus corrompues. Cette fois-ci, vous avez cédé la place à d’autres structures. C’est dire, peut-être, que la situation s’améliore pour l’ARCOP. Qu’avez-vous fait exactement pour améliorer les choses?
Peut-être que le REN-LAC est mieux placé pour répondre à cette question, pour avoir conduit un sondage qui lui a permis de faire son classement. Mais ce que je peux dire, c’est que l’année 2016 a connu un tournant décisif dans l’histoire de la commande publique de notre pays. Qu’est-ce qui s’est passé ? Les autorités, notamment le gouvernement, soucieuses de l’amélioration de la gouvernance économique et financière, ont impulsé des réformes dans le secteur de la commande, réformes marquées par l’adoption de la loi régissant la commande publique dans notre pays, la loi n°039 du 2 décembre 2016. C’est la première fois que nous élevions le dispositif normatif général de la commande publique à un rang législatif. La nécessité d’adopter une loi qui permettrait de corriger les faiblesses des textes antérieurs, a été perçue bien avant. Et l’ex-ARMP, depuis 2011, a travaillé à faire adopter une loi définissant des infractions pénales spécifiques en matière de marchés publics. Faute de volonté politique suffisante, le processus est resté en léthargie pendant plusieurs années. Et il a fallu attendre en 2016, pour que l’ARCOP actualise l’ancienne mouture de l’avant-projet que l’Assemblée Nationale va adopter, à l’initiative du Gouvernement. A mon avis, c’est l’adoption de la loi n°039 du 2 décembre 2016, qui consacre des infractions pénales spécifiques assorties des peines les plus dissuasives à l’encontre des acteurs, qui constitue l’un des facteurs explicatifs de la perception de la corruption. Je dois aussi relever que l’adoption de la loi a été suivie de plusieurs actions de sensibilisation initiées par l’ARCOP. Il ne faudrait pas également, à mon avis, perdre de vue le fait que l’ASCE-LC procède dorénavant systématiquement à des audits dans les départements ministériels. Tout cela constitue des changements notables amorcés à partir de 2016, qu’il convient de relever et saluer à leur juste valeur
D’aucuns estiment qu’une structure comme la vôtre est généralement aux bottes du pouvoir en place et que, ce faisant, elle n’est pas libre de travailler. Quel commentaire en faites-vous ?
Je m’étonne d’entendre parfois certaines personnes soutenir de telles affirmations. En réalité, une telle option découle de la méconnaissance de l’organisation, de la composition et du fonctionnement de l’ARCOP. Le Conseil de régulation qui est l’organe chargé de l’orientation stratégique, du contrôle de la gestion des activités, est composé de manière égalitaire de représentants de l’Administration, de la société civile et du secteur privé. De même, l’organe de règlement des différends est composé de façon égalitaire entre représentants de l’Administration, du secteur privé et de la société civile. Les organisations de la société civile les plus représentatives œuvrant dans le domaine de la gouvernance économique, de la démocratie et des droits de l’Homme qui existent dans notre pays, siègent dans ces instances. Je veux citer, par exemple, le CGD, le REN-LAC, la Ligue des consommateurs, le CIFOEB, le MBDHP, etc. Du reste, les représentants de ces organisations, tous ceux du secteur privé, sont désignés de manière autonome par leurs structures faîtières sur la base évidemment de critères de compétence, d’intégrité et de moralité. Dans ces circonstances, pensez-vous que le gouvernement peut imposer un point de vue aux deux autres parties aussi bien au conseil de régulation que dans l’ORD ? Soutenir une telle affirmation relève d’une pure imagination, loin de la réalité. Penser que le Secrétariat permanent qui est l’organe opérationnel qui gère au quotidien les activités de l’ARCOP, peut influencer les choses au profit du gouvernement, n’est pas soutenable dans le contexte actuel. En effet, dans la suite de la réforme amorcée en 2016, nous avons proposé, en 2017, au gouvernement qui l’a adoptée par décret n°049 portant attributions, organisation et fonctionnement de l’ARCOP, l’exclusion du Secrétaire permanent du processus de prise de décision par l’ORD. Je rappelle que c’est le texte fondateur de l’ARCOP en 2014, qui disposait que le Secrétaire permanent participe avec voix délibérative aux réunions de l’organe de règlement des différends. Pensez-vous qu’un gouvernement enclin à interférer dans le fonctionnement de l’organe de règlement des différends, peut librement accepter cette exclusion qui lui confère un avantage potentiel, ce d’autant que la voix du Secrétaire permanent instaurerait un déséquilibre au profit de la partie administrative lors des réunions qui, je rappelle, connaissent la participation du représentant de chaque composante à savoir l’Administration, le secteur privé et la société civile ? Pour ma part, ceux qui soutiennent l’idée que le gouvernement s’ingère dans le fonctionnement de l’ARCOP, fondent leur opinion sur une vision fantasmagorique de la structure ; toute chose qui est aux antipodes de la réalité.
L’ARCOP a commémoré, récemment, son 10e anniversaire à travers l’organisation d’une activité dénommée « Journées de la commande publique ». Quel était le contenu de ces journées?
C’est juste. Du 12 au 14 juillet dernier, se sont tenues à Bobo-Dioulasso, les premières journées de la commande. Placées sous le haut patronage du Premier ministre, chef du gouvernement et le parrainage du président de la Chambre de commerce et d’industrie du Burkina Faso, ces journées se sont déroulées autour du thème général : «La commande publique, un levier stratégique dans l’atteinte des résultats du Plan national de développement économique et social (PNDES ». Avant d’en arriver au contenu de ces journées, il me paraît important de relever qu’elles s’inscrivent dans la dynamique d’une quête permanente de l’efficacité de la commande publique, fondée sur un dispositif performant de régulation. Elles ont été imaginées comme un outil d’aide à une régulation innovante, au service de l’efficacité de la commande publique. Dans ce sens, les JCP ont été, à l’origine, conçues autour de trois axes ou trois activités majeures, si vous voulez. Il s’agit d’un forum scientifique qui regroupe praticiens et théoriciens de la commande publique pour des réflexions sur les problématiques nouvelles ou pressantes des acteurs, en vue de proposer des mesures palliatives ou des solutions innovantes appropriées ; une aire d’exposition qui offre aux acteurs l’opportunité de se connaître à l’exposé de leur savoir-faire ; et une nuit de la commande publique permettant de célébrer l’excellence dans le secteur. Mais pour les premières journées, et pour des raisons essentiellement budgétaires, l’aire d’exposition n’a pas été animée. Le forum a réuni plus de 300 participants issus de l’Administration publique, du secteur privé et de la société civile. Il s’est déroulé autour de communications thématiques, suivies de travaux en ateliers. La nuit de la commande a permis de récompenser les acteurs qui se sont illustrés positivement au titre de l’année 2017. Pour ce faire, un concours a préalablement été organisé suivant des critères rendus publics, sous la direction d’un jury composé de représentants des secteurs public et privé.
Quelles en sont les principales conclusions et quelles sont les mesures prises pour que ces conclusions ne dorment pas dans les tiroirs comme on le constate le plus souvent pour ces genres d’évènements?
Les principales conclusions des JCP découlent des travaux du forum scientifique, de la nuit de la commande publique ayant seulement consisté à primer quatre lauréats dont une autorité contractante et trois prestataires. S’agissant des conclusions du Forum, les participants se devaient d’approfondir les recommandations et suggestions des consultants communicateurs et de formuler de nouvelles recommandations. Dans cette optique, les trois ateliers ont adopté diverses recommandations dont la mise en œuvre permettra de faire un bon qualitatif dans la quête de l’efficacité de la commande. Au nombre de ces recommandations, on peut relever les principales qui consistent à mener des enquêtes pour situer les responsabilités en cas de défaillances sur les réalisations d’infrastructures sociales et économiques (écoles, formations sanitaires, routes, etc.) à travers l’auto- saisine de l’ARCOP ; évaluer les maîtrises d’ouvrage déléguées avant le renouvellement de leurs agréments; affecter du personnel technique au sein des DMP ; organiser des sessions de renforcement des capacités des acteurs sur la définition des besoins et la nomenclature budgétaire ; améliorer la collaboration entre les acteurs de la commande publique ; créer un emploi d’agents spécialistes de la commande publique et appliquer les critères de choix des personnes à nommer dans les postes de directeur des marchés publics (DMP) et de personne responsable des marchés (PRM) ; appliquer effectivement les sanctions prévues dans les textes règlementaires ; engager la responsabilité effective des bureaux de contrôle en cas de défaillance dans les ouvrages ; mettre en place un mécanisme de suivi des conventions MOD par les maîtres d’ouvrage ; appliquer l’exclusion mutuelle appliquée par les PTF aux entreprises défaillantes sur financements du Budget de l’Etat ; veiller au strict respect de la réglementation en matière de commande publique ; rationaliser les Dossiers d’appels d’offres (DAO) en rendant les spécifications techniques non excessives et conformes au niveau de complexité du marché ; veiller au respect des délais précontractuels et contractuels durant toute la procédure, depuis la mise à concurrence jusqu’à parfait paiement ; appliquer les préférences locales et nationales d’au moins 30% de la commande publique à planifier dans les PPM et encourager la co-traitance et la sous-traitance. Aux yeux des participants, la mise en œuvre effective de ces recommandations permettra à la commande publique de jouer pleinement son rôle de levier stratégique, dans l’atteinte des résultats du PNDES. C’est pourquoi l’ARCOP s’investira de toutes ses forces pour les rendre opérationnelles. Déjà, très prochainement, le conseil de régulation, qui est l’organe chargé de l’orientation stratégique de l’ARCOP, se saisira des recommandations pour les peaufiner conformément à la décision de la plénière du forum scientifique et définir les orientations de leur mise en œuvre. Certaines recommandations relèvent exclusivement de la responsabilité de l’ARCOP, telle que la conduite des enquêtes sur les cas de mauvaise exécution, d’autres en revanche impliquent une action concertée avec les autorités contractantes, les prestataires et les organes de contrôle. De même, certaines recommandations pourraient nécessiter l’intervention du gouvernement. Et dans tous les cas, un plan d’actions de mise en œuvre des recommandations sera incessamment élaboré et exécuté sous le contrôle du Conseil de régulation qui, de part sa composition tripartite (Administration, société civile et secteur privé), jouit d’une légitimité suffisante pour éviter que les conclusions du Forum ne dorment pas dans les tiroirs.
Quelles sont les difficultés auxquelles fait face l’ARCOP dans ses activités ?
La contrainte majeure pour l’ARCOP, se situe au niveau de la faiblesse de ses moyens financiers. Naturellement, cette difficulté ne lui est pas propre, puisque même l’Etat éprouve des difficultés d’ordre financier pour mener à bien ses missions. Parlant de ce qui nous concerne, je dirais que la loi 039 évoquée plus haut, a consacré la redevance de régulation comme la principale ressource devant permettre le financement autonome et durable des activités de l’ARCOP. Le processus de son opérationnalisation se poursuit. J’ai l’espoir que les choses vont s’améliorer en la matière.
Propos recueillis par Michel NANA